A-t-on plus de risque de mourir à l’hôpital lorsqu'on est admis le week-end ?

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 16/06/2014 Mis à jour le 06/02/2017
Pour certains patients, le risque de décéder suite à une admission en urgence le week-end est plus élevé qu'en semaine, selon une étude canadienne ?

On ne choisit pas le moment où on tombe malade. C’est une évidence. Pourtant, aller à l’hôpital le week-end pour une urgence médicale ou chirurgicale exposerait les patients à un risque de décès plus élevé que s’ils venaient un jour de semaine. Dans un récent rapport de l’Institut Canadien d’Information sur la Santé, les chercheurs rapportent que le risque de décéder augmente de 7% si on subit une opération chirurgicale en urgence le week-end par rapport à la semaine, l’augmentation est de 3% pour les soins médicaux d’urgence.

Des études menées aux US, au Royaume-Uni, au Danemark, en Australie et en Corée du Sud ont également rapporté un « effet week-end » avec même des risques de décès plus élevés que ceux du rapport canadien. Une étude aux Etats-Unis révèle une augmentation de 15% du risque de décès lors d’une admission pour des soins médicaux en urgence le week-end par rapport à la semaine. Certaines études n’ont quant à elles trouvé aucun effet significatif. A notre connaissance, il n’y a pas encore d’étude publiée sur un potentiel « effet week-end » en France.

Dans cette étude, l’objectif des médecins canadiens était de vérifier s’il existe un risque de décès plus élevé pour les patients admis le samedi ou le dimanche dans les hôpitaux au Canada. Pour cela, ils ont analysé les données hospitalières d’environ 4 millions de patients admis en urgence entre 2010 et 2013 dans près de 700 hôpitaux de soins de courte durée au Canada. Les résultats montrent que le risque de décéder après une admission en urgence pour un problème chirurgical ou nécessitant des soins médicaux d’urgence, est plus élevé le week-end qu’un jour de semaine. Si le taux de mortalité parmi les patients admis en urgence le week-end était le même que celui observé pour les jours de semaine, on estime qu’il y aurait 413 décès de moins parmi les patients admis en urgence sur les 75 000 décès qui ont lieu à l’hôpital par an. Cela représenterait une baisse de 0,5%. Par contre aucun « effet week-end » n’a été observé pour les patients en obstétrique, pédiatrie ou psychiatrie.

Il faut cependant noter que certains facteurs peuvent impacter l’interprétation des résultats :

- les patients qui consultent le week-end n’ont pas les mêmes caractéristiques que ceux qui consultent la semaine : par exemple, les patients présentant des troubles sans gravité ne viennent pas à l’hôpital le samedi et le dimanche, ils attendent le lundi. Cela augmente la proportion de personnes venant avec des troubles graves.

- le taux de mortalité est plus élevé pour certains problèmes urgents (crise cardiaque) mais pas pour d’autres (AVC), pourtant dans les deux cas les patients ont dû attendre plus longtemps pour le diagnostic et le traitement. Le risque de décès est augmenté de 8% pour les patients venant pour une crise cardiaque le week-end par rapport à la semaine

- les données ne renseignent pas sur l’état de gravité des patients et ne permettent pas de comparaison entre le week-end et la semaine

L’augmentation du risque est faible mais elle est significative. Deux phénomènes peuvent être à l’origine de cet « effet week-end » : soit les patients admis le samedi ou le dimanche sont plus gravement malades que ceux admis la semaine soit les services hospitaliers sont de moins bonne qualité et moins accessibles le week-end en raison d’une organisation différente et d’une baisse de certains effectifs. Même s’il est finalement difficile d’expliquer avec certitude cet « effet week-end », « une meilleure compréhension de l’effet de fin de semaine présente un grand intérêt pour les gestionnaires du système de santé, les cliniciens et les patients » indique le rapport.

Enfin, selon les médecins canadiens cet effet est faible et ne justifie pas de reporter les soins. Pour le Dr Chaim Bell (spécialiste en médecine interne à l'Hôpital Mount Sinai de Toronto), « tout retard d’hospitalisation représente un risque plus élevé pour les patients que l’effet week-end lui-même ».

Lire aussi : Pr Claude Béraud "Est-ce la fin des illusions médicales ?"

Source

Rapport « Admissions de fin de semaine et mortalité hospitalière » Juin 2014. Institut Canadien d’Information sur la Santé.

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