Idée reçue n°1 « La nutrition, c’est l’affaire des médecins nutritionnistes »

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 20/05/2008 Mis à jour le 01/03/2017
La nutrition n'est pas uniquement l'affaire des médecins nutritionnistes.C'est surtout celle des biochimistes.

On ne dira jamais assez combien les découvertes de la nutrition doivent à la biochimie. La plupart des réactions métaboliques de l’organisme ont été mises à jour par des biochimistes. Ce sont des biochimistes qui ont identifié, isolé et synthétisé les vitamines. Ce sont eux qui, pour l’essentiel continuent de faire vivre et développer la science nutritionnelle fondamentale, longtemps ignorés de la médecine classique quand ils n’étaient pas tout bonnement raillés.

Quand il est devenu clair il y a quarante ans après les études de Framingham et des Sept Pays que l’alimentation jouait un rôle plus important qu’on ne le croyait sur la santé, la médecine a lancé un véritable hold-up sur le discours nutritionnel. Des endocrinologues français, jusqu’alors spécialisés dans le traitement du surpoids ou du diabète, et pour lesquels la biochimie reste une abstraction, se sont baptisés « nutritionnistes », multipliant avis, conseils et diktats y compris dans les domaines où leurs connaissances sont insuffisantes. On leur doit la plupart des idées caricaturales sur lesquelles se base hélas souvent la politique de santé, elle aussi conduite par des médecins : le cholestérol conduit à l’infarctus ; les graisses alimentaires sont responsables de l’obésité ; plus on avale de calcium, plus on a des os solides… Le terme de « nutritionniste » a été si complètement capté par le milieu médical français que les premiers des « nutritionnistes », les biochimistes eux-mêmes ne peuvent plus s’en prévaloir ! (1)

Pourtant, l’enseignement de la nutrition à la faculté de médecine reste embryonnaire, se limitant à quelques heures d’études au cours desquelles sont dispensées des données parfois éculées. Par exemple, on y enseigne encore que le seul intérêt de la vitamine C, c’est de prévenir le scorbut, alors qu’il s’agit du principal antioxydant des êtres vivants. Un peu comme si dans l’organisme l’eau ne servait qu’à nous éviter d’avoir soif.

La biochimie n’est guère développée, au point que la plupart des médecins, y compris certains de ceux qui sont en charge de la politique nutritionnelle officielle seraient bien incapables de décrire correctement les réactions qui permettent l’utilisation de l’énergie des aliments.

Dans les instances officielles où biochimistes et médecins se côtoient, le fossé est parfois si profond, l’incompréhension si totale, que les dissensions sont totales. Lors des débats en 2000 à l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) sur les quantités optimales et le type de graisses qu’il faudrait consommer pour être en bonne santé, de vives discussions ont opposé sur les oméga-3 biochimistes d’un côté (plus certains médecins pionniers comme le Dr Serge Renaud) aux tenants de l’Académie de médecine. Les premiers plaidaient pour que le rôle crucial de ces acides gras soit entériné par des recommandations audacieuses. Les médecins y étaient opposés. Pour une fois, les biochimistes ont eu gain de cause.

(1) Dans les pays anglo-saxons et même au Canada francophone, un « nutritionniste » est un spécialiste de nutrition, pas nécessairement médecin.

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