Inquiétude sur les laits pour bébés

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 28/04/2006 Mis à jour le 10/03/2017
Des analyses effectuées par Sciences et Avenir sur plusieurs formules infantiles révèlent la présence de composés indésirables, dans des proportions qui vont de 1 à 100 selon les marques. Aucune réglementation n’en limite la teneur…

Dans le numéro de mars de Sciences et Avenir, qui paraît aujourd’hui en kiosques, je me suis intéressé à la qualité des préparations infantiles : laits en poudre, laits liquides. Ont été analysées 16 marques disponibles en France et constaté, selon les sources, non seulement des modifications importantes des protéines laitières d’origine, mais aussi la présence de composés indésirables issus du traitement thermique subi par ces formules infantiles.
Les parents seront peut-être surpris d’apprendre que les laits qu’ils donnent à leur bébé ont subi des altérations. En fait, plusieurs laboratoires européens et américains pistent depuis des années les changements provoqués dans les aliments par la chaleur. En France, la spécialiste s’appelle Inès Birlouez-Aragon, un chercheur de l’INAPG (Institut national agronomique Paris-Grignon). « Il y a dix ans, raconte-t-elle, je travaillais sur le vieillissement des protéines biologiques et en particulier sur les origines de la cataracte. Pour provoquer un vieillissement, on incubait les cristallins avec un mélange de vitamine C et de fer. J’ai été ensuite conduite à m’intéresser aux protéines alimentaires. Quand les premiers laits de croissance sont apparus, j’ai été interpellée par la présence de fer et de vitamine C à dose élevée. »
A l’époque, en effet, plusieurs nutritionnistes avaient préconisé l’ajout de grandes quantités de fer et de vitamine C (pour favoriser son assimilation) aux laits de croissance dans un souci de prévention de l’anémie.


Des composés suspects et mal connus

Pour fabriquer des laits pour bébés, les industriels utilisent du lait de vache qui contient 1,5 à 2 fois plus de protéines que le lait maternel. Il est enrichi en fer et vitamine C. Ces ingrédients sont homogénéisés et pasteurisés. Le lait en bouteille reçoit une stérilisation UHT (130 à 140 °C pendant 2 à 3 secondes). Le lait en poudre subit un séchage par atomisation (70 à 80 °C).
Dans les deux cas, l’application de la chaleur à un milieu formé de protéines, de sucre, de graisses polyinsaturés, de vitamine C et de fer engendre des réactions indésirables. La principale est la réaction de Maillard qui comprend des étapes de réactions oxydatives. Elles ont deux conséquences majeures : d’une part elles modifient la structure physico-chimique des protéines du lait infantile. D’autre part, elles font apparaître des composés suspects et mal connus qu’on appelle produits de glycation.
Ces produits de glycation ont-ils des effets sur l’organisme ? Les experts que j'ai interrogés sont partagés. Certains estiment qu’ils ne posent pas de problème chez l’enfant dont les reins sont en bonne santé. Pour d’autres en revanche, ces composés pourraient déclencher une inflammation chronique à bas bruit, avec à la clé des troubles de l’immunité sur le long terme.
Quoi qu’il en soit aucune réglementation ne s’applique aujourd’hui à ces formules, du point de vue de leur teneur en produits de glycation, et ce thème n’est pas à l’ordre du jour de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa). L’analyse que vous lirez dans Sciences et Avenir vise à ouvrir le débat sur cette question trop longtemps négligée.

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