Des résidus de médicaments dans un quart des prélèvements d’eau potable

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 11/02/2011 Mis à jour le 06/02/2017
1 à 4 molécules retrouvées dans un quart des prélèvementsLes plus fréquentes sont un anxiolytique et un anti-épileptique

Le ministère de la santé vient de dresser un bilan de la présence de résidus de médicaments dans les eaux destinées à la consommation humaine. Ce bilan fait suite à une campagne nationale de mesures de 45 substances pharmaceutiques d’origine humaine, vétérinaire ou de leurs produits de dégradation qui a été lancée en septembre 2009 et pris fin en juin dernier. Les principales classes pharmacologiques de médicaments y sont représentées. Les sites de prélèvements couvraient près d’un quart de la population en France métropolitaine et dans les DOM et tous les départements. Les prélèvements ont été effectués sur des ressources utilisées pour la production d’eau destinée à la consommation humaine (eau de surface et eau souterraine) et sur des eaux traitées, en sortie de station.

Des médicaments dans un quart des prélèvements

S’agissant des eaux brutes, environ 285 échantillons ont été analysés, 2/3 des échantillons étant des eaux d’origine souterraine et 1/3 des eaux d’origine superficielle. Les eaux traitées correspondant à ces eaux brutes représentent en termes de débit d’eaux distribuées 24% de la population de l’ensemble du territoire national. Pour environ 75% des échantillons d’eau traitée qu’elles soient d’origine souterraine ou superficielle, aucune de ces 45 molécules n’a été quantifiée (hors caféine).

Pour les 25% d’échantillons positifs, les analyses révèlent généralement la présence simultanée d’une à quatre molécules.

Parmi les 45 molécules recherchées, 26 n’ont jamais été retrouvées. Dix-neuf ont été détectées au moins 1 fois, parmi lesquelles 5 étaient présentes à des concentrations trop faibles pour pouvoir être quantifiées.

Hormis la caféine, les molécules les plus fréquemment retrouvées sont la carbamazépine (un anti-épileptique vendu sous le nom de Tégrétol) et son principal métabolite9 ainsi que l’oxazépam (anxiolytique) qui est à la fois une molécule mère (vendue sous le nom de Séresta) et un métabolite de benzodiazépines.

Plus de 90% des échantillons présentent une concentration maximale cumulée inférieure à 25 ng/L et moins de 5% des échantillons présentent une concentration maximale cumulée supérieure à 100 ng/L.

Dans les eaux brutes, on retrouve les trois mêmes molécules principales. Toutefois, un plus grand nombre de substances a pu être identifié à des concentrations parfois plus fortes que dans les eaux traitées. La valeur maximale retrouvée n’excède pas 450 ng/L et ne concerne qu’une seule substance. La comparaison eaux brutes/eaux traitées pourrait illustrer l’efficacité des filières de traitement.

Les résultats de cette étude ont également montré que la carbamazépine pourrait constituer une molécule « témoin » attestant de la présence et de la persistance de médicaments dans l’eau.

Des risques encore mal connus

L’Anses et l’Afssaps ont été saisies par la Direction générale de la santé afin de réaliser l’évaluation des risques sanitaires liés à la présence de résidus de médicaments dans les eaux destinées à la consommation humaine.

L’objectif de cette évaluation des risques est d’estimer la pertinence d’intégrer ou non certaines molécules dans le contrôle sanitaire des eaux. L’évaluation des risques sanitaires est particulièrement complexe, notamment en raison des faibles concentrations rencontrées et des effets biologiques variables. Les concentrations trouvées dans les eaux traitées sont 1 000 à 1 million de fois inférieures aux doses utilisées dans le cadre des doses thérapeutiques.

L’Anses et l’Afssaps travaillent à la définition d’une méthodologie générale pour l’évaluation de ces risques. Un premier volet relatif à l’évaluation de l’exposition hydrique a été publié en juin 2010. Les travaux sur la méthodologie globale se poursuivent et leur application est testée sur la carbamazépine, substance la plus fréquemment retrouvée. Une fois la méthodologie générale d’évaluation des risques consolidée, l’évaluation se poursuivra pour certaines molécules-type, quantifiées dans l’eau au cours de cette campagne, utilisées en médecine humaine et/ou vétérinaire.

Le plan de maîtrise des résidus de médicaments constitue la suite des travaux du Plan national santé environnement 2004-2008 (PNSE1) et s’inscrit dans le PNSE 2 (2009-2013) parmi les risques émergents et, à un moindre degré, parmi les contaminants de l’eau. En effet, à ce titre, viennent en premier lieu les substances dangereuses connues, en particulier les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques), les nitrates, les pesticides afin d’en limiter les apports dans le milieu aquatique et les sous-produits de désinfection dans la maîtrise de la qualité de l’eau distribuée.

Dans ce contexte, un plan interministériel d'actions sur les résidus de médicaments dans les eaux, co-piloté par les ministères chargés de l'environnement et de la santé, structurera la recherche dans ce domaine. Ce plan vise, à titre préventif, à améliorer la réduction des rejets dans l’environnement. La publication du plan d’actions est prévue pour le 1er trimestre 2011.

 

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