L'arthrose, une maladie inflammatoire

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 09/05/2006 Mis à jour le 21/11/2017

Le monde médical l'a longtemps ignoré mais l’arthrose est une maladie inflammatoire articulaire. L’inflammation chronique détruit le cartilage, détruit les cellules du cartilage et fait souffrir. Découvrez de quelle manière.

Qu’est-ce qu’une articulation saine ?

L’articulation est fermée par une membrane d’aspect rose et lisse qui sécrète le liquide synovial (ou synovie) dans lequel baigne le cartilage. Le cartilage recouvre l’extrémité des os articulés, là où les surfaces entrent en contact. Le cartilage sain a un aspect lisse, poli et brillant.

Pour qu’une articulation assure sa mission, qui est de permettre un mouvement sans friction mais aussi d’absorber les chocs, elle doit impérativement disposer de ces deux éléments : liquide synovial et cartilage.

Lors d’un mouvement articulaire, le cartilage réduit les frictions avec l’aide de la synovie qui facilite le glissement.

Lorsque l’articulation subit une pression, le cartilage est comprimé. Quand la pression se relâche, le cartilage retrouve ses dimensions d’origine : il joue donc le rôle d’amortisseur.

Mais ce n’est possible que si le cartilage est en bonne santé.

Qu’est-ce qu’un cartilage sain ?

C’est un cartilage heureux parce qu’il dispose des trois éléments qui lui donnent sa souplesse et sa solidité (voir schéma) :

- des protéoglycanes pour attirer et retenir l’eau

- du collagène pour garder les protéoglycanes en place

- des chondrocytes, qui sont les cellules qui réparent le cartilage en fabricant collagène et protéoglycanes.

Malheureusement, dans l’arthrose, l’un au moins de ces trois éléments est trop altéré pour permettre au cartilage de bien fonctionner. Le cartilage étant altéré, l’articulation devient raide et finit par faire souffrir. L’arthrose est donc une maladie du cartilage

Le cartilage

Le cartilage est constitué d’un réseau de fibres de collagène dans lequel sont emprisonnées des protéoglycanes (PG). Le collagène donne sa forme et ses propriétés de tension au cartilage. Les protéoglycanes sont des protéines auxquelles s’attachent des chaînes de sucres un peu spéciaux. Les protéoglycanes ont une charge négative, ce qui leur donne une affinité pour l’eau. Elles contrôlent la déformation du cartilage soumis à une pression (comme quand on compresse une éponge gorgée d’eau).Les protéoglycanes consistent en une épine d’acide hyaluronique, auxquelles s’attachent comme les brins d’une brosse à dents des arêtes de protéines garnies de chaînes de sucres (environ 100 « brins » de chondroïtine sulfate et 60 de kératan sulfate). Ces brins sont appelés aggrécanes. L’acide hyaluronique est constitué de séquences de deux sucres qui se répètent : l’acide glucuronique et la N-acétyl-glucosamine. La chondroïtine sulfate est constituée de séquences répétées de deux autres sucres : acide glucuronique et N-acétyl-galactosamine sulfate. Le kératan sulfate est constitué de séquences répétées d’acide glucuronique et de N-acétyl-glucosamine sulfate.


Pourquoi l'arthrose fait mal

Vous avez mal parce que votre articulation est enflammée en permanence.

L’inflammation est un mécanisme de réaction des tissus lorsqu’ils perçoivent une menace. On a longtemps cru que l’arthrose n’était pas une maladie inflammatoire, au contraire de l’arthrite rhumatoïde. On sait aujourd'hui qe dans l’arthrose, l’articulation est endommagée car elle est soumise aux effets pro-inflammatoires de substances qu’on appelle cytokines. Les principales cytokines impliquées dans l’arthrose sont l’interleukine-1 et le TNF-α.

D’où viennent ces cytokines ?

Elles sont générées par les cellules du cartilage elles-mêmes, ou celles du liquide synovial qui entoure l’articulation. Une fois synthétisées, elles sont à l’origine d’un véritable cercle vicieux, car elles encouragent les chondrocytes à continuer de les fabriquer. C’est ainsi que l’inflammation se perpétue et devient chronique.

Pourquoi des cellules saines du cartilage se mettent-elles à produire ces interleukines pro-inflammatoires qui auront des conséquences si catastrophiques sur l’articulation ?

D’abord parce qu’il existe dans certains cas un terrain génétique qui favorise l’inflammation. Un tel terrain expliquerait au minimum 15 à 20 % des cas d’arthrose après 55 ans. Si votre père ou votre mère souffrait d’arthrose de ce type, vous avez une chance sur deux d’avoir hérité de cette susceptibilité.

Le surpoids est aussi une cause majeure d’arthrose, en particulier d’arthrose du genou, à cause de la pression qui s’exerce sur l’articulation. Des chercheurs ont montré que dans une articulation soumise à une pression excessive, les chondrocytes réagissent en fabriquant les interleukines pro-inflammatoires.

Autre cause d’arthrose : tous les traumatismes petits ou graves, qui peuvent concerner toutes les articulations. Les articulations du doigt et du poignet chez les secrétaires qui travaillent sur clavier, celles de la main ou du coude chez les musiciens, celles du genou et de la colonne vertébrale chez les footballeurs et les rugbymen, etc… En réponse à un traumatisme articulaire, en effet, les chondrocytes synthétisent les fameuses interleukines pro-inflammatoires qui, les années passant, vont entraîner une destruction du cartilage et l’apparition de la douleur.

Les débris articulaires qui apparaissent dès les premières lésions entretiennent aussi l’inflammation, notamment dans le liquide synovial car ils attirent des cellules nettoyeuses qui produisent elles-mêmes des médiateurs inflammatoires. La membrane synoviale s’abîme et s’épaissit.

Tous ces facteurs sont aggravés lorsqu’on est sédentaire et qu’on suit un régime déséquilibré sur le plan des graisses alimentaires. En effet, vous devez savoir que de nombreuses hormones de l’inflammation, qu’on appelle eicosanoïdes, sont produites à partir des graisses alimentaires. Certaines graisses, qu’on appelle oméga-6, donnent naissance à des hormones très inflammatoires. C’est le cas de celles que l’on rencontre majoritairement dans les huiles et margarines de tournesol ou de maïs. D’autres graisses, les oméga-3, ont au contraire des effets anti-inflammatoires et protecteurs du cartilage. C’est le cas des acides gras majoritaires dans les huiles de colza, de noix, de soja, de lin, et des graisses apportées par les noix, les graines de lin, les poissons gras. Si vous utilisez à la maison essentiellement de l’huile de tournesol, et que vous mangez peu de noix et de poissons gras, vous produisez localement des hormones orientées vers l’inflammation qui vont exacerber les troubles articulaires.

Pourquoi votre articulation est raide ?

Votre articulation est raide parce qu’une partie du cartilage, qui lui donne sa souplesse, a été éliminée et que le cartilage restant est abîmé.

Dans une articulation en bonne santé, les mouvements articulaires se font par glissement des surfaces cartilagineuses. Le cartilage permet d’absorber des chocs. Grâce à lui, nous nous déplaçons, nous courons, nous sautons sans effort apparent et sans douleur.

Dans l’arthrose, l’articulation ne remplit plus sa fonction. S’il reste du cartilage, il est fissuré ou rugueux (voir schéma) : sa surface irrégulière gêne le mouvement. Dans les formes sévères, le cartilage a disparu : le mouvement articulaire se fait os contre os.

Comment en est-on arrivé là ?

A nouveau, le responsable, c’est l’inflammation. Le cartilage, on l’a vu, est composé de collagène et de protéoglycanes. Collagène et protéoglycanes sont fabriqués par des cellules spécialisées appelées chondrocytes.

Dans l’arthrose, collagène et protéoglycanes ont en grande partie disparu. Ils ont été littéralement « digérés » par des enzymes activées par l’inflammation. Lorsqu’il est en bonne santé, en effet, le chondrocyte produit naturellement des enzymes appelées métalloprotéinases qui sont chargées de dégrader les grosses molécules du cartilage devenues inutiles ou trop usées. Problème : sous l’effet de l’inflammation, le chondrocyte fabrique beaucoup trop de ces enzymes qui digèrent le cartilage.

Dans le liquide synovial aussi les mêmes mécanismes sont à l’œuvre. Au début de l’arthrose, le liquide synovial est peu enflammé. Mais dans les stades plus avancés, on assiste à une véritable synovite. Conséquences : le cartilage est sérieusement amoindri.

Des enzymes qui digèrent le cartilage

Les principaux enzymes responsables de la dégradation du cartilage sont les métalloprotéinases (MMP) de la matrice. Elles sont sécrétées à la fois par les cellules synoviales et les chondrocytes. Il s’agit de :

- collagénases

- stromélysines

- gélatinases

Normalement, l’activité des MMP est très encadrée pour éviter qu’elles ne se mettent à détruire le cartilage d’une personne en bonne santé. Elles sont notamment soumises à l’influence de substances sécrétées par les cellules synoviales et chondrocytes pour les garder sous contrôle, qu’on appelle inhibiteurs. Mais dans l’arthrose, la synthèse de MMP est augmentée et les inhibiteurs sont submergés.

Normalement, lorsque du cartilage est détruit, les chondrocytes le remplacent. Malheureusement, un chondrocyte enflammé, comme c’est le cas dans l’arthrose, n’est plus capable de synthétiser du cartilage neuf et notamment les précieuses protéoglycanes.

De plus, une partie des chondrocytes a été éliminée. Or les chondrocytes ne se divisent plus après l’adolescence. A l’âge adulte, les chondrocytes éliminés par l’inflammation ne sont plus jamais remplacés. Les chondrocytes restants sont affaiblis ou dégénérés. Ils ne parviennent plus à fabriquer de cartilage ou celui qu’ils fabriquent est de mauvaise qualité.

Plus la maladie avance, moins il y a de cartilage et moins il y a de chondrocytes pour le régénérer.

Le seul moyen de retrouver l’usage de l’articulation, c’est de stopper la destruction du cartilage existant, et si possible amener les chondrocytes à synthétiser à nouveau du cartilage pour remplacer celui qui a disparu. Ceci peut être tenté avec des anti-inflammatoires naturels ou de synthèse, des substances qui entrent dans la formation du cartilage, comme le sulfate de glucosamine (par voie orale) ou l'acide hyaluronique (injections). Les effets à long terme de ces deux dernières substances sont encore débattus.

Pour aller plus loin : Comment j'ai vaincu l'arthrose (lire un extrait ICI  >>).

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