L'INRA démontre qu'une agriculture sans herbicide est possible

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 01/10/2012 Mis à jour le 10/03/2017
L'INRA vient de démontrer qu'une agriculture sans herbicide est possible.

L'Institut National de recherche Agronomique (INRA) a démarré une vaste étude en 2000 sur le site d'Epoisses près de Dijon avec comme objectif de déterminer s'il est possible de cultiver à grande échelle nos céréales communes en utilisant peu ou pas d'herbicides chimiques.

Les herbicides sont destinés à lutter contre les mauvaises herbes, c'est-à-dire les plantes sauvages qui poussent dans les mêmes conditions que les plantes semées. Notre mode de culture favorise donc de manière involontaire le développement de ces plantes qui nuisent aux cultures. Le développement massif des mauvaises herbes est principalement lié à leur capacité de reproduction : en effet celles-ci peuvent produire des graines en quantité largement supérieure aux plantes cultivées (jusqu'à 500 fois plus) qui vont s'accumuler dans le sol pour finir par étouffer la plante cultivée, par compétition. Avant l'utilisation massive des herbicides les agriculteurs utilisaient principalement deux techniques : le désherbage manuel et la rotation des cultures. Ces rotations perturbent le cycle végétatif des mauvaises herbes et gênent leur prolifération, mais pas complètement.

Sur le site d'Epoisses, les chercheurs de l'INRA ont testé plusieurs modèles de champs avec pour objectifs respectifs une diminution de l'utilisation des herbicides de - 50%, - 70% et - 100%. Pour cela ils ont eu recours à deux techniques : le désherbage mécanique d'une part (bineuse, herses-étrilles, etc.) et une nouvelle rotation des cultures visant à enrayer la prolifération des mauvaises herbes. Traditionnellement une des rotations les plus courantes en Bourgogne est la triade "blé, orge, colza" mais les chercheurs ont utilisé des rotations plus complexes basées sur la succession "orge, tournesol, soja, maïs, sorgho, lupin, luzerne". Cette technique a permis de réduire l'utilisation d'herbicides de 70% et de diminuer le recours aux pesticides et fertilisants car la luzerne, en plus d'étouffer les chardons, nourrit le sol en matières organiques. Malgré tout, cette méthode de culture diminue légèrement le rendement mais selon les chercheurs cette diminution est compensée par la diminution des coûts.

En 2012 l'expérience est toujours un franc succès mais pose quelques problèmes économiques : avec une culture de luzerne nécessaire pendant 3 ans, comment rendre cette culture intéressante pour l'agriculteur ? Pour Nicolas Munier-Jolain, agronome à l'INRA, c'est le système économique qui doit être repensé pour valoriser ces cultures car la luzerne se vend aux éleveurs. Un bon moyen de diminuer la consommation de tourteaux de soja. Le chercheur conclut : « Il est techniquement possible de cultiver à grande échelle nos céréales sans herbicides, ou du moins en réduisant drastiquement leur usage, avec une faible diminution des rendements à l’hectare. »

Les explications de Nicolas Munier-Jolain en vidéo :

Références

Violaine Deytieux, Thomas Nemecek, Ruth Freiermuth Knuchel, Gérard Gaillard, Nicolas M. Munier-Jolain, Is Integrated Weed Management efficient for reducing environmental impacts of cropping systems? A case study based on life cycle assessment, European Journal of Agronomy, Volume 36, Issue 1, January 2012, Pages 55-65, ISSN 1161-0301, 10.1016/j.eja.2011.08.004.

http://www.inra.fr/presse/10_ans_essais_epoisse

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