Julien Venesson:"Comment j'ai réduit au silence la sclérose en plaques de ma femme"

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 23/05/2016 Mis à jour le 06/02/2017
Point de vue

Grâce à des changements alimentaires, un programme d'exercices, le journaliste et auteur scientifique Julien Venesson a réussi à réduire au silence la sclérose en plaques de sa compagne Emilie et lui faire recouvrer des fonctions motrices perdues. Il témoigne.

LaNutrition.fr : vous êtes l’auteur du livre Vaincre la sclérose en plaques. On vous connaît plus pour des livres de nutrition (Gluten) et de sport (Paléo Nutrition), pourquoi avoir voulu écrire sur cette maladie en particulier ?

Julien Venesson : Le point de départ de ce livre est la rencontre avec ma compagne, Émilie. Touchée par une sclérose en plaques, elle avait de plus en plus de difficultés à vivre normalement, et même à marcher. Ayant déjà un certain nombre de connaissances sur les maladies auto-immunes en général, tout faire pour l’aider tombait sous le sens. Personne ne souhaite voir souffrir ses proches.
J’ai donc passé énormément de temps à lire les journaux médicaux et les recherches faites sur cette maladie. Et ce que j’ai découvert a été assez surprenant. Alors que cette maladie était encore pour moi entourée de mystères et empreinte d’une certaine fatalité, j’ai découvert que ce n’était pas du tout le cas au niveau de la recherche. Le nombre de publications scientifiques sur cette maladie est en effet impressionnant : elles se comptent par dizaines de milliers ! Il y a même des journaux médicaux spécialisés sur cette maladie. Ainsi, il existe un très grand nombre d’études scientifiques qui passent en revue les causes, les mécanismes, les traitements, mais aussi les liens entre l’alimentation, le mode de vie et l’évolution de la maladie.
En appliquant simplement tous mes conseils, Émilie a pu stopper les poussées. Ensuite nous avons mis au point un programme de rééducation qui lui a permis de retrouver les fonctions neurologiques qu’elle avait perdues. Les résultats ont été si extraordinaires que nous avons décidé de rassembler toutes ces données dans un livre, dans l’espoir d’aider d’autres malades.

On a beaucoup entendu parler du lien entre vaccin contre l’hépatite B et sclérose en plaques, qu’en est-il ?

C’est une question qui revient fréquemment. Pourtant, la recherche scientifique y a clairement répondu. Et les études qui se sont penchées sur cette question n’ont pas toutes été payées par des industriels, loin de là. Il ressort de tous ces travaux que le vaccin contre l’hépatite B pourrait avoir légèrement favorisé l’apparition de la sclérose en plaques. Cela s’explique par la présence des adjuvants dans les vaccins, des molécules qui visent à stimuler l’immunité pour déclencher la mémoire immunitaire. Ce faisant, ce sursaut immunitaire peut déclencher une sclérose en plaques, sous réserve que les facteurs prédisposant soient déjà en place. En fait, il semble que les personnes qui ont déclenché la maladie suite à la vaccination auraient de toute façon déclenché la maladie si elles n’avaient rien fait. Ce problème du lien entre vaccins et auto-immunité n’est d’ailleurs pas exclusif à la sclérose en plaques et concerne la plupart des maladies auto-immunes.

Sur quels mécanismes agit le programme que vous avez développé ?

Dans la sclérose en plaques, l’auto-immunité n’est pas la cause des poussées et des pertes de fonctions. Si c’était le cas il n’y aurait d’ailleurs pas de « poussées » et tous les malades vivraient une forme progressive de la maladie, c’est-à-dire d’évolution constante, puisque l’auto-immunité est aussi un phénomène constant.
Les poussées se déclenchent quand l’inflammation et l’auto-immunité gagnent le système nerveux central, un phénomène qui ne devrait pas survenir normalement car notre système nerveux est protégé par une barrière appelée «hémato-encéphalique». On peut l’imaginer comme la barrière intestinale : c’est son homologue au niveau du système nerveux.

Pour qu’une poussée ait lieu, deux évènements doivent donc se mettre en place conjointement : il faut que l’auto-immunité subisse un pic d’activité d’une part puis il faut que la barrière hémato-encéphalique devienne poreuse afin que l’auto-immunité puisse attaquer le système nerveux central. Il y a donc deux moyens principaux pour agir sur la sclérose en plaques : soit agir pour calmer l’auto-immunité, soit agir sur la barrière hémato-encéphalique. C’est d’ailleurs ce que font tous les médicaments actuels, d’une manière ou d’une autre. Mais il est aussi possible d’agir efficacement via l’alimentation et le mode de vie. Par exemple, dormir moins de 7 heures par nuit augmente la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique et accélère la survenue des poussées. Quand il n’est pas possible de dormir plus, un complément alimentaire de mélatonine s’est montré efficace pour limiter les effets du manque de sommeil sur cette barrière. Il s’agit ici d’un exemple assez simple, proche du bon sens, mais il existe aussi de nombreuses données découvertes par les chercheurs qui n’étaient pas évidentes de prime abord : par exemple, fumer peut multiplier par trois la vitesse de survenue des poussées mais la nicotine a des effets inverses ! Ainsi, un malade qui fume peut y gagner à arrêter de fumer en utilisant un substitut nicotinique plutôt qu’en arrêtant sans rien.

Dans le volet alimentation de votre programme, parmi les aliments à éviter, vous pointez le gluten, le sel, le lait mais pas le sucre (montré du doigt pourtant par d’autres auteurs). Pourquoi ?

Une alimentation très riche en sucre est mauvaise pour la santé, c’est un fait. Mais il n’existe aucune étude ayant trouvé un lien entre la consommation de sucre et les poussées de sclérose en plaques. Il est probable qu’à partir d’un certain excès cela finisse par être nocif mais mon objectif était surtout de me concentrer sur les comportements qui influencent vraiment et de manière nette l’évolution de la maladie.
Le sel par exemple, a un effet stupéfiant sur la maladie : les personnes qui en mangent un peu trop ont un risque de poussée augmenté de près de 400% ! Diminuer le sel a donc plus d’effet sur la fréquence des poussées que l’interféron, médicament de référence dans cette maladie.

De même, un lien entre acides gras saturés et sclérose en plaques est souvent cité. Qu’en pensez-vous ?

Certains thérapeutes recommandent effectivement de suivre une alimentation très pauvre en graisses saturées en cas de sclérose en plaques. Cela consiste bien sûr à éliminer les produits gras industriels mais aussi les viandes grasses ou les œufs. Ces conseils sont issus de ceux donnés par le Dr Swank, un médecin américain, dans les années 1950. C’était il y a plus de 60 ans déjà. Depuis, de nombreuses études scientifiques ont été menées pour observer le lien entre le type de graisses présentes dans l’alimentation et l’évolution de la maladie. Une synthèse de ces résultats montre que les acides gras saturés n’ont pas d’effet réel sur la maladie. En revanche, plusieurs études montrent des liens solides avec les graisses polyinsaturées : les acides gras oméga-3 en particulier contribuent à ralentir la fréquence des poussées et facilitent la récupération au décours de celles-ci.

A part la vitamine D, quels sont les micronutriments qui aident le plus les malades ?

Le rôle de la vitamine D dans la sclérose en plaques est assez particulier : de récentes recherches ont en effet montré que la maladie « pompe » littéralement les réserves de cette vitamine. En parallèle, certaines études d’intervention ont montré de bons résultats sur la fréquence des poussées lorsque celle-ci est supplémentée à fortes doses (entre 8000 et 10 000 UI par jour, soit l’équivalent de ce qu’on peut obtenir en s’exposant torse nu quotidiennement sous un soleil d’été).

D’autres nutriments sont importants pour les malades. Par exemple le zinc est aussi « bu » par le système immunitaire, qui doit probablement l’utiliser pour lutter contre l’inflammation. Un simple complément alimentaire normalement dosé (15 mg par jour) pris au long cours (plusieurs mois) suffit à améliorer les symptômes et le bien-être.

Pourquoi privilégiez-vous les sports de force à ceux d’endurance pour récupérer les fonctions motrices ?

Il y a deux raisons qui expliquent pourquoi l’organisme récupère naturellement une partie des fonctions neurologiques perdues après une poussée, pendant la phase de « rémission ». La première est liée au fait qu’une poussée impose un stress très puissant au système nerveux. Ce stress le pousse à utiliser ses capacités de neuroplasticité pour récupérer : il peut reformer des gaines de myéline et même des neurones. La deuxième est simplement le fait d’avoir dans l’organisme suffisamment des nutriments qu’utilise le système nerveux pour se réparer. Dans le cas de la forme progressive de la maladie, ce deuxième critère est absent et les récupérations se font de moins en moins jusqu’à devenir inexistantes.

Ce constat avait déjà été fait avant moi aux Etats-Unis par le Dr Wahls, dont on peut retrouver une interview dans mon livre, et qui est parvenue à retrouver toutes ses fonctions motrices alors qu’elle ne se déplaçait plus qu’en fauteuil roulant. C’est à partir de ce constat que j’ai mis au point le programme de récupération proposé dans le livre. Diverses méthodes sont applicables selon le degré de handicap mais dans les cas où on peut encore se mouvoir même partiellement, ce sont des exercices physiques très spécifiques et très stimulant pour le système nerveux qui ont un effet. On ne parvient pas à obtenir de tels stimuli avec des efforts d’endurance. Il existe néanmoins quelques exceptions quand il s’agit d’endurance de haute intensité, comme le cas d’Aurora, que je rapporte dans le livre, et qui a mis la maladie en rémission en reprenant le triathlon de manière encore plus intense. Mais il faut une volonté hors du commun pour y parvenir ; je pense que c’est une exception.

Votre programme est-il utile aussi contre ce que vous appelez les « fausses » scléroses en plaques ?

Il existe au moins une dizaine de maladies qui peuvent provoquer des symptômes identiques à ceux de la sclérose en plaques. Ces maladies sont tantôt considérées comme des entités à part entière, tantôt comme des « variantes » de sclérose en plaques, mal définies. On trouve dans cette liste entre autres la neuromyélite optique, l’encéphalomyélite aiguë disséminée, la maladie de Schilder… La distinction entre ces variantes importe finalement peu, car même si les causes et les mécanismes de ces maladies peuvent être totalement différents, leur manifestation clinique est similaire et les moyens d’action restent exactement les mêmes que ceux que j’évoque dans le livre.

Par ailleurs, il est important de préciser que lors de la rédaction des derniers critères de MacDonald (les critères utilisés de manière officielle en neurologie pour poser le diagnostic de sclérose en plaques), les chercheurs ont précisé que « le seul moyen de diagnostic totalement fiable pour la sclérose en plaques est l’autopsie. » Un certain nombre de malades ne sont donc pas certains d’être touchés par la SEP car leurs IRM ne montrent rien ou parce que d’autres examens donnent des résultats difficiles à interpréter. Pour ces cas, si les symptômes cliniques sont clairs, je conseille d’agir « comme si c’était une sclérose en plaques ».

Pour en savoir plus, lire : Vaincre la sclérose en plaques (lire un extrait ICI  >>)

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