L’intolérance au gluten : cause d’infertilité chez les femmes ?

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 30/07/2014 Mis à jour le 10/03/2017
L’intolérance au gluten augmente de 39% le risque de fausse couche et permet d’expliquer des troubles de la reproduction chez des femmes non diagnostiquées au préalable.

L’intolérance au gluten ou maladie cœliaque toucherait 1% de la population. Des études ont montré que les femmes souffrant d’intolérance au gluten avaient un risque plus élevé d’être confrontées à des difficultés de procréation. Dans cette nouvelle étude parue dans la revue Human Reproduction Update, les auteurs ont effectué une analyse des études épidémiologiques réalisées sur l’association entre les deux évènements. Ils rapportent que les patientes ayant des problèmes de reproduction ont un risque plus élevé d'être diagnostiquées intolérantes au gluten que la population générale. Inversement, les patientes déjà diagnostiquées pour intolérance au gluten ont un risque plus élevé de fausses couches, retard de croissance intra-utérin et naissance prématurée.

La maladie cœliaque ou intolérance au gluten est une maladie digestive caractérisée par une intolérance à une ou plusieurs fractions protéiques du gluten. Elle provoque une destruction des villosités de l’intestin grêle (l'intestin devient donc perméable et des molécules insuffisamment digérées peuvent se retrouver dans le sang) et se manifeste le plus souvent par des symptômes digestifs. Le seul traitement est un régime alimentaire strict sans gluten à vie.

En raison de l’hétérogénéité des symptômes, beaucoup de cas de maladie cœliaque ne sont pas diagnostiqués ce qui peut entraîner des complications à long terme. Parmi les symptômes « atypiques » se trouvent les troubles de la fertilité (ménopause précoce, infertilité, complications lors de la grossesse…).

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Dans cette étude, les auteurs ont fait une analyse des articles scientifiques disponibles et ont étudié l’impact de la maladie cœliaque sur les troubles de la fertilité mais également l’incidence de la maladie cœliaque (chez des patientes non diagnostiquées) dans des populations de femmes ayant un passif de troubles obstétriques.

24 articles ont été conservés pour l’analyse. Les résultats montrent que, par rapport à la population générale, le risque de diagnostiquer une maladie cœliaque est environ 5 fois plus élevé chez les patientes souffrant d’infertilité inexpliquée, près de 6 fois plus élevé chez celles ayant connu des fausses couches à répétition et 8 fois plus élevé chez les femmes avec des expériences de retard de croissance intra-utérin.

Chez les femmes déjà diagnostiquées intolérantes au gluten, les risques de fausse couche, de retard de croissance intra-utérin, de faible poids de naissance et de naissance prématurée sont respectivement augmentés de 39%, 54%, 75% et 37% par rapport à la population générale. Les risques sont fortement diminués par l’adoption d’un régime sans gluten.

Des hypothèses ont été proposées pour expliquer les troubles de la reproduction chez les patientes intolérantes au gluten. Elles sont basées soit sur des carences nutritives, soit sur des mécanismes d’autoimmunité.

La structure anormale des villosités de l’intestin grêle, caractéristique de la maladie cœliaque, provoque une malabsorption et peut conduire à des anomalies hématologiques mineures, de l’anémie et des carences nutritives notamment en zinc, sélénium et acide folique qui jouent des rôles importants dans le déroulement de la grossesse et le développement du fœtus. Mais cette hypothèse ne peut expliquer à elle seule les troubles de la reproduction chez les femmes intolérantes au gluten.

Il se peut également, que chez les femmes souffrant de maladie cœliaque, le système immunitaire joue un rôle central dans l’apparition des complications lors de la grossesse notamment en raison d’une détérioration des processus physiologiques qui surviennent pendant l’implantation de l’embryon et le développement du placenta. C’est l’exposition au gluten qui provoque des réponses immunitaires susceptibles d’être à l’origine des troubles de la reproduction.

Les auteurs suggèrent que les médecins envisagent plus systématiquement une possible intolérance au gluten chez des femmes présentant une infertilité inexpliquée ou des fausses couches à répétition. Les femmes déjà diagnostiquées doivent, quant à elles, suivre un régime sans gluten strict pour diminuer les risques.

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Source

Tersigni C, Castellani R, de Waure C, Fattorossi A, De Spirito M, Gasbarrini A, Scambia G, Di Simone N. Celiac disease and reproductive disorders: meta-analysis of epidemiologic associations and potential pathogenic mechanisms. Hum Reprod Update. 2014 Jul;20(4):582-593. Epub 2014 Mar 11.

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