Vin et santé : comment l’Institut du cancer nous a menti

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 11/03/2009 Mis à jour le 10/03/2017
Contrairement à ce qu’affirme l’Institut National du Cancer, le vin ne donne pas le cancer dès le premier verre. Nos révélations sur une opération de désinformation d’Etat.

L’étude sur l’alcool, le vin et le cancer que le Dr Dominique Lanzmann-Petithory a rendu publique le 11 mars 2009 illustre hélas parfaitement les dérives et les méfaits d’un certain réductionnisme scientifique d’Etat. Que dit cette étude ? Que les Français qui consomment du vin ont moins de risque de cancer que ceux qui n’en consomment pas, et que les autres formes d’alcool augmentent au contraire ce risque. Des conclusions qui prennent donc largement à contre-pied le message délivré moins d’un mois plus tôt à grands renforts de communiqué de presse par l’Institut national du cancer (Inca), selon lequel « le risque de cancer augmente dès le premier verre de vin. » Les auteurs du rapport de l’Inca et les autres intervenants dans ce dossier désormais lamentable – ne pouvaient pas ignorer les conclusions de l’étude du Dr Lanzmann-Petithory, connues depuis la fin de l’année 2007. Pourquoi n’en ont-elles pas tenu compte ? Pourquoi les résultats de l’étude Lanzmann-Petithory n’ont-elles été publiées qu’en mars 2009, après que le tir de barrage se soit déchaîné contre le vin ? Voilà autant de questions que les médias seraient bien inspirés de poser à la Direction générale de la santé.

Restent les faits, et ils sont inquiétants non seulement pour l’équilibre de l’information, mais aussi pour la santé publique. Certes une étude isolée sur les bienfaits du vin ne fait pas le printemps : il serait absurde de brandir les résultats présentés par le Dr Dominique Lanzmann-Petithory comme la preuve que le vin est bon pour la santé. Seule la synthèse des données disponibles peut nous aider à y voir clair. Les auteurs du rapport de l’Inca assurent que la conclusion que le vin donne le cancer figure dans l’analyse des résultats de la littérature scientifique, en particulier dans le rapport du World Cancer Research Fund (WCRF) de 2007. C’est un mensonge. Nous le montrons dans l’enquête que nous publions sur LaNutrition.fr, à partir des données figurant dans le rapport du WCRF, complétées des études publiées depuis : contrairement au risque posé par d’autres formes d’alcool, la consommation modérée et quotidienne de vin dans le cadre d’un régime équilibré (riche en folates chez la femme) n’expose vraisemblablement pas au cancer et pourrait même dans de nombreux cas réduire ce risque. Ces informations étaient à la disposition des rédactrices du fameux rapport de l’Inca. Pourquoi n’ont-elles pas opéré de distinction entre les formes d’alcool et leur mode de consommation ? Pourquoi n’avoir pas rapporté les données sur la mortalité globale, qui trouvent que celle-ci est plus faible chez les petits consommateurs d’alcool que chez les abstinents ? Les auteures du rapport de l’Inca – une chercheuse sans grande expérience de l’épidémiologie, une thésarde, une infirmière et une documentaliste – étaient-elles à la hauteur des enjeux ? Ont-elles été instrumentalisées par le pouvoir politique ou certains groupes de pression et associations très influents au profit d’un dessein qui les dépassait ?

Ce n’est pas la première fois que l’Inca se distingue par des procédés qui relèvent plus de la propagande que de l’analyse scientifique objective. La campagne que cette institution mène pour le dépistage de masse du cancer du sein par mammographie travestit les résultats objectifs des études conduites sur les bénéfices et les inconvénients de ce dépistage, et viole les règles d’information équitable des populations concernées. Ses messages anti-soleil et pro-crèmes solaires à l’approche de l’été ne reflètent pas plus l’état réel des connaissances scientifiques. Sur ces questions de santé publique, la vigilance des médias, des professions médicales et para-médicales et bien sûr du public est une exigence de tous les instants.

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