Du vin, oui, mais modérément et au repas

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 11/09/2008 Mis à jour le 10/03/2017
Claude-Louis Léger est directeur de recherches INRA à la Faculté de médecine de Montpellier. Pour lui, le vin n’a pas les propriétés miraculeuses qu’on lui a un peu vite prêtées, mais il est bénéfique à condition d’être bu au repas (avec modération !).

 

Faut-il ranger le vin parmi les aliments-santé ?

Les études épidémiologiques ont accrédité un effet favorable du vin sur la santé. Mais dans de nombreuses populations étudiées - généralement anglo-saxonnes -, la consommation de vin allait de pair avec une consommation alimentaire et un mode de vie sains. Pour ces raisons, les résultats de nombreuses études épidémiologiques qui font apparaître un effet bénéfique du vin doivent être relativisés.

 

Donc le vin, un aliment comme les autres ?

Je ne suis pas sûr qu’il y ait des effets spécifiques du vin sur le risque cardiovasculaire. Il est beaucoup plus probable qu’il intervient en synergie avec d’autres polyphénols apportés par l’alimentation. Il faut d’ailleurs mettre en garde contre une utilisation du vin comme élément isolé de la protection cardiovasculaire en dehors de tout contexte alimentaire.

 

Quels sont les effets réels des polyphénols du vin ?

Les polyphénols pourraient intervenir sur le processus d’athérogénèse, mais pas nécessairement par une action sur la capacité antioxydante du plasma (1). Par exemple, l’une des étapes clés de l’athérosclérose, c’est la transformation des macrophages en cellules spumeuses (2). Pour cela, les macrophages captent de grandes quantités de LDL oxydées par l’intermédiaire de récepteurs dits éboueurs, dont le CD36. Nous avons montré que des métabolites des polyphénols du vin ont un effet dépresseur sur l’expression du gène de ce récepteur, de l’ordre de 80%, ce qui laisse penser que ces métabolites diminuent le nombre de récepteurs CD36 et peuvent pour le moins ralentir le processus athérogénique. Le vin rouge (mais ni le vin blanc, ni le champagne), augmente aussi l’apolipoprotéine A1 (Apo A1), un facteur anti-athérogène, qui sert au retour du cholestérol vers le foie où il va être détruit.

 

Faut-il préférer les vins dont la teneur en polyphénols est élevée ?

On peut penser que plus il y a de polyphénols dans un vin rouge plus la capacité antioxydante du plasma va passer par un pic élevé dans les 2 à 4 h qui suivent le repas. Nous avons étudié ce qui se passe après un petit déjeuner avec ou sans polyphénols. Sans les polyphénols, la capacité antioxydante diminue après le repas, ce qui correspond à un effet pro-oxydant des aliments. Mais lorsqu’on absorbe des polyphénols (ou du vin) avec le repas, cette capacité antioxydante ne baisse pas, elle peut même augmenter.

 

Faut-il en conclure qu’il est préférable de boire du vin au repas ?

Oui, car pendant deux heures, les polyphénols du vin vont s’opposer aux phénomènes oxydants qui suivent le repas ! D’autant que leur absorption est plus lente car ils accompagnent des graisses alimentaires .

 

Celles et ceux qui boivent régulièrement un peu de vin ont-ils raison de le faire ?

On ne peut pas dire aux abstinents de consommer du vin car dans ce groupe de la population (comme dans l’ensemble de la population) il y a des personnes à risque de dépendance. En revanche, je dirais volontiers aux buveurs réguliers et modérés de ne pas écouter les messages extrêmes selon lesquels il ne faudrait jamais boire d’alcool. Le seul message, c’est de consommer modérément et régulièrement. Il n’y a aucune raison dans ce cas de prétendre que le vin serait préjudiciable à la santé. Mais le mode d’absorption est important : il faut privilégier la consommation aux repas, ne serait-ce que pour favoriser la synergie entre antioxydants.

 

(1) Capacité que possède le plasma à neutraliser les radicaux libres qui endommagent tous les constituants de l’organisme.

(2) Les macrophages sont des cellules chargées de détruire les bactéries, attaquer les virus, réparer les tissus, et dévorer un peu tout. Le risque cardiovasculaire est lié à la concentration plasmatique en « mauvais » cholestérol LDL. Une des premières étapes de l'athérosclérose est la pénétration et l'accumulation de les lipoprotéines de basse densité (LDL) dans les macrophages de la paroi artérielle qui deviennent des cellules surchargées de graisse ou « spumeuses » ; lorsque ces cellules sont suffisamment nombreuses, elles forment des plaques d'athérome. Mais les LDL ne peuvent être athérogènes que si elles sont modifiées, par exemple par oxydation.

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