Du lait et des patates : ce cocktail peut faire flamber les cancers

Par Thierry Souccar - Journaliste et auteur scientifique, directeur de laNutrition.fr Publié le 03/06/2015 Mis à jour le 10/03/2017
Point de vue

Les messages de l'industrie agro-alimentaire peuvent nuire à votre santé. Mais ceux de LaNutrition.fr peuvent vous sauver la vie. Illustration avec le cancer de la prostate.

Nous partageons parfois sur notre page Facebook de petites infographies sur le rôle des aliments, qui sont issues du guide d'alimentation familiale rédigé par la rédaction de LaNutrition.fr, La Meilleure Façon de Manger (MFM) (lire un extrait ICI  >>). La semaine dernière, deux internautes (sur plusieurs centaines) nous ont reproché de « faire trop de pub » pour ce livre.

Je ne pense pas qu'on puisse jamais faire "trop de pub" pour un livre qui peut sauver la santé de dizaines de milliers de personnes. Les conseils contenus dans La Meilleure Façon de Manger (MFM) sont basés sur la science, pas sur les lobbies. La MFM met en pièces certains messages de l’industrie agro-alimentaire et corrige quelques-unes des aberrations des conseils nutritionnels officiels. Nous sommes certains que c’est un livre d'une grande importance pour la santé publique.

Laissez-moi en faire l’illustration très concrète. 

L’industrie agro-alimentaire et les pouvoirs publics estiment qu’il est « indispensable » de consommer 3 à 4 produits laitiers par jour du berceau au cercueil. De son côté, la MFM n’interdit pas les produits laitiers mais elle précise qu’on peut s’en passer et conseille, si on en mange, de le faire avec modération : pas plus de 1, voire 2 portions par jour, si on les tolère, et en choisissant des produits bio. La raison en est que des études très nombreuses ont lié depuis plusieurs décennies une consommation élevée de laitages à un risque accru de plusieurs maladies dont le risque de cancer de la prostate (sachez qu'aux doses conseillées par la MFM, le risque est probablement nul).

Lire : Le lait est toxique pour la prostate

La MFM conseille aussi de manger des féculents non pas systématiquement « à chaque repas » comme le recommandent les pouvoirs publics et les industriels mais surtout selon le niveau d’activité physique, et dans tous les cas en privilégiant ceux dont l’index et la charge glycémiques sont bas – une notion totalement absente des recommandations officielles. Ainsi, alors que les pouvoirs publics financent avec votre argent des campagnes en faveur des pommes de terre (index glycémique généralement élevé), la MFM conseille de limiter ces aliments (sans forcément les supprimer d'ailleurs) et leur préférer par exemple les patates douces (index glycémique modéré).

Les préconisations des uns (pouvoirs publics, industriels) et des autres (MFM, LaNutrition.fr) viennent de trouver un arbitrage dans l’actualité la plus récente.

Plus de lait et plus de patates : plus de décès

Deux nouvelles études viennent d’être publiées par les chercheurs de l’Ecole de santé publique de Harvard. Elles ont consisté à suivre pendant près de 10 ans 926 médecins de sexe masculin issus de la Physicians’ Health Study, atteints à l'origine d’un cancer de la prostate sans métastases. Pendant cette période, ils ont été interrogés sur leurs habitudes alimentaires.

A l’issue du suivi, 333 d’entre eux étaient décédés, dont 56 par cancer de la prostate. Les chercheurs ont trouvé que les hommes qui adhéraient le plus à un régime alimentaire de type occidental avec surtout viandes rouges et charcuteries, laitages entiers, céréales raffinées et pommes de terre avaient un risque de décès par cancer de la prostate multiplié par 2,39 par rapport à ceux qui consommaient surtout un régime dit « prudent » avec des légumes, fruits, du poisson, des légumes secs et des produits céréaliers non raffinés.

Le lien entre le régime occidental et le risque de décès par cancer s’explique surtout par la consommation de pommes de terre. Les hommes qui en mangeaient le plus avaient un risque de décès multiplié par 2,85.

De plus, le régime de type occidental était associé à un risque de mortalité toutes causes multiplié par 1,73. Le régime « prudent », lui, n’était pas associé à une mortalité plus faible par cancer de la prostate, mais il y avait malgré tout un bénéfice sur la mortalité toutes causes, réduite de 40%.

Dans une autre analyse, les chercheurs ont examiné le lien entre la consommation de produits laitiers et le risque de mortalité, quel que soit le type de régime alimentaire suivi. En effet, une majorité d’études ont déjà trouvé que les hommes qui mangent le plus de laitages (plus de 2 par jour) ont un risque accru de cancers de la prostate, et surtout de cancers agressifs, les plus difficiles à traiter.

Résultats : par rapport aux hommes qui consommaient moins d’un produit laitier par jour, ceux qui en consommaient au moins 3 portions, ce qui correspond aux recommandations en vigueur en France, avaient un risque de décès par cancer de la prostate accru de 141%, et un risque de mortalité toutes causes augmenté de 76%.

Il s'agit certes d'études d'observation comme la plupart des études en nutrition, qui ne permettent pas seules de tirer une conclusion de cause à effet, mais elles ont pour elles de s'appuyer sur un corpus déjà très fourni et des mécanismes biologiques bien explorés dans les études expérimentales et les études d'intervention.

Les chercheurs pensent ainsi que des facteurs de croissance et des hormones présents dans les laitages, ou encore des facteurs de croissance activés par les protéines laitières lorsqu'on mange des produits laitiers expliquent ces résultats. De plus la présence de calcium et de phosphore pourrait jouer un rôle dans la flambée des cancers. En effet, ces minéraux peuvent abaisser le niveau de la vitamine D active; or celle-ci s’oppose à la prolifération des cellules cancéreuses de la prostate. Une baisse prolongée de vitamine D active pourrait ainsi accélérer la progression de la maladie.

Lire : Le phosphore à haute dose en cause dans le cancer de la prostate

Pour les pommes de terre, le mécanisme évoqué est la sursécrétion d’insuline (un autre moteur de croissance cellulaire) liée à une charge glycémique élevée.

Si les hommes qui ont participé à cette étude avaient eu connaissance des informations et des conseils de la MFM, on peut penser qu'un plus grand nombre encore seraient en vie.

Voilà pourquoi nous devons continuer à faire connaître la MFM.

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Sources 

Yang M, Kenfield SA, Van Blarigan EL, et al. Dairy intake after prostate cancer diagnosis in relation to disease-specific and total mortality. Int J Cancer. Publié en ligne 20 mai 2015.
Yang M, Kenfield SA, Van Blarigan EL, et al. Dietary Patterns after Prostate Cancer Diagnosis in Relation to Disease-Specific and Total Mortality. Cancer Prev Res June 2015 8:545-551.

 

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