Le bain de forêt, nouvel anti-stress

Par Marie-Céline Ray - Journaliste scientifique Publié le 21/06/2016 Mis à jour le 07/10/2022
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Promenades en forêt et en campagne, contact avec les arbres... La science le confirme : la nature apaise et rend plus fort.

Un bain de forêt, ça vous dit ? Cette "sylvothérapie" ou thérapie par la forêt consiste à s’immerger dans un environnement forestier et à utiliser ses sens (sentir les odeurs de sous-bois, palper la texture des arbres, écouter le bruit du vent…).  Les bains de forêt permettent aussi de se déconnecter des outils numériques.

Ces thérapies s'appuient sur les résultats de nombreuses études qui montrent que le contact avec la nature favorise la santé physique et mentale. Or la majorité de la population dans le monde vit en zone urbaine. Pourtant, le fait de passer du temps en pleine nature protégerait de différentes pathologies.

Voici quelques résultats récents sur les bénéfices de la nature sur la santé.

Une promenade dans la nature pour moins ruminer

La rumination consiste à se concentrer sur les aspects négatifs de sa vie, leurs causes et leurs conséquences ; la rumination prédit l’arrivée d’épisodes dépressifs mais aussi de désordres mentaux. Dans une étude de l’université Stanford datant de 2015, les auteurs sont partis du constat que l’urbanisation est associée à des niveaux plus élevés de maladie mentale, dont la dépression. Ils ont recruté 38 personnes en bonne santé qui ont marché pendant 90 min : 19 dans un environnement naturel (un espace vert avec des chênes et des buissons près de l’université) et 19 dans un environnement urbain (dans une rue avec du trafic automobile).

Résultats : le fait de marcher dans la nature réduisait la rumination et le flux sanguin dans une aire du cerveau qui est généralement associée avec la rumination (le cortex préfrontal subgénual). La marche en ville n’avait pas cet effet. D’autres études montrent que les adultes qui marchent régulièrement dans des espaces verts ont une meilleure concentration et souffrent moins de dépression. Ces résultats devraient inciter les décideurs à introduire plus d’espaces verts dans les villes.

Pour Emmanuel Duquoc, auteur de Les 3 émotions qui guérissent, une promenade dans la nature peut aussi aider à calmer sa colère : "Partir de son côté est également une voie efficace, surtout si l’on marche à pied ou que l’on court dans la nature, le mouvement et la contemplation de la nature ayant par eux-mêmes un effet apaisant. Plus l’activité demande d’attention, plus elle implique le corps, plus elle sera efficace. Faire ses courses ou manger par exemple ne sont pas des méthodes aussi efficaces car il est possible de ressasser tout en les pratiquant."

Une promenade dans la nature agit sur l'amygdale du cerveau

Mais comment expliquer l'effet de la nature sur notre santé mentale ? Pour le savoir, des chercheurs de l’Institut Max Planck se sont intéressés à une région du cerveau impliquée dans le traitement du stress : l’amygdale. L'amygdale est moins activée pendant le stress chez les personnes qui vivent dans les zones rurales, par rapport à celles qui vivent en milieu urbain.

Pour cette expérience, les scientifiques allemands ont examiné l'activité cérébrale de 63 volontaires sains, avant et après une promenade d'une heure dans la forêt de Grunewald ou dans une rue commerçante de Berlin. L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) a révélé que l'activité de l'amygdale diminuait après la marche en forêt, ce qui prouve que le contact avec la nature a des effets bénéfiques sur les régions cérébrales liées au stress. Cette étude montre donc pour la première fois le lien de cause à effet entre une promenade dans la nature et la santé du cerveau.

Pour rassurer les accros à la ville, Simone Kühn, auteure de ces travaux, précise dans un communiqué que l'activité cérébrale après la marche urbaine est restée stable dans ces régions du cerveau « et n'a pas montré d'augmentation, ce qui va à l'encontre d'une opinion répandue selon laquelle l'exposition urbaine provoque un stress supplémentaire. »

Lire : Les sédentaires sont plus anxieux

Les arbres apaisent les enfants également

L'effet anti-stress de la nature s'observe aussi chez les plus jeunes. Partant du constat que les enfants ont souvent des vies stressantes (en raison des conditions de vie de leurs parents, des rapports parfois tendus avec leurs professeurs ou leurs camarades, des contraintes posées par les enseignements...), les auteurs de cette étude ont voulu évaluer l'impact de la présence d'espaces verts dans les cours sur l'ambiance générale de l'école.

Les chercheurs de l’université du Colorado Boulder ont observé des enfants d’une école primaire de Baltimore qui pouvaient évoluer dans une cour de récréation avec des zones boisées. Leur constat : 96 % des enfants (du CP au CM1) choisissent de jouer au milieu des arbres quand ils peuvent le faire. Entre autres activités, les plus jeunes jouent à explorer, tandis que les plus grands organisent des activités coopératives : constructions, recherche d’objets. D’après les enseignants, ceci a un effet particulièrement positif sur l’attention des enfants lorsqu’ils reviennent de récréation.

Les chercheurs ont aussi visité des lycées du Colorado dans lesquels les adolescents pouvaient pratiquer des activités de jardinage. Interrogés par les scientifiques, ces étudiants font à 46 % référence au calme, à la paix, la relaxation pour décrire l'atmosphère de l'école. Pour Louise Chawla, principale auteur de l’étude, l’école est un lieu où il est important de créer un contact avec la nature, notamment en raison du temps que les enfants y passent. Cette relation avec un monde naturel préviendrait le stress.

Lire : Vers une épidémie de myopie par manque d'activités en plein air

La nature, c’est comme un bol de vitamines

Marcher en forêt, admirer le coucher de soleil sur la mer ou profiter de la quiétude d'une prairie... Toutes ces activités auraient un impact positif sur la santé.

Dans un article paru dans Frontiers in Psychology, Ming Kuo a passé en revue des centaines d'études pour savoir comment la nature favorisait la santé. Elle a ainsi identifié 21 voies expliquant l'effet favorable de la nature sur la santé. Parmi ces voies, il y avait par exemple :

  • les phytoncides, des composés volatiles antimicrobiens libérés par les plantes, qui réduisent la pression sanguine et favorisent le fonctionnement immunitaire,
  • les ions négatifs présents dans l'air qui réduisent la dépression (entre autres effets),
  • le micro-organisme Mycobacterium vaccae présent dans la nature et qui favorise le fonctionnement immunitaire,
  • les bruits et paysages naturels qui peuvent réduire l'activité nerveuse sympathique et augmenter l'activité parasympathique,
  • les marches en forêt qui réduisent le niveau de certains facteurs de risque, comme les cytokines inflammatoires et le glucose sanguin élevé,
  • l'effet de la relaxation et la réduction du stress, liés au contact avec la nature...

Elle explique : « La nature n'a pas seulement un ou deux ingrédients actifs. C'est plus comme une multivitamine qui nous fournit toutes sortes de nutriments dont nous avons besoin. C'est ainsi que la nature peut nous protéger de tous ces différents types de maladies - cardiovasculaire, respiratoire, mentale, musculo-squelettique, etc - en même temps ». La plupart des 21 voies identifiées partageaient un dénominateur commun : l'effet bénéfique sur le système immunitaire.

La forêt améliore l'immunité
Une recherche japonaise a montré que le temps passé en forêt réduit les niveaux de l’hormone du stress, le cortisol et améliore l’énergie mentale. Pour Qing Li, un professeur japonais, président de la Japanese Society of Forest Medicine, la thérapie par la forêt est assez proche de l’aromathérapie. En effet, les arbres et les plantes émettent des arômes (les phytoncides) qui stimulent des cellules du système immunitaire : les « natural killer » (cellules NK) qui permettent de lutter contre des maladies.

Références

Bratman GN, Hamilton JP, Hahn KS, Daily GC, Gross JJ. Nature experience reduces rumination and subgenual prefrontal cortex activation. Proc Natl Acad Sci U S A. 2015 Jul 14;112(28):8567-72. doi: 10.1073/pnas.1510459112. Epub 2015 Jun 29.

Sudimac et al. How nature nurtures: Amygdala activity decreases as the result of a one-hour walk in nature. Molecular Psychiatry. 5 septembre 2022.

Li Q, Kobayashi M, Inagaki H, Hirata Y, Li YJ, Hirata K, Shimizu T, Suzuki H, Katsumata M, Wakayama Y, Kawada T, Ohira T, Matsui N, Kagawa T. A day trip to a forest park increases human natural killer activity and the expression of anti-cancer proteins in male subjects. J Biol Regul Homeost Agents. 2010 Apr-Jun;24(2):157-65.

Louise Chawla, Kelly Keena, Illène Pevec, Emily Stanley. Green schoolyards as havens from stress and resources for resilience in childhood and adolescence. Health & Place, 2014; 28: 1 DOI: 10.1016/j.healthplace.2014.03.001

Kuo Ming.How might contact with nature promote human health? Exploring promising mechanisms and a possible central pathway. Frontiers in Psychology. 2015. Volume 6. DOI=10.3389/fpsyg.2015.01093

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