Elections : la pharmacie des candidats

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 20/04/2007 Mis à jour le 17/02/2017
Comment font les hommes et femmes politiques pour supporter le stress et le rythme effréné d'une campagne ? Question de capacités naturelles, bien sûr, mais l'armoire à pharmacie a elle aussi son importance...

Je déjeunais récemment avec un ami médecin qui suit plusieurs hommes politiques d’un pays francophone et la conversation a naturellement glissé sur la campagne électorale française. Comment font nos candidats et candidates pour courir ainsi l’hexagone et au-delà, surmonter le stress d’un agenda surchargé, des petites phrases assassines, des rendez-vous télévisés, gommer la fatigue des réunions matinales, des meetings nocturnes, des nuits courtes passées dans des lits étrangers, et paraître à tout instant frais et reposés, énergiques, créatifs, éloquents. Où est le truc ? Pour mon ami médecin, ces hommes et femmes ne sont déjà pas là par hasard « parmi tous les prétendants d’un parti, ils ont émergé parce qu’ils ont des capacités extra-ordinaires à gérer le stress, des facultés de récupération hors du commun et très souvent une énergie naturelle. Ce n’est pas monsieur ou madame Tout-le-Monde. »

Soit. Mais encore. « Maintenant, ajoute-t-il, il ne faut pas leurrer. La plupart sont suivis médicalement, comme des chevaux de course. Régime alimentaire approprié avec quelques interdits, un peu d’exercice quand c’est possible et des médicaments. » Nous y voilà. Lesquels ? Sur le coin de la table du restaurant, j’ai dressé la liste de ce que mon ami avait prescrit ces dernières années à des hommes et des femmes en bonne santé. « Il y a de fortes chances que ces médicaments soient utilisés en ce moment dans la campagne électorale française, assure-t-il ! »

Voici cette liste, et les commentaires de mon ami.

Hydrocortisone. « Il s’agit d’un médicament qui vise à remplacer le cortisol, une hormone produite par les surrénales. Le cortisol est l’hormone du stress : lorsqu’il y en a trop, ce n’est pas une bonne chose, en particulier pour l’immunité. Mais dans une campagne électorale, les candidats endurent un tel stress que leurs surrénales s’épuisent, et que très souvent, quand on mesure le cortisol, il est trop bas. Là, il faut corriger car trop peu de cortisol rend encore plus vulnérable au stress et à l’épuisement. Je donne en général 20 à 25 mg d’hydrocortisone par jour : mes patients se sentent plus à l’aise et moins fatigués. »

Testostérone. « Il faut garder à l’esprit que les hommes et les femmes à ce niveau de compétition électorale ont en général 50 ans et plus. Chez l’homme comme chez la femme, leur testostérone est en général assez basse, ce qui est une source de fatigue, d’irritabilité, parfois de léthargie. Je fais faire un dosage sanguin et s’il est trop bas, je prescris de la testostérone en gel, y compris chez la femme, à une dose bien sûr inférieure à celle qu’on donne à un homme. C’est souvent très positif, ça peut même apporter un soupçon d’agressivité – de bonne agressivité – dans la conduite de la campagne. »

Mélatonine. « En tant que médecin d’hommes politiques, on doit gérer les troubles du sommeil. Très peu de candidats dorment parfaitement. Je mesure la mélatonine endogène, et lorsqu’elle est basse, je prescris de la mélatonine à hauteur de 0,5 mg ou 1 mg à prendre au coucher. J’ai remarqué que le sommeil est amélioré, mais seulement en cas de déficit. Je donne aussi de la mélatonine quand un homme politique doit franchir plusieurs fuseaux horaires. »

Somnifères. « Quand la mélatonine n’a pas sa place, ou ne marche pas, j’ai recours au zoplicone (Imovane), un somnifère que je donne pendant quelques jours à raison d’un demi à un comprimé le soir. Toute la difficulté consiste à se limiter à une courte période. Pendant une campagne électorale, le problème du sommeil est l’un des plus délicats à gérer, avec celui de la fatigue.»

Bêta-bloquants. « Je n’aime pas trop les bêta-bloquants parce qu’ils ont des effets secondaires, mais ce sont les candidats eux-mêmes qui les réclament parce que leurs adversaires les utilisent ou qu’on les leur a prescrits dans le passé ou qu’ils ont cette réputation flatteuse. Ces médicaments freinent les manifestations du stress. Je les délivre avec parcimonie, par exemple avant un débat télévisé. Il y a des gens chez qui ça ne marche pas très bien, alors il faut les persuader de s’en détacher. Une bonne préparation avec des sparring-partners, un bon taux de testostérone, c’est je crois plus efficace que de prendre un bêta-bloquant. »

On peut être choqué d’apprendre que les candidats à l’élection présidentielle ont recours à des médicaments, mais précise mon ami, « leur rythme de vie, leurs contraintes sont à des années-lumières des nôtres. Comme pour les sportifs de haut niveau, leurs besoins sont particuliers. Il ne s’agit pas de dopage, mais de rééquilibrage en fonction des circonstances. »

Peut-on voir si un candidat a pris tel ou tel médicament ? « C’est possible. J’ai en mémoire un débat entre deux candidats à la présidence de votre pays. Il y avait chez l’un des candidats un calme, un détachement qui m’a fait penser à un traitement par les bêta-bloquants. Et lorsqu’on voit l’agressivité de certains candidats on ne peut s’empêcher de penser qu’ils ont peut-être forcé sur la testostérone, mais impossible d’être certain ! »

Finalement, je lui demande si les médicaments font les élections, si les mieux suivis médicalement ont plus de chance de l'emporter. Sa réponse : « Je ne crois pas. Encore une fois, il y a des capacités naturelles. Les traitements ne font que les soutenir ou, parfois, les révéler. »

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