Contraception masculine : à quand une pilule ?

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 11/06/2008 Mis à jour le 15/02/2017
L'essentiel

Les Françaises bénéficient depuis 1967 de la pilule contraceptive. Avalé en quelques secondes, ce comprimé représente la liberté sexuelle de la femme qui ne prend plus le risque de tomber enceinte lors de rapports sexuels. Certains hommes en couple aimeraient également s’investir à ce niveau. Ils pourraient prendre le relais si leur femme ne veut plus ou ne peut plus prendre la pilule à cause, par exemple, de contre-indications (tabac, cholestérol…).

 

Comment rendre l'homme infertile ?

La fertilité de l’homme repose sur sa production de spermatozoïdes et sur sa capacité à les mettre en contact avec les ovules lors d’un rapport sexuel. La production des gamètes mâles s’effectue dans les testicules qui se mettent en route à la puberté. A partir de cellules souches, le gamète mâle va mûrir pendant 72 jours avant de devenir un spermatozoïde : c’est la spermatogenèse. Les testicules fabriquent ainsi plusieurs millions de spermatozoïdes par jour. Un sperme d’une concentration supérieure à vingt millions de spermatozoïdes par millilitre est considéré comme fertile.

C’est à cette étape de la spermatogenèse qu’agissent les moyens de contraception hormonaux. Comment ? Grâce à la progestérone, hormone femelle utilisée pour empêcher l’ovulation, qui bloque chez l’homme la spermatogenèse. La progestérone se présente sous forme de comprimés, comme pour les femmes, ce qui rend sa prise facile.

« Certes, la progestérone va arrêter efficacement la production de spermatozoïdes, explique le docteur Sylvain Mimoun, andrologue. Mais, et c’est là le problème, elle va également arrêter les effets androgènes, c’est-à-dire ceux des hormones mâles. Il est donc nécessaire d’apporter de la testostérone pour rétablir l’équilibre. Il faut alors trouver le bon dosage entre l’effet anti- et pro- testostérone ».

L’effet "anti-mâle" de la progestérone est tellement important qu’il pourrait à terme conduire à une stérilité irréversible. Le comprimé de progestérone est donc pris avec une dose de testostérone dite de compensation. « Les androgènes rendent l’utilisation du contraceptif plus confortable, explique Sylvain Mimoun. C’est comme l’œstrogène dans les pilules combinées chez la femme. Les progestatifs, qui bloquent l’ovulation, ont un effet secondaire qui assèche le vagin, l’œstrogène est ajouté à la composition de la pilule pour résoudre ce problème. »

Que disent les études ?

Le journal The Lancet a publié, en avril 2006, les résultats d’une étude qui a comparé l’ensemble des essais portant sur l’efficacité contraceptive du couple progestérone-testostérone chez l’homme. Une trentaine d’essais réalisés entre 1990 et 2005 ont ainsi été rassemblés. Au total, les études ont porté sur 1 500 volontaires.

Le mode d’administration du contraceptif, dans la majorité des essais, était la prise de progestérone par voie orale et celle de testostérone par injection intraveineuse. Les chercheurs ont testé l’effet combiné des deux hormones à différentes doses, l’objectif étant d’amener la concentration en spermatozoïdes sous la barre des 3 millions par millilitre et de réduire les effets secondaires. « Ceux-ci dépendent de la dose d’androgènes, précise le docteur Sylvain Mimoun. Admnistrés à forte dose, les hommes peuvent avoir plus de poils et plus d’acné. Mais ces effets n’ont pas découragé les hommes qui suivaient le traitement et on a réussi à jauger la dose optimale pour diminuer les effets secondaires. »

Résultats : l’efficacité de la contraception hormonale a été évaluée à 97 % voire 100 %, valeurs identiques à celles de la pilule chez la femme.

Le retour à une fertilité normale est un point-clé de la contraception masculine : elle représente la condition sine qua non pour que les hommes acceptent de prendre un contraceptif. 67 % des volontaires retrouvent une production en spermatozoïdes normale en 6 mois, 90 % en 12 mois. Les 10 % restants retrouvent une fertilité normale au plus tard deux ans après l’arrêt de prise du contraceptif.

Obligés d'attendre ?

Des produits à base de testostérone sont déjà sur le marché. Ils peuvent donc être utilisés avec la prise de progestatifs dans le but d’une contraception même si ce n’est pas leur but initial. « Beaucoup d’hommes viennent me voir avec la volonté de prendre le relais de la contraception de leurs femmes, explique l’andrologue. Ils repartent déçus et démotivés quand je leur explique qu’ils devront prendre un comprimé et appliquer un gel ou utiliser un patch ». Une alternative au gel et au patch existe : les injections intraveineuses 1 à 2 fois par semaine mais les hommes en sont encore « moins friands ».

Le véritable progrès en matière de contraception hormonale serait une prise simple du contraceptif, comme la pilule chez la femme. « Ce que je souhaite, dit le docteur Sylvain Mimoun, c’est qu’un laboratoire arrive à mettre en place un comprimé qui réunit l’androgène et le progestatif. Une fois ce comprimé mis sur le marché, on trouvera certainement plus d’hommes motivés pour la contraception ».

 

La vasectomie et le préservatif : des contraceptifs efficaces mais mal aimés

Moins contraignant que la contraception hormonale, la vasectomie et le préservatif ont néanmoins des inconvénients non négligeables…

 

La vasectomie est une solution de contraception quasi-radicale. Elle consiste à couper ou ligaturer les deux canaux qui amènent les spermatozoïdes des testicules vers le pénis. Elle est considérée comme irréversible car même si une re-circulation des spermatozoïdes est possible, elle ne peut jamais être assurée à l'avance par le spécialiste. Ronald Virag, sexologue, explique dans son livre Le sexe de l’homme que « lorsqu’un sujet vasectomisé souhaite retrouver des facultés procréatrices, [on peut procéder] à une "re-canalisation" des conduits, avec des chances de succès d’environ 50 %. Certains chirurgiens font état de 75 % de succès, surtout si la réintervention est effectuée moins de dix ans après la vasectomie initiale ».

Cette opération chirurgicale est généralement réservée aux hommes d’âge mûr qui, comme leurs compagnes, ne veulent pas ou plus avoir d’enfants. Les médecins s’assurent toujours que le patient est conscient du caractère (presque) irréversible de la vasectomie.

 

Le préservatif lui présente le double avantage d’empêcher une grossesse et de protéger contre les maladies sexuellement transmissibles. Utilisé à chaque rapport et mis correctement, il est aussi efficace que la pilule contraceptive chez la femme soit 97 à 100 % d’efficacité. Mais les hommes n’aiment pas trop y avoir recours. Ronald Virag, explique dans son livre que « l’image du préservatif dans l’imaginaire collectif, comme dans toutes les enquêtes réalisées est jusqu’ici toujours négative et contraignante. (…) Prés de la moitié [de ses utilisateurs] considèrent qu’il "diminue le plaisir" et "tue le romantisme" ».

 

 

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