Le soja augmente-t-il le risque d'infarctus ?

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 22/02/2016 Mis à jour le 10/03/2017
Le soja est soupçonné de nuire à la santé cardiovasculaire. Que disent les études ?

Le soja est une légumineuse cultivée depuis plus de 9 000 ans qui est consommée sous des formes variées : « lait » (tonyu), farine, huile, sauce, tofu, miso… Le soja est une bonne source de protéines végétales et contient également des isoflavones (génistéine et daidzéine), appelées communément « phytoestrogènes », qui se comportent en fait comme des modulateurs des récepteurs aux estrogènes. Le soja est accusé par certains de favoriser les maladies cardiovasculaires via des mécanismes de thrombose. Qu'en est-il vraiment ?

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Le soja augmente-t-il le risque d'infarctus ?

En 1999, les autorités de santé américaines ont accordé une allégation santé aux protéines de soja, censées réduire le risque coronarien. Les études montrent en effet, que consommer 25 g de protéines de soja par jour en remplacement des protéines animales permet de diminuer le taux de lipides sanguins. Cependant, comme l'a montré le Dr Michel de Lorgeril (CNRS) la simple diminution du cholestérol ne permet pas de conclure à une diminution du risque coronarien. Les études épidémiologiques ont donné des résultats contrastés. Plusieurs études, conduites dans des pays occidentaux ou asiatiques, ont conclu qu'une consommation élevée de soja était associée à un risque coronarien plus faible, notamment chez les femmes, mais d'autres études ont au contraire trouvé que le risque de maladie coronarienne augmente avec la consommation de soja.   

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Une étude parue dans l’American Journal of Clinical Nutrition montre que des suppléments à base de soja réduiraient le risque cardiovasculaire pour les personnes capables de produire de l’équol, un métabolite de la daidzéine -une des isoflavones du soja- qui apparait sous l’effet de la flore intestinale en fonction de sa composition.

Les individus ont des capacités différentes à produire de l’équol, un composé qui aurait des effets bénéfiques sur la santé de la prostate, celle des os ou du cœur et qui pourrait aider à atténuer les symptômes de la ménopause. L’équol est produit dans l’intestin par des bactéries mais seulement 30 à 50% des personnes auraient les bactéries intestinales nécessaires pour le produire.

Dans cet essai clinique, 14 personnes produisant de l’équol et 14 personnes n’en produisant pas ont reçu soit une supplémentation en isoflavones soit un placebo. Leur rigidité artérielle a été mesurée au début de l’étude puis après 6 et 24 heures. Les résultats de cet essai clinique montrent qu’une supplémentation en isoflavones chez des personnes capables de produire de l’équol est associée à une diminution de la rigidité artérielle, ce qui pourrait correspondre à une diminution de 11-12% du risque cardiovasculaire. Cependant, une supplémentation en équol chez des personnes qui n’en produisent pas ne donne pas les mêmes résultats sur le risque cardiovasculaire même si les niveaux plasmatiques en équol augmentent après la supplémentation.

Ces données suggèrent que la capacité de production de l’équol est nécessaire pour bénéficier des avantages vasculaires du soja. Il semblerait que la proportion de personnes produisant de l’équol est plus élevée chez les Asiatiques que chez les Occidentaux. Cela pourrait expliquer en partie les résultats parfois contradictoires trouvés dans les études. 

Conclusion : si l'on considère l'ensemble des études, le soja n'augmente probablement pas le risque cardiovasculaire, et pourrait le réduire. Mais les bénéfices à en attendre paraissent limités.

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Sources

Hazim S, Curtis PJ, Schär MY, Ostertag LM, Kay CD, Minihane AM, Cassidy A. Acute benefits of the microbial-derived isoflavone metabolite equol on arterial stiffness in men prospectively recruited according to equol producer phenotype: a double-blind randomized controlled trial. Am J Clin Nutr. 2016 Feb 3. pii: ajcn125690. [Epub ahead of print]

 

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