L’exposition aux pesticides augmente le risque cardiovasculaire

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 21/04/2015 Mis à jour le 10/03/2017
Certains pesticides sont des perturbateurs endocriniens qui augmentent le risque cardiovasculaire et l’inflammation chez des femmes d'âge mûr.

Une nouvelle étude parue dans le Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism rapporte que l’exposition aux pesticides, et pas seulement l’obésité, peut contribuer à augmenter le risque de maladie cardiovasculaire et l’inflammation chez des femmes obèses en pré-ménopause.

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Dans cette étude, les chercheurs se sont plus particulièrement intéressés à l’exposition aux pesticides polychlorés, connus comme des œstrogènes environnementaux car ils peuvent imiter et interférer avec l’hormone œstrogène : on les appelle des xénoestrogènes. Ces perturbateurs endocriniens peuvent impacter la réponse immunitaire et les chercheurs s’intéressent également à eux comme facteurs de risque de l’obésité, la résistance à l’insuline et les maladies cardiovasculaires.

Parmi les œstrogènes environnementaux se trouve le DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), un composé interdit dans de nombreux pays dans les années 70 mais qui est encore très présent dans l’environnement et la chaine alimentaire. Le DDT a été l’un des premiers produits chimiques reconnus comme perturbateurs endocriniens. Les recherches antérieures ont montré que l’exposition au DDT est liée à des anomalies congénitales, une fertilité réduite et une augmentation du risque de diabète de type 2.

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Les œstrogènes environnementaux sont lipophiles, ils s’accumulent dans le tissu adipeux et se déplacent à l’intérieur du corps liés à des lipides.

« La diminution des oestrogènes naturels de l’organisme est un facteur clé dans l’apparition des maladies cardioavsculaires au cours de la ménopause » écrivent les auteurs. « Après la décomposition des œstrogènes environnementaux par l’organsime, les métabolites s’accumulent dans le tissu adipeux des femmes » explique Diana Texeira, une des auteurs de l’étude. « Lorsque des quantités plus élevées de ces œstrogènes environnementaux s’accumulent dans le tissu adipeux, cela peut compromettre l’effet protecteur qu’ont les œstrogènes naturels de l’organisme vis-à-vis de la santé cardiaque des femmes en pré-ménopause ». Les femmes se retrouvent donc avec un risque accru de développer une maladie cardiovasculaire ou de l’inflammation.

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Dans cette étude, les chercheurs ont évalué la quantité de 5 xénoestrogènes dans des échantillons de tissu adipeux et de sang de 121 femmes obèses ayant subi une chirurgie bariatrique. Parmi les participantes, 73 se trouvaient en pré-ménopause et 48 étaient ménopausées. Les chercheurs ont également évalué la glycémie à jeûn et le cholestérol. Ils ont ensuite évalué le risque à 10 ans de développer une maladie cardiovasculaire (Framingham score).

Les résultats montrent que les œstrogènes environnementaux sont omniprésents dans cette population de femmes obèses. Leur répartition et leur concentration varient entre plasma, tissu adipeux viscéral et tissu adipeux sous-cutané. Le modèle d’accumulation est également différent entre les femmes pré-ménopausées et les femmes ménopausées.

Les chercheurs ont trouvé des associations significatives entre les niveaux de xénoestrogènes et les paramètres métaboliques et inflammatoires. Chez les femmes non ménopausées, celles avec les concentrations les plus élevées en œstrogènes environnementaux dans le tissu adipeux viscéral situé au niveau du ventre étaient plus susceptibles d’avoir des niveaux de sucre dans le sang plus élevés. Et parmi ces femmes en pré-ménopause, celles qui avaient des concentrations plus élevées d’œstrogènes environnementaux dans le sang avaient tendance à avoir plus d’inflammation et un risque accru de maladie cardiovasculaire.

« Nos résultats suggèrent que les perturbateurs endocriniens ont tendance à aggraver les complications de l’obésité, notamment l’inflammation et le risque de maladie cardiovasculaire chez les femmes en pré-ménopause ». « Mesurer les taux d’œstrogènes environnementaux peut aider les médecins à identifier les femmes à risque cardiovasculaire et prendre des mesures préventives. »

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Source

Diana Teixeira, Diogo Pestana, Cristina Santos, Luísa Correia-Sá, Cláudia Marques, Sónia Norberto, Manuela Meireles, Ana Faria, Ricardo Silva, Gil Faria, Carla Sá, Paula Freitas, António Taveira-Gomes, Valentina Domingues, Cristina Delerue-Matos, Conceição Calhau, Rosário Monteiro. Inflammatory and Cardiometabolic Risk on Obesity: Role of Environmental Xenoestrogens. The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism, 2015; jc.2014-4136 DOI: 10.1210/jc.2014-4136

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