Michel Lombard:"Rétablir la communication pour retrouver une sexualité épanouie"

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 27/06/2010 Mis à jour le 21/11/2017
Le docteur Michel Lombard est sexologue et président de l’association pluridisciplinaire de recherche et d’étude sur la sexualité. Il reçoit en consultation des hommes, des femmes et des couples qui se plaignent de troubles sexuels et les aide à retrouver une sexualité épanouie notamment en favorisant la communication au sein du couple.

 

De quoi se plaignent les patients qui viennent vous consulter ?

Chez les femmes le motif de consultation le plus fréquent est la baisse de désir sexuel. Certaines consultent également en se plaignant de vaginisme ou d’absence de plaisir mais c’est plus rare. Les hommes viennent souvent pour des problèmes d’éjaculation prématurée ou pour des troubles de l’érection. Depuis quelques années on voit arriver en consultation de plus en plus d’hommes souffrant de « dysérection psychogène » : ils ne présentent aucun trouble anatomique mais la peur de l’échec les conduit à des pannes. Ce sont plutôt des hommes jeunes, âgés de moins de 30 ans qui ont peur des femmes et de ne pas parvenir à satisfaire leurs désirs. Ces dernières sont de plus en plus exigeantes en matière de sexualité et leurs partenaires se mettent à développer une angoisse de la performance : ils ont peur de ne pas « être à la hauteur » et cette peur entraîne des pannes.


Comment abordez-vous ces patients ?

Le traitement repose principalement sur l’entretien qui a pour but de les désangoisser. L’essentiel est de les rassurer. Mais ce qui est primordial dans l’évolution de leurs troubles c’est la relation qu’ils ont avec leur partenaire. Si cette dernière se montre compréhensive l’homme va rapidement reprendre confiance en lui et les troubles de l’érection disparaîtront. En revanche certaines femmes vont avoir tendance à « enfoncer » leurs compagnons dans cette angoisse de la performance. Ce sont des femmes plutôt « dominatrices » qui peuvent détruire l’ego de leur compagnon. Ces derniers sont culpabilisés par l’échec et ce sentiment de ne pas être à la hauteur aggrave encore leurs troubles de l’érection.


Que pouvez-vous faire dans ces cas-là ?

L’idéal est de pouvoir rencontrer les deux partenaires, d’ailleurs près de 30 % des consultations se font en couple. Quand nous voyons en consultation des femmes qui « dénarcissisent » leur compagnon, nous essayons de les aider à rétablir un équilibre au sein de leur couple. On leur explique que pour résoudre leurs problèmes sexuels, les hommes ont besoin qu’elles se montrent compréhensives et encourageantes et surtout pas culpabilisantes.


Cette approche permet-elle de résoudre ces dysérections psychogènes ?

Souvent le simple fait d’en parler avec sa partenaire permet de dédramatiser la situation et de sortir de cette spirale trouble de panne – perte de confiance – panne. Parfois on peut utiliser les médicaments de l’érection à petite dose et pendant une courte période juste pour « relancer la mécanique » : ils voient qu’ils sont tout à fait capables d’avoir une érection et ça les rassure. Ils reprennent confiance et les troubles disparaissent.


Est-ce nécessaire de consulter en couple ?

Il y a des circonstances particulières où je préfère voire les personnes seules mais souvent c’est important de voir les deux personnes du couple ensemble pour mieux cerner leurs problèmes et les aider à les résoudre. On est dans la psychothérapie, certes orientée vers des problèmes liés au sexe, mais où la parole reste prépondérante pour la réussite du traitement. On voit souvent des « vieux » couples dont le désir de l’un ou des deux s’est émoussé au fil des années : le travail, les enfants, la routine sont autant de facteurs qui peuvent finir par « dégrader » la sexualité. On essaye alors d’aider les deux partenaires à retrouver du désir l’un pour l’autre en cassant cette routine. Des fois il suffit de les aider à faire travailler leur imagination pour pimenter un peu une sexualité « plan-plan ». On leur propose de lire ou regarder des choses qui pourraient les aider à booster leur désir. En fait, ce qui compte c’est de trouver le thermostat commun pour que ça fonctionne.


Quelle est la plainte la plus fréquente dans un couple ?

C’est encore souvent un déséquilibre dans le désir : les hommes ont davantage envie de faire l’amour que leurs femmes. De fait, ces dernières trouvent qu’elles sont trop sollicitées et leurs partenaires, eux, s’en trouvent frustrés. Certaines femmes vont même jusqu’à fuir tout contact par peur de rendre leurs conjoint « demandeur ». Dans ce cas, on essaye de rééquilibrer la situation par exemple en suggérant de laisser l’initiative de la sexualité à la femme plutôt qu’à l’homme.

Dans certains cas, plus rares, on est dans la situation inverse : la femme est plus demandeuse et son partenaire n’éprouve pas suffisamment de désir pour répondre à ses attentes. Les hommes sont généralement plus habitués à être demandeurs et le seul fait d’être sollicité par une femme peut les perturber et faire chuter leur désir. Mais dans ce cas comme dans l’autre le but est de retrouver un juste milieu.


Le passage par la sexothérapie résout-il les troubles sexuels des patients ?

La plupart du temps oui. Bien sûr parfois les problèmes relationnels du couple sont plus graves. Quand il y a absence de désir sexuel il faut aussi se poser la question des sentiments. Le manque de désir est il causé par un manque d’amour ? Est-ce que ce couple s’aime encore ? Parfois au fil du temps les amants deviennent des amis. La consultation peut leur faire prendre conscience que l’amour a disparu et il arrive que le couple se sépare.

Un autre problème délicat à résoudre se pose quand des femmes consultent pour des troubles sexuels consécutifs à des traumatismes : viol, attouchement, inceste. Ces femmes sont souvent extrêmement culpabilisées par ce qui leur est arrivé et elles ont besoin d’être rassurées. Le fait de parler peut les aider à se libérer d’un fardeau et être un premier pas vers une sexualité retrouvée. Dans un premier temps, on essaye de les aider à se débarrasser de la culpabilité puis on retravaille le désir. Malheureusement dans certains cas trop lourds, la sexothérapie ne suffit pas et nous adressons les patients vers un psychanalyste.


Conseilleriez-vous à un couple qui a des problèmes sexuels de consulter un sexologue ?

Bien sûr. Beaucoup de troubles sexuels sont d’origine psychologique. Le dialogue est primordial dans ces cas-là. En aidant à rétablir la communication au sein du couple on résout la plupart des problèmes. Ce qui est important c’est de comprendre que nous ne sommes pas là pour juger mais pour répondre à une demande. D’ailleurs souvent les couples repartent satisfaits en disant « si nous avions su, nous serions venus avant. »

 

A lire :

La sexualité, c'est la santé !

Un guide qui vous montre les liens existants entre la sexualité et un véritable équilibre de vie.

Auteurs : Dr M. Lombard, N. Chahine

Oskar éditions

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