Pour que les gens mangent mieux, c'est l'environnement alimentaire qu'il faut changer

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 26/01/2015 Mis à jour le 10/03/2017
Les conseils nutritionnels ne sont pas suffisants pour changer les habitudes alimentaires et diminuer l’incidence des maladies. La population doit plus facilement avoir accès à des aliments sains dans les commerces et lieux publics.

La lutte contre l’épidémie d’obésité et contre ses conséquences sur la santé est un des défis les plus importants en terme de santé publique et passe par une amélioration de l’alimentation. Dans un article paru dans le Postgraduate Medical Journal, des chercheurs britanniques exposent leur point de vue concernant l’effet sur la santé que pourrait procurer une meilleure alimentation et quelles actions il faudrait mener pour inciter les gens à manger plus sainement. Selon ces chercheurs, conseils et éducation ne sont pas suffisants : il faut changer l’environnement alimentaire, notamment celui du personnel de santé censé donné l'exemple, et faire prendre conscience au grand public qu’une une alimentation saine a un impact fort sur la santé.

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L’alimentation est le dénominateur commun entre les maladies cardiovasculaires, l’obésité, le diabète et certains cancers. L’étude Global Burden of Disease parue dans The Lancet rapporte qu’une mauvaise alimentation serait responsable de plus de maladies que le tabac, l’alcool et l’inactivité réunis.

L’obésité coûte environ 6 milliards de livres par an (8 milliards d’euros) au National Health Service, le système de santé publique au Royaume-Uni. Les coûts directs et indirects du diabète sont estimés à 24 milliards de livres par an et sont susceptibles de doubler d’ici 20 ans.

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Selon les auteurs, il existe des incompréhensions fondamentales entre d’un côté la communauté médicale et le personnel de soins et de l’autre le grand public, non initié. L’achat et la consommation de nourriture se fait souvent de façon automatique. Même si les gens veulent perdre du poids, ils craquent souvent pour la barre chocolatée placée à la caisse.

Les études scientifiques proposent un certain nombre d’objectifs diététiques pour la prévention des maladies cardiovasculaires : augmenter la consommation des aliments sains et diminuer celle des aliments qui le sont moins. Ainsi, l’acide α-linolénique et les acides gras oméga-3 que l’on trouve dans les noix et les poissons gras, les polyphénols dans les fruits, les légumes, l’huile d’olive  permettent d’atténuer thrombose et inflammation.

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Les chercheurs estiment qu’une portion supplémentaire de fruits et légumes par jour ainsi que deux portions de noix par semaine en plus permettraient de réduire de 5,2 millions le nombre de décès par maladies cardiovasculaires dans le monde en seulement une année. Réduire la consommation de boissons sucrées de 15% empêcherait 180 000 personnes de devenir obèses en France comme au au Royaume-Uni. A l’inverse les graisses trans augmentent les marqueurs de l’inflammation en quelques semaines.

Pour les auteurs, « de réels progrès dans la lutte contre l’obésité et les maladies associées à l’alimentation ne seront visibles que lorsque le point essentiel – la nécessité d’un environnement alimentaire plus sain- sera compris ».

Le succès de l’industrie de la malbouffe est lié à la grande disponibilité de ses produits. « Lutter contre l’obésité et les maladies associées à l’alimentation nécessite une action collective, il n’y a pas de solution miracle mais il y a des interventions plus efficaces que d’autres » disent les auteurs. En changeant le contexte, c’est-à-dire l’environnement alimentaire, et en agissant sur les possibilités de choix du consommateur de façon à ce qu’il achète de l’alimentation saine, les impacts sur la santé du consommateur seraient bien meilleurs que ceux obtenus en délivrant uniquement des conseils ou en faisant de l’éducation. « Le choix le plus sain doit devenir le choix le plus simple » explique l’article.

Il faut modifier l’offre alimentaire : les distributeurs dans les lieux publics proposent peu voire pas d’alimentation saine, les hôpitaux qui devraient montrer l’exemple ont également ce genre de distributeur ou leur propre lieu de restauration rapide…selon les auteurs, c’est comme si les établissements de soin légitimaient la consommation de ce genre d’alimentation.

La formation du personnel médical est également essentielle afin qu’il puisse délivrer à leurs patients, notamment ceux à risque, des conseils nutritionnels basés sur les connaissances les plus récentes.

Les auteurs défendent un changement à la source dans lequel il est plus simple de choisir des aliments sains, où l’alimentation saine est envisagée à long terme et pas uniquement pour perdre du poids à un instant donné. Manger des fruits et légumes, faire du sport oui, mais il ne faut pas à côté consommer des produits sucrés sous prétexte que l’on a eu son « quota » d’aliments sains. Les auteurs expliquent qu’il est compliqué de compenser « la malbouffe ».

Ce système ne peut fonctionner que si les médecins, les infirmières et tout le personnel de santé donnent l’exemple et délivrent des informations adéquates pour faire comprendre aux patients et aux consommateurs en général qu’une meilleure santé passe par une alimentation saine.

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Source

Malhotra A, Maruthappu M, Stephenson T. Healthy eating: an NHS priority A sure way to improve health outcomes for NHS staff and the public. Postgrad Med J. 2014 Dec;90(1070):671-2. doi: 10.1136/postgradmedj-2014-133103. Epub 2014 Nov 16.

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