Ultraviolets et cancer : 9 questions

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 07/06/2012 Mis à jour le 10/03/2017
Serait-on en meilleure santé en évitant le soleil et les cabines à bronzer ?

Le soleil et les cabines à bronzer sont l’un et l’autre dans le collimateur des autorités sanitaires, des dermatologues et de l’Académie de médecine. En apparence, les choses sont simples : le rayonnement ultraviolet (UV) est responsable de cancers cutanés. Il faut donc l’éviter, disent les médecins et le ministère : pas de soleil à la mi-journée, pas de bronzage en cabine, crèmes pour tous. L'Académie de médecine veut même interdire la publicité pour les cabines. La réalité est, comme toujours, infiniment plus complexe. D'abord, les autorités sanitaires ont une part de responsabilité dans les risques potentiels liés au bronzage en cabine. Ensuite, les messages alarmistes de l'Académie de médecine (une institution que le monde entier nous envie...) sur les dangers des UV pourraient faire plus de mal que de bien. LaNutrition.fr ouvre le dossier des UV.

Comment bronze-t-on ?

Les ultraviolets (UV) sont des rayons électromagnétiques. On distingue 3 types d’UV selon la fourchette de leur longueur d’onde

  • Les UVC (100 à 280 nm)
  • Les UVB (280 à 320 nm)
  • Les UVA (320 à 400 nm)

Presque tous les UVC et une partie des UVA et des UVB sont bloqués par l’atmosphère. Les UVA et les UVB contribuent au bronzage. Les premiers entraînent un bronzage rapide car ils foncent immédiatement les pigments de la peau. Les seconds un bronzage retardé, le temps pour les mélanocytes de produire  de nouvelles molécules de mélanine dans les jours qui suivent l’exposition.

Comment produit-on de la vitamine D ?

La peau synthétise de la vitamine D au soleil, aux beaux jours seulement, à partir d’un dérivé du cholestérol, le 7-déhydrocholestérol, précurseur immédiat du cholestérol. Un peu de ce déhydrocholestérol (5 à 10%), lorsqu’il est exposé au rayons ultraviolets B, est transformé dans une région profonde de la peau en prévitamine D3. La prévitamine D3 est convertie en vitamine D3.

Quels types d’UV reçoit-on quand on se met au soleil ?

Les UV qui atteignent la Terre sont en moyenne composés à 95 pour cent d’UVA et 5 pour cent d’UVB. Mais cette proportion varie avec le niveau du soleil sur l’horizon : plus il est bas sur l’horizon, moins il y a d’UVB. Pour la France, cela signifie que le ratio UVA/UVB est bas en été, et élevé en hiver. Cela signifie aussi qu’il y a relativement plus d’UVA que d’UVB le matin tôt et l’après-midi qu’entre 11 et 15 heures. Donc, quand on se met sur la plage après 16 heures en suivant les conseils des autorités sanitaires, on reçoit beaucoup d'UVA, et on fait peu de vitamine D. On considère que dès que votre ombre est plus allongée que votre taille réelle, alors vous synthétisez peu de vitamine D.

Les cabines de bronzage délivrent-elles les mêmes UV que le soleil ?

Les premiers appareils de bronzage artificiel émettaient des UV présentant un ratio UVA-UVB semblable à celui du soleil, soit jusqu’à 5% d’UVB. Dans les années 1980, les dermatologues ont  acquis la certitude que l’exposition aux UVB pouvait conduire à des cancers de la peau, et ils ont cru que les UVA n’étaient pas en cause. En plus, comme les UVB brûlent la peau, ils ont obtenu une réglementation qui est entrée en France en application en 1997, au terme de laquelle les appareils délivrent essentiellement des UVA, et très peu d’UVB (moins de 1,5 %). La réduction des émissions d’UVB a permis aux utilisateurs de bronzer plus longtemps sans brûlure, ce qui augmente la probabilité de recevoir une dose supérieure d’UVA par comparaison aux bains de soleil. Pour résumer, on peut dire que les bancs de bronzage délivrent un rayonnement UV dans le spectre que l’on peut rencontrer après 16 ou 17 heures en été, c’est-à-dire beaucoup d’UVA et peu d’UVB. Or on sait aujourd’hui que les UVA sont loin d’être inoffensifs et qu’ils sont eux aussi en cause dans les cancers de la peau. Il faut souligner que les appareils en usage aux Etats-Unis et au Canada émettent des UV plus « physiologiques » ou plus « naturels » puisque le ratio d’UVB y est d’environ 4%.

L’exposition au soleil est-elle en cause dans les cancers de la peau ?

Le rayonnement solaire UV est certainement responsable d’une majorité des cancers de la peau, qu’il s’agisse de carcinome basocellulaire, de carcinome spinocellulaire ou de mélanome. Cependant, cette relation est complexe et elle dépend entre autres de facteurs génétiques et même alimentaires.

Pour le mélanome, on considère que l’exposition intermittente, plutôt que l’exposition solaire totale ou régulière est un facteur de risque. On pense aussi  que l’exposition dans les premières années de la vie augmente le risque de ce cancer. Les coups de soleil seraient aussi un facteur de risque. Il semble que les UVB soient peu en cause dans ce type de cancer, et certaines études montrent même qu’ils pourraient être protecteurs via la synthèse de vitamine D. La consommation de fruits et légumes serait protectrice, de même que les graisses monoinsaturées (huile d’olive).

Pour les autres cancers, l’exposition aux UVB mais aussi aux UVA est un facteur de risque. Dans le cas des UVB, le spectre d’absorption du 7-déhydrocholestérol est le même que le spectre d’absorption de l’ADN (support du code génétique, dont les atteintes peuvent conduire au cancer). On peut donc en déduire que le rayonnement susceptible de permettre la synthèse de vitamine D a aussi le pouvoir de causer des dommages à l’ADN.

Alors faut-il s'exposer au soleil et comment ?

Il faut en effet s'exposer au soleil, mais avec prudence, en particulier lorsqu'on a une peau claire et il faut contrôler l'exposition des enfants sans les couper de la lumière du soleil. Les spécialistes de la vitamine D conseillent aux beaux jours une exposition brève entre 11 h 00 et 15 h 00, qui est la période au cours de laquelle le ratio UVA/UVB est le plus faible, donc la bonne période de synthèse de la vitamine D. Cela se fait visage protégé, en exposant le maximum de surface de peau pendant 10 à 15-20 minutes selon le type de peau et sans aller jusqu'à la rougeur. Il faut ensuite se couvrir ou se tenir à l'ombre le reste de la journée. L'usage des crèmes solaires devrait dans l'idéal être réservé aux expositions "contraintes" (promenade en bateau, travail en extérieur, activité sportive...). Les expositions récréatives de plein soleil (bronzage) sont déconseillées. Il faut s'habituer à porter chapeaux, lunettes, vêtements ou se tenir à l'ombre.

L’usage de cabines bronzantes augmente-t-il le risque de cancer ?

En l’état de la réglementation française, l’usage de ces appareils se traduit par des expositions répétées à des doses élevées d’UVA, qui est un facteur de risque de cancer de la peau et notamment de mélanome. Les études épidémiologiques suggèrent que le risque de mélanome est légèrement augmenté chez les utilisateurs de cabines bronzantes sans qu’il y ait forcément de relation dose-effet. Le risque de carcinome spinocellulaire serait également augmenté. Pour le carcinome basocellulaire, aucune conclusion n’est aujourd’hui possible.

L’usage de cabines bronzantes permet-il de synthétiser de la vitamine D ?

Les études montrent que c’est le cas, en particulier pour les appareils qui délivrent des doses physiologiques d’UVB (appareils non autorisés en France pour le public). Ce serait aussi le cas avec les appareils qui délivrent surtout des UVA : malgré la part faible d’UVB, de la vitamine D serait produite, malheureusement au prix de doses importantes d’UVA, jusqu’à 3 fois plus que nécessaire si l’on compare avec ce qui se passe lors d’une exposition au soleil de midi, en été. Nous ne devrions probablement pas nous exposer à un rayonnement aussi éloigné de la nature.

Hormis le bronzage, ces cabines pourraient-elles avoir un intérêt ?

Parce qu’elles permettent de produire de la vitamine D, les cabines ont, sous certaines conditions, un rôle à jouer dans la promotion de la santé. La vitamine D réduirait le risque de 18 types de cancers au moins, mais aussi de maladies cardiovasculaires, d’infections respiratoires, de maladies auto-immunes. Le ministère de la santé français reproche aux cabines de favoriser les cancers de la peau, mais si ce lien est avéré, ce même ministère en est en partie responsable puisqu’il impose un ratio UVA/UVB excessif. Il faudrait que les pouvoirs publics permettent aux cabines de bronzage de délivrer un ratio « naturel », qui correspond à celui auquel on est exposé en été, entre 11 h 00 et 15 h 00. Dans ce cas de figure, le risque de cancer cutané (faible pour des expositions chroniques et brèves) doit être mis en rapport avec les bénéfices de santé publique liés à une augmentation en hiver des taux de vitamine D, qui peut réduire la mortalité liée à de nombreux cancers internes. Une étude estimait que si la population américaine augmentait, par exposition au rayonnement UV solaire ou artificiel, son taux sérique de vitamine D pour atteindre 40 ng/mL, les décès dus au mélanome pourraient doubler, passant de 9000 à 18000 par an, mais dans le même temps 400 000 décès d’autres causes pourraient être épargnés.

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