Les pesticides à l’origine de certains cancers

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 08/02/2010 Mis à jour le 06/02/2017
Les agriculteurs exposés à certains pesticides présentent un risque plus élevé de développer un cancer du système immunitaire, selon les résultats d’une étude française.

L’équipe de Bertrand Nadel, du Centre d’immunologie de Marseille Luminy, a établi un lien de cause à effet entre l’exposition aux pesticides et certains cancers de sang. Les agriculteurs développent ces types de cancer en plus grand nombre que les autres professionnels. Ces résultats, publiés en juin 2009 dans le Journal of Experimental Medicine, ont été présentés lors d'un colloque organisé à Marseille, vendredi 5 février 2010, par la Ligue contre le cancer.

Les chercheurs ont suivi pendant 5 ans 144 agriculteurs exposés aux pesticides. Ils ont tenu compte du fait que les facteurs de risque ne sont pas les mêmes pour tous les agriculteurs. Tout dépend du type de pesticide employé, de la taille des exploitations, du mode d’épandage et des doses utilisées.

En novembre 2008, les chercheurs Bertrand Nadel et Sandrine Rouland avaient dévoilé leurs premiers travaux, montrant un risque plus élevé de cancers lymphatiques chez les agriculteurs (1).

Les agriculteurs présentent plus fréquemment une altération chromosomique connue pour être une première étape vers la cancérisation de cellules lymphocytaires. Il s’agit d’une translocation, qui conduit à un échange de portions d'ADN entre les chromosomes 14 et 18. Cette mutation génétique entraîne la surexpression d’un gène responsable de la synthèse d’une protéine inhibant la mort cellulaire. D’où une survie de cellules normalement vouées à mourir.


Dans la population générale, cette anomalie est présente dans moins d’une cellule sur un million. « Les agriculteurs exposés aux pesticides développent dans leur génome 100 à 1000 fois plus de cellules anormales, qui peuvent ensuite éventuellement se transformer en lymphome folliculaire », constate Bertrand Nadel.

Le lymphome folliculaire, un type de cancer du sang, est en progression au niveau national, de 3 % à 4 % par an depuis quelques décennies. Ce cancer représente la cinquième cause de mortalité par cancer en France.

L’analyse précise des cellules altérées montre que certaines d’entre elles ont déjà les caractéristiques des cellules du lymphome et pourraient ainsi constituer de réels précurseurs tumoraux. Le repérage anticipé de ces cellules doit permettre à l’avenir un « dépistage plus précoce des individus à risque et donc un traitement moins invasif, sans chimiothérapie par exemple et avec des chances de rémission plus élevées » explique Bertrand Nadel.

La France est le premier utilisateur de pesticides au sein de l’Union Européenne (herbicides, insecticides et fongicides) et le troisième dans le monde, après la Chine et les États-Unis.

Lire également notre dossier Prévenir le cancer.

(1) Agopian J, Navarro JM, Gac AC, Lecluse Y, Briand M, Grenot P, Gauduchon P, Ruminy P, Lebailly P, Nadel B, Roulland S. Agricultural pesticide exposure and the molecular connection to lymphomagenesis. J Exp Med. 2009 Jul 6;206(7):1473-83. Epub 2009 Jun 8. 

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