Cancer du sein : de la vitamine D en complément des traitements?

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 11/04/2016 Mis à jour le 10/03/2017

La vitamine D limite la croissance des tumeurs et favorise la survie des femmes ayant un cancer du sein.

Le déficit en vitamine D est associé à différentes pathologies, notamment les cancers. La vitamine D peut-elle aider à lutter contre un cancer du sein ? Selon plusieurs études récentes, c'est le cas.

La vitamine D peut être apportée par l’alimentation (poissons gras, huile de foie de morue ou lait enrichi) ou par des compléments alimentaires. Mais la principale source reste le soleil car l’organisme en synthétise grâce aux rayons UVB. Une fois ingérée ou fabriquée par l’organisme, la vitamine D est convertie en une forme active, le calcitriol. Celui-ci se lie au récepteur de la vitamine présent dans les cellules, il entre dans le noyau et contrôle l’expression de nombreux gènes, dont ceux impliqués dans la santé osseuse. La synthèse de vitamine D à partir des UVB n'est efficace qu'entre avril et octobre dans l'hémisphère nord. L'alimentation ne suffit pas à compenser les déficits en hiver, qui sont très courants dans les pays européens. 

Lire : Combien de vitamine D prendre en hiver ?

 

La vitamine D améliore la survie des femmes qui ont un cancer du sein

Des chercheurs de l’université de San Diego (La Jolla) ont voulu savoir si de hauts niveaux de vitamine D dans le sang étaient associés à une meilleure survie des patientes ayant un cancer du sein. L'un des auteurs de ces travaux est Cédric Garland, qui, avec son frère, est un des premiers à avoir analysé le lien entre vitamine D et cancer.

Lire : Les frères Garland, pionniers du cancer et de la vitamine D

Les auteurs ont donc recherché des articles sur le lien entre mortalité par cancer du sein et vitamine D dans les bases de données internationales ; ils en ont trouvé 5 qui regroupaient plus de 4.440 femmes avec un cancer du sein. Résultats : il y avait une forte relation entre la concentration de vitamine D dans le sang et la survie des femmes. Les patientes avec de hauts niveaux sanguins de vitamine D (au moins 30 ng/mL) étaient deux fois plus susceptibles de survivre de la maladie que celles qui avaient de bas niveaux (17 ng/mL). C'est pourquoi les auteurs préconisent que la vitamine D complète les traitements contre le cancer du sein.

Comment s'explique le rôle de la vitamine D ? Au niveau moléculaire, les métabolites de la vitamine D activeraient une protéine qui bloque la division des cellules agressives du cancer du sein, ce qui limiterait la croissance de la tumeur. In vitro, les métabolites de la vitamine D agissent sur la différenciation cellulaire, l’apoptose (la mort cellulaire programmée) et l’angiogenèse (la création de nouveaux vaisseaux sanguins alimentant les tumeurs).

Pour appuyer ces résultats, les auteurs rappellent que les taux de décès par cancer sont plus bas dans les régions des Etats-Unis qui reçoivent le plus d’UVB.

Le déficit en vitamine D contribue à l'apparition de métastases

Des chercheurs de l’université de Stanford ont mené des expériences pour mieux comprendre le mécanisme d’action de la vitamine D sur les cellules cancéreuses. 10 souris ont été nourries avec un régime sans vitamine D pendant 10 semaines et 10 avec des doses normales de vitamine.

Les souris avec un régime pauvre en vitamine D ont développé des tumeurs palpables environ sept jours plus tôt que les autres ; au bout de six jours de croissance, ces tumeurs étaient d’une taille significativement plus importante que celles des animaux qui avaient des niveaux normaux de vitamine D. Les chercheurs ont trouvé que la vitamine D limite l’expression d’un gène (ID1) qui accélère la croissance du cancer du sein. Les tumeurs du sein dans des souris de laboratoire ayant un déficit en vitamine D risquent plus de faire des métastases que celles de souris ayant des niveaux corrects de vitamine D. Cette recherche met en lumière un lien direct entre les niveaux de vitamine D dans le sang et l’expression du gène ID1, associé aux métastases du cancer du sein.

Les chercheurs ont aussi comparé les niveaux de vitamine D circulante chez 34 patientes  avec le niveau d’ID1 des cellules tumorales retirées par chirurgie au cours du traitement : les femmes qui avaient de bas niveaux de vitamine D exprimaient plus ID1 dans les tissus tumoraux que les femmes avec des niveaux élevés de vitamine D.

« Notre étude montre qu'une carence en vitamine D, ou une incapacité des cellules tumorales à répondre de façon appropriée à la présence de la vitamine D, est suffisante pour stimuler les cellules cancéreuses non métastatiques à devenir métastatiques, » a expliqué Brian Feldman, auteur de ces travaux. Le déficit en vitamine D favorise donc les métastases du cancer du sein car la voie de signalisation de la vitamine D inhibe l’expression du gène lD1 qui favorise la progression de la tumeur.

Plus de risques de décès par cancer avec un déficit en vitamine D

Une étude conduite à l'Université de Copenhague (Danemark) montre que le manque de vitamine D dans le sang conduit à un risque de mortalité accru. L'étude a inclus 95.766 Danois suivis pendant des périodes allant de 5,8 années à 19,1 années. Les chercheurs ont identifié les individus ayant des variants génétiques qui affectent le taux de vitamine D (DHCR7 et CYP2R1), et les taux de vitamine D sanguins ont été mesurés sur 35.334 participants. A la fin de la période de suivi, en 2013, 10.349 personnes étaient décédées.

Dans cette étude, les chercheurs considèrent un taux bas de vitamine D lorsqu’il est inférieur de 20 nmol/L (8 ng/mL) à la normale. Au Danemark, on conseille d’avoir un taux de vitamine D de 50 nmol/L (20 ng/mL).

Résultats : chaque augmentation du score génétique DHCR7/CYP2R1 était associé à une baisse de 1,9 nmol/L de la vitamine D plasmatique et une augmentation de la mortalité par cancer et toutes causes, mais pas de la mortalité cardiovasculaire. D’une manière générale, une baisse d’origine génétique de 20 nmol/L de la vitamine D plasmatique se traduisait par une augmentation de 30 % de la mortalité toutes causes, et de plus de 40 % de la mortalité par cancer.

Conclusion de ces trois études : ne pas manquer de vitamine D est important en cas de cancer du sein, pour freiner la progression de la maladie et améliorer la survie. Et selon de nombreuses études, cette vitamine est importante en prévention aussi.

Pour en savoir plus sur la vitamine D, lire Vitamine D, mode d'emploi  du Dr Brigitte Houssin (lire un extrait ICI >>)

Sources

Mohr SB, Gorham ED, Kim J, Hofflich H, Garland CF. Meta-analysis of Vitamin D Sufficiency for Improving Survival of Patients with Breast Cancer. Anticancer Res. 2014 Mar;34(3):1163-6.

Williams JD, Aggarwal A, Swami S, Krishnan AV, Ji L, Albertelli MA, Feldman BJ. Tumor Autonomous Effects of Vitamin D Deficiency Promote Breast Cancer Metastasis. Endocrinology. 2016 Apr;157(4):1341-7. doi: 10.1210/en.2015-2036.

S. Afzal, P. Brondum-Jacobsen, S. E. Bojesen, B. G. Nordestgaard. Genetically low vitamin D concentrations and increased mortality: mendelian randomisation analysis in three large cohorts. BMJ, 2014; 349 (nov18 2): g6330 DOI: 10.1136/bmj.g6330

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