Charcuterie et viande : peut-on encore en manger ?

Par Thierry Souccar - Journaliste et auteur scientifique, directeur de laNutrition.fr Publié le 26/10/2015 Mis à jour le 09/05/2017
Point de vue

Pour l’Organisation mondiale de la santé, les charcuteries sont cancérogènes, et la viande rouge pourrait bien l’être aussi. Quelle attitude adopter ?

Bacon et saucisses ont rejoint la liste des substances susceptibles de provoquer le cancer, aux côtés des cigarettes et de l'amiante, selon un avis qui porte le sceau de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Cette liste est établie par l’IARC (Lyon), une agence intergouvernementale qui dépend de l’OMS. Les conclusions de l'IARC sont basées sur le travail d'un groupe de 22 experts internationaux qui ont examiné des décennies de recherche sur le lien entre viande rouge et viandes transformées respectivement et cancer. Le comité a regardé les études portant sur l’expérimentation animale, les études d’observation sur alimentation et santé humaine, et les mécanismes cellulaires qui pourraient conduire au cancer. Mais la décision du panel d’experts n'a pas été unanime.  

Selon ce comité, 50 grammes supplémentaires de charcuteries (ou de viandes en salaison), soit l’équivalent d’une saucisse ou moins de deux tranches de bacon augmentent le risque de cancer du côlon de 18 pour cent.

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Le comité estime également que la viande rouge est un cancérogène « probable », c’est-à-dire que la force de la preuve apparaît moins consistante que pour les charcuteries, du fait de données plus limitées. Cent grammes de viande rouge supplémentaires par jour augmenteraient le risque de cancer du côlon de 17%.

Les recherches et les débats sur le lien entre consommation de viande (fraîche ou transformée) remontent à plusieurs décennies. Dans La Meilleure Façon de Manger, le guide alimentaire de LaNutrition.fr, nous avons examiné les données scientifiques disponibles, pas seulement sur le cancer, mais aussi les maladies cardiovasculaires. Notre conclusion : ne pas dépasser trois portions par semaine pour rester en-deçà de tout risque.

Le livre La Meilleure Façon de Manger (Lire un extrait ICI  >>)

Quelques conseils concrets

Le problème posé par les charcuteries et viandes traitées en salaison est essentiellement celui de la présence de nitrite (E250) et nitrate (E251), des additifs utilisés pour la conservation des aliments, qui peuvent donner naissance en présence de fer à des composés cancérogènes qu’on appelle nitrosamines. Or charcuteries et viande rouge apportent une variété de fer très biodisponible (trop, diront certains) qui peut conduire à un excès de fer, surtout chez l’homme adulte et la femme ménopausée, deux catégories de la population qui éliminent peu de fer chaque jour. Un excès de fer est associé à un risque accru de certains cancers et de maladie coronarienne.

Là où ça se complique (comme d’habitude), c’est que le risque posé par la consommation de viandes et charcuteries est modulé par le reste du bol alimentaire et par les pratiques culinaires. Par exemple, si la viande est cuite à température élevée, elle apporte alors des substances qui peuvent favoriser les cancers (amines hétérocycliques aromatiques, hydrocarbures aromatiques polycycliques). Mais des cuissons douces, des marinades n’auront pas ces conséquences. Les jus de cuisson sont riches en amines hétérocylciques, donc on s’expose plus si on en consomme.

Enfin, si on prend l’exemple des charcuteries, la formation de nitrosamines est inhibée par la présence dans le même repas de légumes et fruits en quantité (la palme revenant aux fraises), d'ail, d'aliments riches en vitamines C et E, de thé vert. On voit donc que le risque n’est pas le même selon le contenu de son assiette. Voilà entre autres pourquoi La Meilleure Façon de Manger recommande 4 à 7 portions de légumes frais et 3 à 4 portions de fruits frais par jour.   

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