Le stress fait-il vieillir ?

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 03/05/2006 Mis à jour le 21/11/2017
La longévité est-elle une affaire de résistance aux stress, à tous les stress ? Si tel est le cas, la conquête d’un habitat et d’un environnement de plus en plus protecteurs pourrait coûter cher à l’espérance de vie de l’humanité.

Cette théorie a été formulée par Peter Parsons, un chercheur australien de l’université de Brisbane. Selon lui, les animaux qui vivent en liberté et la majorité de nos ancêtres n’ont pu bénéficier de taux de survie optimaux à cause des différents stress physiques auxquels ils étaient soumis, et de leurs interactions avec leurs propres concurrents, mais aussi les prédateurs et les parasites. Les organismes dans ces conditions se battent pour survivre dans un environnement qui ne leur fournit pas les ressources nutritionnelles et énergétiques suffisantes puisque ces stress ont un coût énergétique : après un stress, il faut aux organismes dépenser beaucoup d’énergie pour tenter de retrouver un état stable. Parsons estime que sa théorie recoupe d’autres théories du vieillissement.

D'après  le chercheur les organismes vivants choisissent leurs habitats selon une interaction entre l’intensité du stress, la magnitude des fluctuations environnementales et les ressources énergétiques. Comme l’exposition au stress a un coût énergétique, les habitats les plus favorables devraient se situer là où l’on dépense le minimum d’énergie. Les zones tempérées sont celles dans lesquelles le coût d’adaptation est le plus bas. Ainsi, l’énergie disponible pour la croissance et la reproduction sont théoriquement maximales dans ces environnements.

Parsons reconnaît que la longévité et le métabolisme de base sont étroitement liés. Il en déduit que la longévité doit être maximale chez les organismes qui vivent près de zones tempérées, où le coût énergétique des stress est bas. Cependant cette longévité maximale est menacée par les coûts énergétiques des stress internes et externes auxquels un organisme est normalement exposé.

Parsons pense que si le pivot de la longévité, c’est l’économie des ressources énergétiques, alors la sélection génétique qui favorise la résistance au stress permet de prédire une longévité accrue. En d’autres termes, les évolutions de la longévité peuvent être considérées comme une conséquence d’une sélection génétique en faveur de la résistance au stress.

Chez l’homme, la vitalité et la vigueur déclinent avec l’âge chronologique et finissent par descendre sous un seuil critique, si bien que les individus meurent. Pour Peter Parsons, la vitalité peut être considérée comme une réserve énergétique qui permet de faire face aux défis auxquels sont confrontés les organismes pour retrouver un fonctionnement normal. Il s’agit d’une capacité (ou résilience) à surmonter des stress qui peuvent être variés : accident, infection, traumatisme psychologique. Les porteurs de gènes qui offrent une résistance au stress seraient avantagés de ce point de vue.

Au fur et à mesure que l’on vieillit, les mécanismes homéostatiques qui s’opposent aux effets des stress physiques se détériorent. Par exemple, la température corporelle oscille dans des limites plus larges chez la personne âgée que chez l’enfant, si bien que les accidents cardiovasculaires dus à la chaleur augmentent de manière spectaculaire avec l’âge. L’organisme ne parvient plus à répondre aussi bien aux stress externes, ni à s’adapter à de nouveaux environnements. De tout ceci découle que, pour résister aux stress, il faut disposer d’un niveau élevé d’homéostasie physiologique.

Pour résumer, la survie aux âges avancés est augmentée par la tendance à manifester une homéostasie élevée et une grande vitalité.

Parsons rejoint dans sa théorie du vieillissement celle qui intègre le stress oxydant et les radicaux libres comme l’un des moteurs du vieillissement humain. De très nombreux exemples tirés des expériences chez l’animal prouvent que les individus qui approchent l’espérance de vie maximale ont un métabolisme qui minimise les effets du stress oxydant. Ainsi, la restriction calorique exerce un effet anti-âge puisqu’elle diminue le stress oxydant. A l’inverse, une alimentation trop riche en calories est néfaste à la longévité. Chez les animaux qui vivent en liberté, le stress alimentaire est la norme, si bien qu’un excès de nourriture est désavantageux puisque les animaux disposent de capacités métaboliques appropriées à leur habitat. De ce point de vue, l’homme peut être considéré comme un animal adapté aux conditions de vie de l’âge de pierre si bien que dans le contexte actuel, l’alimentation moderne est stressante de multiples façons.

Peter Parsons identifie trois conditions nécessaires pour augmenter la part de ceux qui se rapprocheront de l’âge le plus avancé possible :

  1. Se nourrir de manière adéquate mais sans excès

  2. Habiter une région tempérée pour minimiser les coûts métaboliques

  3. Posséder des gènes qui permettent de résister aux stress (vitalité, résilience)

Les conditions 1 et 2 sont remplies par un nombre croissant de personnes. La condition 3 suppose, qu’à long terme, l’humanité soit normalement exposée aux environnements stressants qui caractérisent la vie à l’état naturel. Cependant, les conditions 1 et 2 sont d’une certaine manière incompatibles avec la condition 3. En d’autres termes, l’homme moderne connaît une augmentation de la longévité qui est due à une meilleure alimentation, et au fait qu’il est protégé, par son habitat, des excès environnementaux (y compris maladies), mais la conséquence de tout cela, c’est que la sélection naturelle des individus les plus résistants au stress diminue. Ainsi, des personnes relativement sensibles au stress connaissent une longévité accrue, les mêmes individus qui dans un environnement de chasseurs-cueilleurs seraient mal équipés pour survivre. Au final, la vitalité et l’homéostasie nécessaires pour atteindre un âge très avancé pourraient être réduites par ce processus.

Parsons en conclut que l’objectif d’une vie toujours plus longue, d’une espérance de vie aux limites toujours repoussées pourrait être un rêve hors de portée de l’humanité. Il suffirait en particulier que l’humanité soit brusquement confrontée à un environnement dégradé (changement climatique, menace microbienne ou virale…) donc plus stressant pour que les gains passés disparaissent.

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