Parkinson et pesticides

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 02/05/2006 Mis à jour le 26/10/2017
Les pesticides sont-ils responsables de la maladie de Parkinson ? La recherche s'accélère avec les résultats de plusieurs études récentes qui mettent en cause des molécules très utilisées en France et au Canada.Le point sur un dossier qui continue de poser une énigme.

23 avril 2003

La maladie de Parkinson est une maladie neuro-dégénérative qui se manifeste le plus souvent après 60 ans et dont le symptôme majeur est un tremblement au repos. Elle rend aussi l'élocution difficile. On en sait très peu sur les causes de cette maladie chronique, incurable, ni sur les facteurs qui pourraient la prévenir. Dans la maladie de Parkinson, ce sont les neurones des réseaux dopaminergiques qui sont sélectivement détruits, vraisemblablement par un excès de radicaux libres. On a ainsi mis en cause l'excès ou la carence en fer, un taux élevé d'homocystéine, des phénomènes inflammatoires au niveau cérébral. Mais le tabagisme, qui est pourtant une source importante de radicaux libres semble protéger de la maladie de Parkinson, peut-être parce que la nicotine active les réseaux dopaminergiques.

Les risques des pesticides

Malgré ces incertitudes, je voudrais partager avec vous les résultats de plusieurs études qui, depuis deux ans mettent en cause les pesticides dans l'apparition de la maladie de Parkinson. En juin 2001, l'analyse de 14 études conduites sur ce sujet a révélé que les personnes exposées à des pesticides ont deux fois plus de risque que les autres d'être victimes de la maladie de Parkinson. (1) En mars 2003, une équipe de chercheurs de l'université de Victor Segalen (Bordeaux) a trouvé que l'exposition aux pesticides augmenterait aussi bien le risque d'Alzheimer que celui de Parkinson chez les hommes âgés. Pour cette dernière maladie, le risque est multiplié par près de 6, ce qui est considérable pour une étude épidémiologique. (2) Jusqu'ici, nous parlons de personnes qui utilisent des pesticides dans leur travail. Plus inquiétante est la communication faite le 4 avril 2003 par des chercheurs de l'université d'Honolulu (Hawaï) lors de la réunion annuelle de l'Académie américaine de neurologie. Ces scientifiques ont rapporté que les personnes qui mangent 3 fruits et plus par jour ont un risque de Parkinson augmenté de 70 %. Cette étude avait été conçue à l'origine pour explorer un lien étrange, rapporté dans plusieurs études, entre la consommation de vitamine C et le risque de Parkinson. En réalité, ce n'est pas la vitamine C qui est en cause. Elle n'aurait servi que comme marqueur de la consommation de fruits. Là encore, les pesticides sont montrés du doigt.

Les molécules suspectes

Mais de quels pesticides parlent-on ? Des études chez les rongeurs ont clairement impliqué le paraquat et le manèbe. Le paraquat est un herbicide utilisé sur les vignes, les arbres fruitiers et de nombreuses autres cultures. Le manèbe est un fongicide employé dans la culture du blé, de la pomme de terre, de la vigne, des fruitiers, des légumes et même des cultures ornementales (rosiers). Le paraquat est fabriqué par la société suisse Syngenta, une filiale du géant agro-pharmaceutique Zeneca qui, hasard malheureux, vend aux Parkinsoniens un médicament antipsychotique (Serequel). Un autre pesticide récemment mis en cause est la roténone, une substance extraite de plantes toxiques telles que Derris, Lonchocarpus, ou Tephrosia. Elle agit par contact et ingestion sur le système nerveux de presque tous les insectes. La roténone est autorisée en agriculture biologique. On la rencontre aussi dans un grand nombre de produits pour la maison, qu'il s'agisse du jardinage (pucerons, altises, doryphores) ou des insecticides ménagers.

Pas question d'éviter les fruits

Les chercheurs ne croient pas que les pesticides expliquent à eux seuls la maladie de Parkinson. Comme la plupart des maladies neurodégénératives, elle a probablement pour origine un faisceau de facteurs environnementaux et génétiques. Mais les études que je viens d'évoquer doivent nous inciter à la prudence. S'il n'est pas question de manger moins de fruits (l'étude de Honolulu a commencé en 1965, alors qu'on utilisait des molécules plus persistantes qu'aujourd'hui), on les préférera bio (en espérant qu'ils n'ont pas été traités à la roténone !). A la maison, on limitera l'usage d'insecticides ménagers (attention aux diffuseurs dans les chambres d'enfants). Dans le jardin, mêmes règles de prudence pour le traitement des arbres, des légumes, des fleurs. Quant aux agriculteurs, les plus exposés, ils doivent impérativement se protéger avant de manier des pesticides.

(1) Priyadarshi A : Environmental risk factors and Parkinson's disease: a metaanalysis. Environ Res 2001, 86(2):122-127.
(2) Baldi I : Neurodegenrative diseases and exposure to pesticides in the elderly. Am J Epidemiol 2003, 157(5) : 409-414.

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