Le pouls au repos trahit la sensibilité au stress

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 09/10/2014 Mis à jour le 10/03/2017
La variabilité de la fréquence cardiaque permet d'identifier les personnes les plus sensibles au stress. Celles-ci devraient alors pratiquer la cohérence cardiaque.

Comment prévenir les conséquences négatives du stress ? Un bon début serait d’identifier les personnes qui sont le plus sensibles à ce fléau pour permettre aux médecins d’agir avant que les dégâts physiques et mentaux s’installent. Et d’après une nouvelle étude parue dans la revue Stress, ceci est possible grâce à un outil de diagnostic basé sur la mesure de la variabilité de la fréquence cardiaque –ou arythmie sinusale respiratoire- : les personnes ayant une faible variabilité de la fréquence cardiaque dans des périodes de faible stress sont plus sensibles aux évènements stressants lorsqu’ils se présentent.

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La variabilité de la fréquence cardiaque –régulée par le système nerveux autonome- est un bon indicateur de la capacité à réguler les émotions. La régulation du rythme cardiaque par le système nerveux autonome est influencée par la respiration. L’inspiration produit une accélération du rythme cardiaque et au contraire l’expiration induit un ralentissement du cœur. Ces oscillations rythmiques produites par la respiration sont appelées arythmie sinusale respiratoire (ASR). Les études montrent qu’une plus faible arythmie sinusale respiratoire au repos est associée à une plus grande détresse psychologique. 

C'est sur ces bases qu'a été mise au point la cohérence cardiaque, une pratique respiratoire qui est un excellent outil de management du stress (lire interview du Dr David O'Hare), au point qu'elle est la première préconisation anti-stress de la Fédération de cardiologie pour prévenir infarctus et AVC.

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Nombreux sont les évènements de la vie ou les situations qui peuvent susciter du stress : perte d’un emploi, divorce, difficultés financières, difficultés relationnelles, problème au travail… Au départ, le stress est d’ailleurs un phénomène normal puisque biologiquement parlant, c’est une réaction de l’organisme qui apparait pour faire face à de brusques changements de situation. L’aptitude à s’adapter aux évènements stressants est variable d’une personne à l’autre, les conséquences sur la santé physique ou mentale également. Les conséquences du stress chronique chez les personnes qui y sont le plus sensibles peuvent être sérieuses.

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Toutes les émotions que nous ressentons impliquent certaines parties du cerveau et le système nerveux autonome, lui-même composé du système nerveux sympathique et du système nerveux parasympathique. Lors d’un stress, le système nerveux sympathique permet à l'organisme de se placer en état d'alerte, la fréquence cardiaque augmente. Au contraire le système nerveux parasympathique permet de diminuer l’état d’éveil physiologique et la fréquence cardiaque. C’est la capacité du système nerveux autonome à faire varier la fréquence cardiaque qui détermine la facilité d’une personne à passer d’un état d’alerte à un état calme.

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Dans cette étude, les chercheurs ont suivi 76 étudiants, âgés de 18 à 30 ans, pendant deux périodes : lors des 4 premières semaines de cours du semestre -une période peu stressante- les étudiants ont auto-évalué leur niveau de stress psychologique et leur fréquence cardiaque a été enregistrée au repos pendant un moment de détente, puis pendant deux tâches censées susciter de l’inquiétude. Trois mois plus tard, pendant la période stressante des examens, les étudiants ont à nouveau auto-évalué leur niveau de stress.

Les chercheurs ont découvert que les étudiants qui avaient une variabilité de la fréquence cardiaque moins élevée lorsqu’ils commençaient à s’inquiéter en période de faible stress étaient plus susceptibles d’être très stressés plus tard en période d’examens.

Une plus faible ASR au repos et une plus grande diminution de l’ASR pendant les moments plus inquiétants seraient donc un bon moyen de déterminer les personnes les plus sensibles face aux évènements stressants.

« Au repos une fréquence cardiaque plus variable est une bonne chose. Cela montre que le système nerveux parasympathique est à pied d’œuvre. C’est ce système qui permet de retrouver un état de calme et de conserver l’énergie » dit le Dr Gouin, auteur de l’étude.

Les étudiants qui ont une moins grande variabilité de la fréquence cardiaque s’adaptent moins bien au stress, leur cerveau module moins bien leur réponse émotionnelle. Cette plus faible variabilité de la fréquence cardiaque peut être interprétée comme une moins grande flexibilité du système parasympathique et donc une moins grande adaptabilité au stress.

Les commentaires du Dr David O'Hare, spécialiste de la cohérence cardiaque et auteur de Cohérence Cardiaque 3.6.5 et Maigrir par la cohérence cardiaque (lire un extrait ICI >>)

"L’Arythmie Sinusale Respiratoire est l’une des façons d’évaluer la Variabilité de la Fréquence Cardiaque en mesurant l’impact de la respiration sur la fréquence cardiaque et la suppression du tonus vagal (parasympathique) à l’inspiration. Nous disposons des logiciels d’évaluation et plusieurs méthodes existent.

Cette notion liée au stress est connue depuis 1949 avec les études de Malmo et Shagass qui ont été les premiers à montrer l’impact du stress sur la variabilité cardiaque.

Une faible ARS ou une Variabilité de la Fréquence Cardiaque faible est bien le signe d’une moins grande adaptation et donc d’une tolérance au stress inférieure.

La cohérence cardiaque est un exercice d’entrainement de l’ASR pour l’augmenter en respirant à une fréquence qui est connue comme celle qui donne la plus grande amplitude de l’ASR.

La cohérence cardiaque est bien un exercice de stimulation de l’ASR. Elle permet de s’entrainer en et hors situation de simulation ou d’évocation de stress.

La cohérence cardiaque est l’exploitation de cette Arythmie Sinusale Respiratoire par des exercices spécifiques tendant à la pousser au maximum pendant quelques minutes ce qui l’augmente progressivement. L’amélioration par la Cohérence Cardiaque est observable justement par l’augmentation de l’ASR que nous mesurons avec nos logiciels de biofeedback."

Source

Gouin JP, Deschênes SS, Dugas MJ. Respiratory sinus arrhythmia during worry forecasts stress-related increases in psychological distress. Stress. 2014 Sep;17(5):416-22. doi: 10.3109/10253890.2014.949666.

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