COVID-19 : les phages pourraient réduire la mortalité de la maladie

Par Marie-Céline Ray - Journaliste scientifique Publié le 30/06/2020 Mis à jour le 01/07/2020
Actualité

Les phages, qui sont des prédateurs naturels des bactéries, pourraient lutter contre les surinfections bactériennes et aider à la production d'anticorps.

Pourquoi c’est important

Les bactériophages, aussi appelés phages, sont des virus naturellement présents dans l’environnement. Comme leur nom l’indique, ils « mangent des bactéries ». Pour ce faire, un bactériophage qui rencontre sa bactérie cible se fixe sur son enveloppe, injecte son ADN et se multiplie dans la bactérie. Celle-ci explose en libérant des dizaines de bébés phages. Les phages ne s’attaquent ni aux cellules humaines ni aux autres virus. Ils sont donc inoffensifs pour l’homme et ne peuvent pas lutter contre le virus SARS-CoV-2 directement. L’utilisation des phages en médecine s’appelle la phagothérapie. Elle a été inventée il y a 100 ans par Félix d’Hérelle. Bien que cette médecine ait quasiment disparu dans notre pays, elle suscite un regain d’intérêt en raison de son potentiel pour venir à bout d’infections bactériennes résistantes aux antibiotiques.

Lire : Des virus mangeurs de bactéries bientôt à la place des antibiotiques ?

L’épidémie de COVID-19 a causé plus de 500 000 morts dans le monde au 30 juin 2020. Chez les patients infectés par le SARS-CoV-2, le système immunitaire se retrouve très affaibli, ce qui peut favoriser des infections bactériennes qui mettent en danger la survie des patients. Les phages pourraient-ils aider à réduire la mortalité de la maladie ?

Ce que montre l’article

Un article paru dans Phage: Therapy, Applications and Research décrit deux stratégies par lesquelles les phages pourraient améliorer la survie des patients touchés par la maladie COVID-19. L’auteur de cet article est Marcin Wojewodzic, un chercheur du registre du cancer norvégien qui a fait un stage post-doctoral à l’université de Birmingham. D’après lui, il existe deux phénomènes qui conduisent malheureusement au décès des patients : la surinfection bactérienne et le temps que met le système immunitaire à produire des anticorps contre le virus SARS-CoV-2. L’utilisation de phages permettrait de s’atteler à ces deux problèmes.

Tout d’abord, les phages pourraient cibler les infections respiratoires secondaires qui se développent chez les patients. Ces infections bactériennes, qui sont une complication de la maladie COVID-19, compromettent la survie des patients, surtout ceux qui sont âgés.

Dans un communiqué de l’université de Birmingham, le chercheur explique : « En introduisant des bactériophages, il peut être possible de gagner un temps précieux pour le système immunitaire des patients et cela offre également une stratégie différente ou complémentaire aux thérapies antibiotiques standard. »

La seconde stratégie consisterait à utiliser des phages modifiés pour fabriquer des anticorps contre le SARS-CoV-2. Ces anticorps synthétiques seraient alors administrés par voie nasale ou orale aux patients pour qu’ils s’attaquent aux virus : « Si cette stratégie fonctionne, elle devrait, nous l'espérons, gagner du temps pour permettre à un patient de produire ses propres anticorps spécifiques contre le virus du SRAS-CoV-2 et ainsi réduire les dommages causés par une réaction immunologique excessive ».

D’après lui, les phages permettent de produire de manière rapide et peu coûteuse des anticorps recombinants, grâce à la technique du « phage display », une méthode qui a été mise à l’honneur par le prix Nobel de chimie en 2018.

Le phage display permet de sélectionner des anticorps monoclonaux à partir d’une banque. Selon le chercheur, cette technique a déjà été utilisée avec succès contre le virus MERS-CoV, un virus proche du SARS-CoV-2, qui est responsable du syndrome respiratoire du Moyen-Orient.

Il conclut : « Il est clair qu'aucune intervention à elle seule n'éliminera la COVID-19. Afin de progresser, nous devons aborder le problème sous autant d'angles et de disciplines que possible. »

En pratique

Actuellement, les phages ne font plus partie de la pharmacopée française, bien qu’ils étaient inscrits au Vidal jusqu’en 1974. Les phages sont parfois utilisés de manière exceptionnelle dans le cadre d’autorisations spécifiques pour traiter des cas graves. La phagothérapie existe de manière plus répandue dans certains pays de l’Est comme la Géorgie ou la Russie.

Des livres pour aller plus loin : Infections –le traitement de la dernière chance et Immunité naturelle

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