Jean Daydé : « Je suis contre la théorie du complot autour des OGM »

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 21/04/2008 Mis à jour le 10/03/2017
Jean Daydé est Directeur de la Recherche de l’Ecole d’Ingénieurs de Purpan, enseignant-chercheur au sein du Laboratoire d’Agrophysiologie et membre de l’Unité mixte de recherche Inra / Ecole d’Ingénieurs de Purpan (équipe Micronutriments et Santé). Il anime aussi le Pôle Aliment, Sécurité Sanitaire et Santé de Midi Pyrénées (PA3S), qui est un consortium de recherche et d’innovation autour de l’alimentation : « du risque au bénéfice ».

Quel est votre lien avec les OGM ?

C’est un outil de travail que nous employons dans la recherche pour mesurer, comprendre et maîtriser les effets de certains gènes dans les voies de synthèse des protéines et des micronutriments. Nous travaillons sur du matériel végétal, le blé, le soja, le tournesol.

Pensez vous que l’on maîtrise les conséquences de la transgénèse ?

La technique la plus utilisée reste celle que l’on maîtrise le mieux, à savoir l’utilisation de la bactérie Agrobacterium tumefaciens, microorganisme du sol et parasite de la plante qui possède un système naturel de transfert de gènes aux cellules végétales. Contrairement à la technique de la biolistique que l’on utilise de moins en moins, on maîtrise correctement la localisation de l’insertion du gène. Evidemment, je ne nie pas qu’il n’y ait aucun risque d’interférence avec d’autres gènes. Mais je pense que si l’insertion du transgène perturbe le matériel génétique de l’organisme, les conséquences sont facilement visibles et dans ce cas, il est écarté. Les scientifiques ne sont pas des sorciers. Nous cherchons toujours à faire du mieux possible.

Pour vous, existe-t-il des risques pour la santé ?

Le risque 0 n’existe pas… mais si vous regardez toutes les études qui ont été faites, très peu évoquent un risque avéré et, en général, leurs résultats sont controversés. Je suis contre la « théorie du complot » qui voudrait faire croire que l’on empêche les chercheurs de publier leurs études et que c’est pour cela qu’il n’y en a pas beaucoup remettant en cause les OGM. De nombreuses études toxicologiques réalisées sur des animaux montrent qu’il n’y a pas de risque connu. On reproche souvent à ces expériences de n’être pas assez longues dans le temps mais je rappelle que l’essai toxicologique de référence se déroule sur 90 jours, comme toutes les études qui ont prouvé l’innocuité des OGM. On peut sans doute considérer qu’un test de 3 mois sur un rongeur de 380g équivaudrait à un test de plusieurs années sur l’homme.

Aux Etats-Unis, le nombre de cas d’allergies, notamment dues au soja, augmente chaque année, pensez vous que cela puisse être lié aux OGM ?

Le soja est connu pour contenir des protéines allergènes. Mais je ne pense pas que l’on puisse corréler les allergies comme conséquences directes de la consommation d’OGM, consommation qui concerne avant tout l’alimentation animale. L’augmentation des cas détectés fait sans doute suite à l’augmentation de la consommation de produits à base de soja, réputé pour être un aliment riche en protéines et pourvu d’effets santé positifs.

Les firmes productrices d’OGM agro-alimentaire se basent sur le principe de l’équivalence en substance. D’après vous, est-ce un bon moyen de maîtriser les risques ?

C’est un concept très positif dans le sens où il permet précisément de décrire l’ensemble de l’expression moléculaire des gènes d’une plante génétiquement modifié. Grâce à ce long listing de molécules, on peut vérifier que le transgène n’a pas modifié en substances la plante hôte. Aujourd’hui en France, ce concept est à la base de l’homologation des OGM. Mais malheureusement, il sert souvent d’argument pour faire dire aux anti-OGM qu’il permet d’autoriser n’importe quelle nouvelle plante GM. Mais c’est remettre en question le travail des scientifiques. Cela a même conduit à la démission de l’ancien président de la Commission du Génie Biomoléculaire. En 1997, la CGB avait conseillé l'autorisation de cultures de maïs OGM. Le 12 février 1997, le gouvernement a choisi de ne pas suivre l'avis de la CGB qui n'est que consultatif. Le lendemain, Axel Kahn a démissionné en signe de protestation, manifestant ainsi contre la remise en question du travail des chercheurs.

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