Des médecins inventent un nouveau trouble mental de l'enfant : "la sélectivité alimentaire"

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 04/08/2015 Mis à jour le 10/03/2017
Quel parent n’a pas eu à subir les caprices alimentaires de son enfant ? Mais pour des médecins américains ce comportement a priori normal et passager pourrait entraîner des complications pour la santé de certains enfants, même lorsqu’il est modéré ! A quand les médicaments ?

Si tous les enfants se montrent plus ou moins difficiles à table, ce comportement, même modéré, pourrait s’avérer dangereux pour leur santé. C’est la conclusion très sérieuse d’une étude américaine qui s’est penché sur «la sélectivité alimentaire» de 917 enfants entre 2 et 6 ans.

Au cours de cette étude, les enfants ont été soumis à des entretiens diagnostics révélant leurs comportements alimentaires, sociaux et psychologiques. Deux degrés pathologiques de sélectivité alimentaire se sont distingués : les formes «sévère» et «modérée», respectivement 3% et 18% des enfants interrogés. Parmi-eux, tous présentent des symptômes psychiatriques déclarés ou potentiels (anxiété, dépression, hyperactivité, déficit d’attention…). En revanche la forme sévère de la sélectivité alimentaire est liée à des symptômes plus graves. « Les repas de certains enfants sont devenus si limités ou sélectifs qu’ils commencent à causer des problèmes » s’alarme un des auteurs de l’étude, Nancy Zucker du Duke Center for Eating Disorder.

Lire le guide alimentaire conso de LaNutrition.fr : Le Bon choix pour vos enfants (lire un extrait ICI  >>)

Ces découvertes, pensent les auteurs de l'étude, vont permettre aux soignants de savoir à quel moment un trouble de l’alimentation doit être pris en charge. Les auteurs de l’étude suggèrent une intervention dès le stade « modéré ». L’objectif étant de pouvoir diagnostiquer ce comportement en tant que «trouble de la Prise Alimentaire Evitant/Restrictif» (Avoidant/Restrictive Food Intake Disorder ou ARFID), inclus dans la dernière version du Manuel Diagnostic et Statistique des Trouble mentaux (DSM-5). Si quelques thérapies sont proposées, elles ne suffisent souvent pas à contrecarrer l’hypersensibilité des enfants difficiles. Chez ces derniers, en effet, la moindre odeur d’un aliment leur est déjà insupportable. Ainsi pour Zucker il y a nécessité de trouver de nouveaux moyens d’intervention adaptés à la tranche d’âge des enfants :

« Il est évident que les enfants ne maintiendront pas tous une sélectivité alimentaire chronique à l’âge adulte […] Mais parce que ces enfants voient leur santé et leur bien-être atteints, nous devons commencer à développer des moyens pour aider les parents ; il faut aussi que les docteurs sachent quand et comment intervenir ».

Cependant la création de ce nouveau trouble mental illustre aussi une certaine propension de la médecine psychiatrique américaine à vouloir diagnostiquer et peut-être médicaliser ensuite des comportements qui sont constitutifs de la nature humaine et sont souvent passagers. 

Lire aussi : Hyperactivité de l'enfant : traiter la cause, pas les symptômes.

Source 

Duke University Medical Center. "Even moderate picky eating can have negative effects on children's health." ScienceDaily. ScienceDaily, 3 August 2015. <www.sciencedaily.com/releases/2015/08/150803083343.htm>.

A découvrir également

Back to top