Les ciseaux de France 3

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 28/04/2006 Mis à jour le 17/02/2017
Isabelle Robard était l'invitée de l'émission Culture et Dépendances de Franz-Olivier Giesbert sur FR3 le 19 mai 2004 pour y présenter Santé, mensonges et propagande sur le thème «France, ton système de santé fout le camp». L'enregistrement avait lieu le 13 mai. A la diffusion, une partie des propos tenus par Isabelle Robard, en particulier sur le lait, a été inexplicablement coupée par la chaîne. Voici ce qu’Isabelle n’a pu dire sur FR3 le 19 mai.

14 juin 2004

 

Isabelle Robard :

« Dans l’émission Culture et dépendances de Franz-Olivier Giesbert, que je remercie vivement de m’avoir invitée, je n’ai malheureusement pu m’exprimer de façon contradictoire notamment à propos de l’interpellation sur le lait et ses dangers éventuels et ceci pour deux raisons fort simples. D’une part, le Pr Bernard Debré, venu présenter son livre, ne m’a pas laissé la parole, m’interrompant constamment. D’autre part, certains de mes propos ont disparu au montage de l’émission.»

Voici le passage coupé sur le lait

« Nous n’avons pas la prétention d’interdire aux Français de consommer du fromage ou des produits laitiers et de les prendre par la main de la naissance jusqu’à la porte du cimetière pour leur indiquer ce qu’il faut manger. En revanche, chacun est en droit de savoir, lorsqu’une recommandation nutritionnelle est délivrée sur le lait ou autres aliments, recommandation censée être émise dans un intérêt de santé publique, si cette recommandation est véritablement objective et déconnectée de tout intérêt économique et corporatiste ou si au contraire, elle émane des industriels concernés. Or, justement, la plupart des recommandations nutritionnelles actuelles sont liées à l’industrie agro-alimentaire et contribuent à faire pour nombre d’entre elles, le lit de l’obésité, du diabète et des maladies cardio-vasculaires, maladies qui n’ont pas de souci à se faire puisqu’ensuite elles sont prises en charge par l’industrie pharmaceutique ! L’information n’est donc pas toujours transparente. Ensuite, après avoir été informé, chacun fait ce qu’il veut et reste libre mais à condition de pouvoir faire ce choix ».

Voici le passage coupé sur le Pr Willett

« Au cours de l’émission, le Pr Debré fait les remarques suivantes à propos du Pr Walter Willett (Harvard), dont les recommandations sont reprises dans notre ouvrage : "On prend quelqu’un, on l’institue hyper spécialiste de la question, on s’associe à lui et on dénonce. (...) On cite quelqu’un qu’on ne connaît pas, on l’institue le référent." J'avais répondu ceci au Pr Debré, mais mes propos ont disparu au montage 1. Walter Willett est mondialement connu des nutritionnistes et des épidémiologistes;
2. C’est un chercheur totalement indépendant, sans financement aucun des industriels;
3. Il dirige les deux études épidémiologiques les plus anciennes et les plus importantes au monde puisqu'elles portent sur plus de 120 000 personnes depuis plus de 20 ans;
4. Ces travaux, publiés dans les plus grands journaux médicaux ont permis de mieux connaître l'impact de l’alimentation sur la santé.
5. Thierry Souccar est en contact direct et régulier avec ce chercheur. »

Voici le passage coupé sur la formation continue des professions médicales

« Certes, il est important que les professions de médicales et de santé puissent bénéficier d’une formation continue déconnectée de l’industrie pharmaceutique. Mais, il faut reconnaître que cette industrie a joué cette fonction car l’Etat s’est désengagé jusqu’alors de ce rôle. Or, justement il ne faudrait pas que l’on tombe dans le même problème avec l’industrie agro-alimentaire qui viendrait former les professions de santé à la prévention santé (mise en avant actuellement). Outre la formation des professions de santé, c’est aussi une véritable éducation à la santé qu’il faut instaurer auprès des Français, afin de leur apprendre à mieux gérer leur santé et ne plus raisonner uniquement en terme de maladie. Preuve en est, le Conseil économique et social a élaboré un rapport en novembre 2003 sur la prévention en matière de santé, travail dans le cadre duquel j’ai été modestement auditionnée par le rapporteur Guy Robert. Ce rapport conclut à la nécessité de créer une profession d’éducateur de santé.
Lorsque l’on aborde le trou de la Sécurité sociale, c’est prendre le problème par le petit bout de la lorgnette que de n’envisager de solution qu’en aval alors que c’est en amont, sur deux axes essentiels, qu’il faut intervenir. Il faut revoir le fonctionnement de la société sur deux points cruciaux : la prévention environnementale et la prévention nutritionnelle. La Déclaration de Paris du 7 mai 2004 énonce clairement les liens entre pollution et santé, tandis que l’alimentation est un facteur clé de prévention des maladies. Tant que l’Etat ne prendra pas les mesures concrètes qui s’imposent dans ces domaines, toute politique de santé sera vouée à l’échec. »

Voici le passage coupé sur les liens entre experts et industrie

« Charles Pépin m’ayant interpellée sur l’existence ou non de solutions quant au rôle de l’industrie agro-alimentaire dans les problèmes de santé publique, j'ai répondu qu'il y avait des solutions et que la première d’entre elle est d’appliquer la loi existante. Depuis mars 2002, ai-je indiqué, la loi prévoit que les sachants, experts et scientifiques, lorsqu’ils s’expriment en public tant oralement que par écrit sur des produits de santé, doivent indiquer si ils ont des liens. Et bien, depuis mars 2002 la loi n’est pas appliquée ».

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