Soleil et poisson : pourquoi ils préviennent la dépression

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 05/09/2016 Mis à jour le 10/03/2017
Le poisson et ses oméga-3, le soleil et sa vitamine D : deux moyens puissants de prévenir la dépression.

La dépression est la maladie psychique la plus courante. Elle touche près de 3 millions de personnes en France et les femmes sont 2 fois plus atteintes que les hommes. Plusieurs études se sont intéressées au lien entre la consommation d’acides gras oméga-3 (que l’on trouve dans des poissons : saumon, hareng, maquereau, thon, sardines...) et la dépression.

Lire : oméga-3 et dépression : un lien de plus en plus solide

 

Le poisson limite le risque de dépression

Une étude parue en 2014 suggère que manger régulièrement du poisson, riche en acides gras oméga-3, a un effet bénéfique à long terme sur notre santé mentale. Cette étude longitudinale a commencé en 2004. Sur une période de 2 ans, 1.386 adultes australiens (853 femmes et 533 hommes) âgés de 26 à 36 ans ont répondu à un questionnaire sur leurs habitudes alimentaires. A partir de 2009, les épisodes de dépression ont été enregistrés.

Les résultats montrent que 160 femmes (18,8 %) et 70 hommes (13,1 %) ont vécu des périodes de dépression pendant le suivi. Pour les femmes, la consommation d’une portion supplémentaire de poisson par semaine est associée à une diminution de 6 % du risque de nouvel épisode dépressif. Les femmes qui mangent du poisson plus de 2 fois par semaine au début de l’étude ont 25 % de risque en moins de faire une dépression par rapport à celles qui mangent du poisson moins de 2 fois par semaine.

De plus, l'analyse de 26 études sur ce sujet, publiée en 2015, a trouvé que les plus gros consommateurs de poisson ont un risque de dépression diminué de 17 % par rapport à ceux qui en mangent peu.

Il faut manger 50 g de poisson par jour pour réduire son risque de dépression

En 2016, des chercheurs de l’université de Catane en Italie ont étudié le lien entre la consommation d’acides gras poly-insaturés, de poisson et la dépression. Ils ont réalisé une méta-analyse sur l’association entre les apports en poisson, oméga-3, et la dépression. 31 études incluant 255.000 personne et plus de 20.000 cas de dépression ont été analysées.

Le poisson et les acides gras oméga-3 étaient associés à un risque réduit de dépression. L’analyse de 21 séries de données sur le lien entre la consommation de poisson et la dépression ont montré une réduction significative du risque (-22 %).

Les chercheurs estiment que le risque diminue significativement avec une consommation de 50 g par jour de poisson. L’association des oméga-3 avec le risque de dépression forme une courbe en J, avec le maximum de réduction du risque pour 1,8 g par jour d’oméga-3.

50 g de poisson représentent environ une demi-portion. LaNutrition conseille de manger jusqu'à 2-3 portions de poisson par semaine (2 pour les enfants et pendant la grossesse) en privilégiant sardine, maquereau, hareng, saumon... Limiter la consommation de thon et autres espèces contaminées par le mercure (flétan, brochet, requin...). Un peu de vin rouge chaque jour fait monter le taux d'oméga-3 dans le sang. Pour les végétariens et végans, consommer des sources végétales d'oméga-3 comme l'huile de colza, de lin, de cameline ou encore les noix, les graines de lin, en limitant la part des graisses oméga-6 : pas d'huiles de maïs, tournesol, pépins de raisin, pas d'excès de produits céréaliers.

Lire : une portion, c'est combien ?


Avec la vitamine D, les oméga-3 contrôlent l’hormone de l’humeur (la sérotonine)

Du point de vue moléculaire, Les oméga-3 du poisson (EPA, DHA, DPA), ont un effet favorable sur deux neurotransmetteurs importants pour l'humeur : la sérotonine et la dopamine. Dans une étude de 2015, les chercheurs montrent par quels mécanismes un déficit en vitamine D et des apports insuffisants en acides gras oméga-3 contribuent à un dysfonctionnement dans la synthèse et l’action de la sérotonine et peuvent ainsi conduire, en combinaison avec des facteurs génétiques, à l’apparition de troubles du comportement et certaines pathologies neuropsychiatriques.

Lire : à quoi sert la sérotonine ?

« Beaucoup de personnes souffrant d’une maladie mentale présentent un déficit en certains nutriments comme les omégas-3 ou la vitamine D » expliquent les auteurs.

Lire : comment les oméga-3 luttent contre la dépression

Dans cette étude les chercheurs proposent des mécanismes par lesquels la synthèse de la sérotonine, sa libération et son action dans le cerveau sont modulés par la vitamine D et les acides gras oméga-3, l’acide eicosapentaénoïque (EPA) et l’acide docosahexaénoïque (DHA), deux acides gras que l'on sait synthétiser à partir de l'acide alpha-linolénique (noix, huile de colza...), ou que l'on trouve tout prêt dans les poissons gras notamment.

Les études montrent que les niveaux sanguins d’EPA et DHA sont plus faibles chez les personnes qui souffrent de maladies psychiatriques (troubles bipolaires, comportement suicidaire, schizophrénie…). Et une supplémentation en oméga-3 a un rôle bénéfique sur la sévérité des symptômes.

Selon les chercheurs, l’EPA pourrait augmenter la libération de la sérotonine par les neurones présynaptiques, notamment en agissant sur la formation des prostaglandines E2. Quant au DHA, il influencerait l’action de la sérotonine en augmentant la fluidité de la membrane cellulaire –et donc l’accessibilité au récepteur de la sérotonine- dans les neurones post-synaptiques.

Les auteurs proposent un modèle dans lequel des niveaux insuffisants de vitamine D, EPA ou DHA en combinaison avec des facteurs génétiques et à des moments clés du développement conduiraient à des dysfonctionnements de l’activation de la sérotonine et de sa fonction. Cela pourrait constituer un mécanisme sous-jacent qui contribue aux troubles neuropsychiatriques et à la dépression.

Dans la population, des niveaux insuffisants en vitamine D et oméga-3 sont fréquents, ce qui laisse penser que la synthèse de la sérotonine au niveau du cerveau n’est pas optimale. « Ce modèle suggère que l’optimisation des apports en vitamine D et en acides gras oméga-3 pourraient aider à prévenir et moduler la sévérité des troubles mentaux » concluent les auteurs.

LaNutrition.fr conseille de faire en sorte de maintenir des taux sanguins de vitamine D supérieurs à 30 ng/mL, ce qui est obtenu en s'exposant 10 à 15 mn chaque jour à la mi-journée ente avril et octobre dans l'hémisphère nord, et en consommant 1000 à 2000 UI en moyenne de vitamine D le reste de l'année, sous la forme d'ampoules (pharmacie) ou de compléments alimentaires.

Lire : la dépression hivernale : une question de sérotonine

Sources

Smith K. ongitudinal Associations Between Fish Consumption and Depression in Young Adults. Am. J. Epidemiol. (2014) doi: 10.1093/aje/kwu050 First published online: April 15, 2014

Grosso G, Micek A, Marventano S, Castellano S, Mistretta A, Pajak A, Galvano F. Dietary n-3 PUFA, fish consumption and depression: A systematic review and meta-analysis of observational studies. J Affect Disord. 2016 Aug 16;205:269-281. doi: 10.1016/j.jad.2016.08.011.

Patrick RP, Ames BN. Vitamin D and the omega-3 fatty acids control serotonin synthesis and action, part 2: relevance for ADHD, bipolar, schizophrenia, and impulsive behavior. FASEB J. 2015 Feb 24. pii: fj.14-268342.

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