Soulager la douleur avec la méditation de pleine conscience

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 07/12/2015 Mis à jour le 24/02/2020
Actualité

La méditation de pleine conscience soulage la douleur en agissant sur le cerveau.

Pourquoi c'est important

La méditation de pleine conscience, aussi appelée mindfulness, consiste à se focaliser sur l’instant présent en se concentrant sur les sensations corporelles et les perceptions. Les bénéfices sur la santé sont associés à des améliorations dans le contrôle cognitif, à la régulation des émotions, à l’humeur positive et l’acceptation, elles-mêmes associées à la modulation de la douleur.

Le contrôle de ses émotions est important pour vivre en harmonie avec les autres, sur son lieu de travail, en famille ou en société. Les difficultés des individus à contrôler leurs émotions peuvent favoriser la dépression, l’anxiété, voire des addictions. La méditation de pleine conscience implique d’accepter l'instant présent et ses pensées sans les juger. Dans ce sens, elle peut aider à contrôler ses émotions et sa douleur. Pour le Pr Tran, auteur de Méditasoins, un guide proposant des méditations adaptées aux maux de l'enfant, la méditation permet d'entraîner "l'esprit à ne plus réagir" aux sensations désagréables, ce qui "supprime la composante mentale de la douleur".

Voici deux études récentes montrant ses bienfaits contre la douleur et les émotions négatives.

Lire un extrait du livre de David O'Hare, "5 minutes le matin"

La méditation réduit la douleur plus efficacement qu’un placebo

Cette première recherche parue dans la revue Neuroscience suggère que la mindfulness réduit significativement la douleur auto-évaluée par les patients et ceci de manière plus efficace qu’un placebo. L’étude montre que les mécanismes neuronaux utilisés par les différentes interventions de soulagement de la douleur sont différents.

Les chercheurs ont mené une série d’expériences chez 75 volontaires en bonne santé qui ont été sélectionnés au hasard pour suivre pendant 4 jours une des 4 interventions afin de déterminer par la suite leur impact sur la douleur : méditation de pleine conscience (une séance d’entrainement de 20 minutes par jour), placebo (crème), fausse méditation de pleine conscience et une intervention contrôle au cours de laquelle les participants ont écouté un livre.

Dans un premier temps les participants ont complété la forme courte du Freiburg Mindfulness Inventory puis ils ont suivi un entrainement psycho-physique dans lequel ils se sont familiarisés avec l’application pendant 5 secondes sur le bras gauche de stimuli thermiques allant de 35°C à 49°C. Les participants ont signalé leur douleur grâce à une échelle d’évaluation de la douleur. Les participants ont également passé un examen IRM du cerveau pendant l’application de stimuli thermiques neutres ou douloureux au niveau du mollet droit. Ils ont alors, toujours sous IRM, soit pratiqué la méditation de pleine conscience, soit la fausse méditation, soit ils ont reçu l’application de la crème placebo, ou juste fermé les yeux pour le groupe de contrôle.

L’étude a montré que même si une crème placebo et une « fausse » méditation de pleine conscience réduisent significativement la douleur en réponse à un stimulus thermique par rapport au groupe de contrôle, la méditation de pleine conscience atteint des réductions de la douleur significativement supérieures aux deux interventions (placebo et fausse méditation).

Les résultats ont également montré que les mécanismes neuronaux qui interviennent pour réduire la douleur sont différents pour le placebo et la méditation de pleine conscience, montrant qu’il existe plusieurs voies pour la modulation de la douleur.

Le soulagement de la douleur qui suit la méditation de pleine conscience est associé à une activation accrue dans les régions du cerveau liées à la modulation cognitive de la douleur. En revanche, l’analgésie provenant du placebo est liée à l’activation ou désactivation de zones liées au traitement sensoriel. Quant à la fausse méditation, elle est juste associée à une réduction de la fréquence respiratoire mais pas avec des changements importants de l’activité neuronale.

«Si l’on compare au placebo, le soulagement de la douleur avec la méditation de pleine conscience engage de multiples mécanismes associés au contrôle cognitif, à la régulation des émotions et la réduction de l’activation des processus sensoriels de bas-niveau » dit le Dr Fadel Zeidan, auteur de l’étude. « Les résultats montrent également que la méditation de pleine conscience utilise un sous-ensemble unique de régions du cerveau par rapport au placebo. En un mot, ces données fournissent des preuves que la méditation de pleine conscience n'est pas un pseudo-type d’intervention cognitive ».

Les chercheurs ignorent cependant combien de temps peut durer le soulagement de la douleur grâce à la méditation de pleine conscience.

Lire aussi : Méditation : 7 bénéfices santé

Des bénéfices même chez des novices en méditation

Dans une autre recherche parue dans la revue Social, Cognitive, and Affective Neuroscience, des chercheurs américains ont voulu savoir si des personnes qui n’avaient pas l’habitude de méditer pouvaient en tirer des bénéfices avec seulement 20 minutes d’introduction à cette pratique. Cette étude a été menée par les universités de Yale et de Dartmouth.

17 personnes, âgées de 18 à 45 ans, qui n’avaient pas d’expérience de la méditation, ont participé. Elles ont été placées dans deux situations différentes, pendant que les chercheurs observaient la réaction de leur cerveau grâce à une IRM fonctionnelle. Dans le premier contexte, une forte chaleur ou une chaleur normale était appliquée sur l'avant-bras des participants ; dans l’autre situation, les chercheurs leur présentaient des images négatives et comparaient leurs réactions avec des images plus neutres.

Dans les deux cas, il y avait une différence selon que les participants devaient appliquer les principes de la mindfulness ou réagir comme à leur habitude : ils disaient ressentir moins de douleur ou d’émotions négatives quand ils utilisaient la mindfulness. En même temps, leur cerveau montrait moins d’activité associée à la douleur et aux émotions négatives. Ces modifications n’avaient pas lieu dans le cortex préfrontal, la zone du cerveau qui contrôle la conscience et la prise de décision. Pour les auteurs, ce n’était donc pas une réaction volontaire.

L’effet de la méditation était tel que, quand les participants subissaient une forte chaleur sur le bras, leur cerveau répondait comme s’il s’agissait d’une température normale. Pour Hedi Kober, principale auteure de cet article, « C'est comme si le cerveau réagissait à une température chaude, pas à une chaleur très élevée. »

Par conséquent, cette recherche montre que la pleine conscience apporte des avantages cliniques, sur la douleur et les émotions, même sans une longue pratique de méditation. 

En pratique

Pour démarrer avec la méditation de pleine conscience, installez-vous dans un endroit calme, assis sur une chaise, ou en tailleur au sol. Fermez les yeux ou laissez votre regard se perdre dans le vague. Maintenez votre dos droit et concentrez-vous sur votre respiration. Imaginez les mouvements de l’air dans vos poumons, lors de chaque inspiration ou expiration. Portez attention à votre ventre qui se gonfle et se dégonfle. Si des pensées viennent à vous, observez-les et laissez-les s’échapper.

Des livres pour aller plus loin : Méditasoins et 5 minutes le matin 

Sources

Zeidan F, Emerson NM, Farris SR, Ray JN, Jung Y, McHaffie JG, Coghill RC. Mindfulness Meditation-Based Pain Relief Employs Different Neural Mechanisms Than Placebo and Sham Mindfulness Meditation-Induced Analgesia. J Neurosci. 2015 Nov 18;35(46):15307-25. doi: 10.1523/JNEUROSCI.2542-15.2015.

Kober et al. Let it be: Mindful-acceptance down-regulates pain and negative emotion. Social, Cognitive, and Affective Neuroscience . 2020.

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