La dépression saisonnière pour sauver lEurope de la crise ?

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 16/12/2011 Mis à jour le 10/03/2017
La dépression annuelle saisonnière pourrait fortement influencer les marchés.

Un peu d'histoire

La crise financière qui frappe la zone euro actuellement a démarré aux Etats-Unis en 2008 avec la crise des "subprimes" (prêts hypothécaires à risque). Une fois les banques sauvées par l'état, la dette se retrouve alors de leur côté. Dès lors, il faut emprunter pour payer la dette, les taux grimpent et l'Europe se trouve dans la situation qu'elle connaît actuellement. Mais si les marchés et les banques avaient eu des comportements moins risqués, cette crise serait-elle là? On se souvient notamment de l'affaire Jérôme Kerviel qui avait fait perdre des milliards d'euros à la Société Générale.

L'étude

Une étude surprenante a montré qu'il existe des variations prévisibles dans la prise de risques financiers sur les marchés. Cette variation suit précisément celle des saisons : en hiver une certaine proportion de traders (mais pas tous) prend beaucoup moins de risques qu'en été. Pour le Pr Lisa Kramer, qui enseigne la finance comportementale à l'université de Toronto au Canada et qui est à l'origine de cette étude, "jusqu'à maintenant nous n'avions jamais été capable de voir un phénomène saisonnier de large ampleur qui influencait les émotions sur les marchés."

Après analyse, les chercheurs constatent que cette variation de comportement est liée à celle de l'humeur : les personnes qui sont atteintes de dépression annuelle saisonnière prennent moins de risques en hiver et retrouvent un comportement identique aux autres en été. Sur cette image la courbe du haut représente la prise de risque chez les personnes atteintes de dépression annuelle saisonnière (plus la courbe s'élève, plus les risques pris sont faibles).
Ces résultats sont cohérents car les mécanismes de la dépression engendrent une inhibition qui peut toucher tous les aspects de la vie et donc diminuer les prises de risques. Lorsque cette inhibition est très importante, on parle alors de dépression majeure.

Soigner la dépression annuelle saisonnière ?

La dépression annuelle saisonnière touche environ 10 % de la population. Néanmoins, les personnes qui ne rentrent pas dans ces critères diagnostics précis peuvent tout de même souffrir de variations de l'humeur notables. Si vous travaillez dans la finance, avant la publication de cette étude, je vous aurais encouragé à prendre soin de votre santé comme n'importe qui mais aujourd'hui je me tâte... peut-être vaut-il mieux que vous restiez un peu déprimé d'ici la fin de la crise !

Pour les autres, voilà ce qu'il faut retenir de la dépression annuelle saisonnière : son étiologie est simple, elle survient par manque de lumière et par baisse du taux de vitamine D dans le sang. Le rôle de la vitamine D dans les troubles de l'humeur est bien documenté (voir nos dossiers). En été la lumière du soleil est intense. Elle pénètre par la rétine et envoie à notre cerveau le signal de stopper la production de mélatonine, une hormone du sommeil. En hiver l'intensité lumineuse baisse, le signal devient trop faible et la production de mélatonine reste élevée même en journée ce qui provoque fatigue, léthargie et déprime. Le traitement est donc simple et repose sur deux stratégies :


D'autres facteurs de la prise de risques financiers

Si les traders sont en très grande majorité des hommes jeunes (environ 28 ans) c'est peut-être par sexisme mais peut-être aussi parce que les hommes sont plus performants que les femmes dans ces domaines. Pourquoi des hommes jeunes ? A 28 ans le taux de testostérone des hommes est élevé. Le taux de testostérone a été associé aux comportements à risque, qu'ils soient financiers (2, 3) ou qu'ils touchent d'autres domaines. Par exemple assurer un véhicule coûte plus cher à un homme qu'à une femme parce que les hommes ont naturellement tendance à prendre plus de risques. ls sont plus enclins à dépasser les limites donc à être impliqués dans plus d'accidents de la route que les femmes. En finance, cela peut se traduire par de meilleurs résultats... ou par plus d'échecs.

La question est ouverte : si les personnalités politiques et les traders étaient tous des femmes légèrement déprimées, comment se porterait notre économie ?

Référence: Lisa A. Kramer. J. Mark Weber. This is Your Portfolio on Winter: Seasonal Affective Disorder and Risk Aversion in Financial Decision Making. Social Psychological and Personality Science. 2011 July 18.

(2): Coren L. Apicella, Anna Dreber, Benjamin Campbell, Peter B. Gray, Moshe Hoffman, Anthony C. Little. Testosterone and financial risk preferences. Evolution and Human Behavior, 2008; DOI: 10.1016.

(3): Coates JM, Herbert J. Endogenous steroids and financial risk taking on a London trading floor. Proc Natl Acad Sci U S A. 2008 Apr 22;105(16):6167-72.

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