Sauter le petit déjeuner pour maigrir ?

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 27/03/2006 Mis à jour le 21/11/2017

Pour mincir et vieillir en bonne santé, faut-il manger moins souvent ? C’est ce que des chercheurs américains viennent de proposer. En sacrifiant une institution : le petit déjeuner!

Le régime des deux repas

Pendant des années, Sylvie, une sage-femme d’Evry, a pris consciencieusement un petit déjeuner copieux, suivi d’un déjeuner, d’un goûter et d’un repas léger. « Pour rester mince, m’avait assuré un médecin de l’hôpital où je travaille, il ne faut pas sauter le petit déjeuner ; ensuite, il est préférable de faire plusieurs petits repas. » Mais il y a deux ans, approchant la cinquantaine, Sylvie a réalisé que cette stratégie donnait moins de résultats. « J’ai opté pour un petit déjeuner léger, et j’ai supprimé le goûter. Je ne fais donc quasiment plus que deux repas par jour. Au début, c’est un peu dur, mais maintenant, j’ai l’impression d’avoir plus d’énergie, et surtout je ne prends plus un gramme ! »

À première vue, la plupart des études scientifiques donnent tort à Sylvie. Elles suggèrent qu’il est préférable de faire plusieurs repas par jour pour rester mince et en bonne santé. C’est notamment la conclusion d’une étude française récente sur 330 hommes (1). Moins ils faisaient de repas quotidiens, plus leur tour de taille était imposant. Même constat dressé par une équipe de l’Université du Massachusetts après avoir comparé les personnes qui mangent moins de trois fois par jour et celles qui passent à table plus de quatre fois (2). Enfin, une étude américaine sur le petit déjeuner indique que les personnes qui sautent ce repas ont un risque plus élevé d’obésité (3).

Manger moins souvent, sauter des repas, un aller simple pour l’obésité ? Pas sûr. Une étude épidémiologique ne rapporte qu’une association – en l’occurrence entre le nombre de repas et l’indice de masse corporelle. Elle ne permet pas d’établir un lien de causalité entre les deux. En réalité, si les personnes qui sautent des repas sont plus grosses, c’est peut-être tout simplement… parce qu’elles ont déjà des kilos à perdre !

 

 

Snacking = danger !

Dans tous les pays, le développement de la consommation hors repas s’est accompagné d’une augmentation de l’obésité : en 1995, 23,6 % des Français avouaient plus de 6 prises alimentaires par jour (jusqu’à 15). Ils étaient 40,2 % deux ans plus tard. Comme aux États-Unis, les goûters les plus populaires sont aussi les plus douteux pour la santé : gâteaux, barres chocolatées, sodas, chips en tout genre.

 

Moins je fais de repas, moins je consomme de calories

Toutes les études sont au moins d’accord sur un point : les personnes qui sautent un repas - petit déjeuner par exemple – ne compensent pas en mangeant plus aux autres repas. Au total, elles avalent moins de calories dans la journée. Il n’y a donc aucune raison qu’elles grossissent. Après avoir suivi 14 666 personnes âgées de 45 à 75 ans, le Dr Silver Titan (Université de Cambridge) en a eu la confirmation : il a trouvé que les « sauteurs de repas » ne sont en réalité pas plus gros que les autres (4). Ce type de constat conduit aujourd’hui des chercheurs à plaider pour une limitation du nombre des repas chez l’adulte : trois et même beaucoup moins, comme le propose Mark Mattson (Institut national du vieillissement, Baltimore). Pour les enfants et les adolescents, en revanche, l’intérêt du petit déjeuner n’est pas remis en cause.


Un seul repas par jour à l’étude

Mark Mattson est l’un des meilleurs spécialistes mondiaux de la biologie du vieillissement. Son équipe a montré récemment que les singes rhésus qui mangent un peu moins chaque jour vieillissent plus lentement que ceux qui s’alimentent normalement. Depuis septembre 2004, Mark Mattson supervise une étude de 6 mois sur vingt volontaires adultes. Ils prendront soit trois repas par jour, soit un seul repas quotidien le soir, sachant que le nombre de calories consommé ne variera pas. Cette expérience durera six mois et les volontaires subiront des analyses sanguines et des tests psychotechniques. On saura donc d’ici un an si, en réduisant comme Sylvie la fréquence de ses repas, on peut perdre durablement du poids et freiner le vieillissement général. Mark Mattson est déjà persuadé que l’on mange trop, et trop souvent. Lui-même ne prend plus de petit déjeuner depuis bien longtemps. Et il invite les adultes, notamment les plus de 40 ans, à l’imiter : « Les personnes qui ne font qu’un ou deux repas éprouvent une sensation de faim pendant les premières semaines, dit-il. Après, elles se sentent incroyablement bien et pleines d’énergie. » Résultats à suivre sur LaNutrition.fr.

 

Bibliographie

(1) Ruidavets JB : eating frequency and body fatness in middle-aged. Int J Obes Relat Metab Disord. 2002; 26 (11): 1476-83.

(2) Ma Y: Association between eating patterns and obesity in free-living US adult population. Am J Epidemiol. 2003; 158 (1): 85-92.

(3) Cho S: The effect of breakfast type on total daily energy intake and body mass index: results from the third national health and nutrition examination survey (NHANES III). J Am Coll Nutri 2003. 22 (4) : 296-302.

(4) Titan SM: Frequency of eating and concentrations of serum cholesterol in the Norfolk population of the European prospective inverstigation into cancer (EPIC-Norfolk): cross sectional study.

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