Le glyphosate pourrait modifier la flore intestinale

Par Marie-Céline Ray - Journaliste scientifique Publié le 06/06/2018 Mis à jour le 06/06/2018
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Alors que le parlement français a décidé  de ne pas voter l’interdiction du glyphosate, une étude révèle que le pesticide controversé modifie le microbiote intestinal de rats, même à faibles doses.

Le glyphosate est le composé actif du Roundup de Monsanto, un herbicide utilisé depuis les années 1970 et dont l’utilisation a beaucoup augmenté au cours des dernières décennies. La molécule a été classée comme « cancérogène probable » par le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer). En novembre 2017, l’Union Européenne a renouvelé l’autorisation d’utilisation du glyphosate pour cinq ans et en mai 2018, le parlement français a renoncé à l’interdire.

Du point de vue moléculaire, les herbicides à base de glyphosate agissent sur une voie enzymatique présente chez les plantes : la voie du shikimate. Le glyphosate inhibe une enzyme qui participe à la fabrication des acides aminés aromatiques. Les bactéries possèdent une  enzyme, appelée MurA, qui catalyse une réaction équivalente. Comme MurA est importante à la croissance et à la survie des bactéries, c’est la cible d’antibiotiques, comme la fosfomycine. Or le glyphosate peut occuper un site de liaison de MurA et avoir une activité antibactérienne. Comme notre organisme compte de nombreuses « bonnes » bactéries dans le microbiote intestinal, les produits à base de glyphosate pourraient agir comme des antibiotiques pour la flore intestinale.

Lire aussi sur ce sujet : Le Roundup favoriserait la résistance aux antibiotiques

Ce que montre l’étude

Cette étude pilote a été réalisée par l’institut Ramazzini, un organisme indépendant qui finance ses travaux par crowdfunding. Différents groupes de recherche, italiens, chinois et américains, ont participé. Trois articles paraissent dans la revue Environmental Health et l’un porte sur l’action du glyphosate sur le microbiome.

Dans cette étude, les rats ont été exposés au glyphosate dès leur vie prénatale (in utero, à partir du 6e jour de gestation), et jusqu’à 13 semaines après leur sevrage. A l’échelle humaine, cette durée d’étude correspondrait à la période allant de la vie embryonnaire aux 18 ans. Les scientifiques ont utilisé de l’eau contenant des doses de glyphosate jugées acceptables par les autorités sanitaires américaines (1,75 mg par kg et par jour).

Les chercheurs ont étudié les feces des animaux et observé que le glyphosate à faibles doses  changeait la composition du microbiote. A un âge correspondant à la période de la pré-puberté, les bactéries Prevotella étaient plus abondantes, tandis que les bactéries Firmicutes (Lactobacillus) étaient réduites chez les rats exposés au Roundup et au glyphosate.

Des modifications ont aussi été notées dans le développement sexuel des animaux, comme l’explique Daniele Mandrioli, l’une des auteurs : « Nous avons constaté une augmentation de la distance ano-génitale qui pourrait indiquer une perturbation du niveau normal des hormones sexuelles. »

Forcément ces travaux sont contestés par Monsanto. Scott Partridge, vice-président de la stratégie globale de l’entreprise, s’en est pris à l’Institut italien qui a réalisé ces recherches : « L'Institut Ramazzini est une organisation activiste qui souhaite soutenir une interdiction sur le glyphosate. » Et il conclut : « Ce n'est pas une véritable recherche », avant de rappeler : « Toutes les recherches à ce jour ont démontré qu'il n'y a pas de lien entre le glyphosate et le cancer. »

Cette étude demande à être confirmée par des travaux plus importants. La campagne de crowdfunding se poursuit pour les financer.

Que faire pour limiter son exposition au glyphosate ?

  • Bien laver ses fruits et légumes et les choisir de préférence issus de l'agriculture biologique.
  • Si vous achetez des végétaux de l'agriculture conventionnelle, lavez bien vos fruits et légumes avant de les manger ou de les préparer dans une eau avec un peu de sel (2%) ou de vinaigre blanc (10%). On pourrait ainsi éliminer jusqu'à 75-80% des résidus de pesticides grâce à un bon lavage.
  • Eviter d'uiliser des produits contenant du glyphosate au jardin.

Pour aller plus loin : Sang pour sang toxique et 10 dangers avérés des pesticides

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