Les racines de la violence

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 02/05/2006 Mis à jour le 17/02/2017
Des enfants martyrisés par leurs parents : l’actualité ne nous a pas épargné ces récits d’une violence quasi-quotidienne, dont seraient victimes chaque année en France plusieurs centaines de garçons et filles. Alors il faut bien se demander pourquoi. .

8 octobre 2003

Pour expliquer la violence et l’agression, il y a d’abord les hypothèses biologiques. Des travaux conduits par Markku Linnoila, qui fut le directeur scientifique de l’Institut national des Etats-Unis sur l’abus d’alcool et l’alcoolisme (NIAAA) ont mis en lumière le rôle d’un messager chimique du cerveau, la sérotonine. Au début des années 1990, Linnoila a avancé l’idée, toujours d’actualité, qu’une sérotonine basse est associée à une violence impulsive, incontrôlée - par opposition à la violence de sang-froid, préméditée.

On trouve des associations similaires chez les rongeurs, les oiseaux, les crustacés et le singe macaque rhésus, comme l’a mis en évidence John Dee Higley (Instituts nationaux de la Santé, Poolesville, Maryland). Chez le singe, en effet, les individus qui ont une sérotonine basse sont les plus violents.


Selon Matti Virkkunen (Université d’Helsinki), chez l’homme, l’hérédité expliquerait 50% de la variance de la sérotonine entre les individus. Une partie d’entre nous hériterait donc d’une susceptibilité à produire moins de sérotonine. Mais les expériences précoces fixeraient le niveau réel du neurotransmetteur. Chez le singe, les enfants élevés seuls ont une sérotonine plus basse que ceux qui quittent le foyer familial une fois mûrs. En Finlande, Matti Virkkunen a aussi vérifié que des taux de sérotonine bas sont liés à l’absence du père, et à la présence de frères à la maison.

Que la sérotonine soit réellement le messager chimique-clé dans les comportements d’agression reste à démontrer. Mais les facteurs environnementaux qui peuvent conduire à un comportement violent commencent d’être identifiés. Sérotonine ou pas, l’absence de père au foyer, est considérée comme l’un de ces facteurs de risque.

Une étude publiée très récemment a remis en selle les effets de la violence télévisuelle. Dans cette étude, on a examiné la relation entre la vision de scènes violentes à la télévision entre 6 et 10 ans et le comportement 15 ans plus tard. Les conclusions semblent sans appel : l’exposition infantile à la violence dans les médias prédit le comportement agressif à l’âge adulte. (1)

Selon le Dr Rowell Huesmann (université du Michigan), l’agressivité de l’enfance à l’âge adulte est un trait presque aussi stable que l’est le quotient intellectuel. « Tout ce qui rend un enfant plus agressif, dit-il, augmente le risque que cet enfant se comportera de manière agressive à l’âge adulte. » Les enfants sont plus sensibles à la violence télévisuelle entre les âges de 2 et 11 ans. C’est probablement à ce moment que les parents doivent exercer la plus grande vigilance. La présence des parents, leurs explications, la discussion de ce qui a été vu diminuent l’effet pro-agressif des images, qui affecte du reste de la même manière garçons et filles.

« Le comportement, me disait il y a quelques années Jean-Louis Gariépy (université de Caroline du Nord), est contraint, mais pas déterminé par les gènes. » La violence n’est pas une fatalité biologique ou héréditaire. Parce qu’elle est modulée à chaque instant, et surtout dans l’enfance, par l’environnement, il serait bon que l’on identifie, de la manière la plus objective et la plus scientifique possible les facteurs sur lesquels la société peut exercer un contrôle. La violence télévisuelle et celle des jeux vidéos en font peut être partie.

(1) Huesmann L : Longitudinal relations between children’s exposure to TV violence and their aggressive and violent behavior in young adulthood : 1977-1992. Dev Psychol 2003, 39(2) : 201-221.

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