Nous mangeons tous du plastique sans le savoir

Par Priscille Tremblais - Journaliste scientifique Publié le 21/11/2018 Mis à jour le 08/04/2022
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Si la pollution de l’environnement par le plastique est maintenant bien étudiée, celle de l'humain via les aliments est moins connue. Trois études récentes montrent que nous ingérons tous des particules de plastique via l'alimentation qui se retrouvent dans le sang. 

Pourquoi c'est important

D’une production de 30 millions de tonnes de plastique en 1970, on est passé à 322 millions de tonnes en 2015. Or ce matériau, dérivé du pétrole, est très mal recyclé. Il s'accumule ainsi dangereusement dans l'environnement. Et si la pollution de la nature par le plastique est bien étudiée et connue, chez l'homme, en revanche, les effets de cette pollution restent peu évalués même si de multiples études toxicologiques indiquent un risque pour la santé humaine quand des particules de plastique sont ingérées. 

Les études

Selon une petite étude de l'université de Vienne, dévoilée lors de la rencontre européenne annuelle des gastro-entérologues fin octobre 2018, il y a de fortes chances pour que les selles de chacun d'entre nous contiennent des microparticules de plastique. Le Dr Philipp Schwabl et son équipe ont en effet analysé les selles de 8 volontaires habitant chacun un pays différent de l'Union européenne, et âgés entre 33 et 65 ans.

Résultat : chaque échantillon de selles contenait des microparticules de plastiques, avec environ 20 particules par 85 g.  Plus de 95 % des particules retrouvées provenaient de plastiques utilisés dans les emballages des aliments : du polypropylène (issu des bouchons de bouteille par exemple), du polyéthylène téréphtalate (PET) utilisé dans les bouteilles de boisson, du polystyrène contenu dans les ustensiles et les gobelets en plastique et du polyéthylène des sacs en plastique...

Le Dr Schwabl a trouvé ces résultats proprement « ahurissants ». « Je crois qu'essayer de réduire l'utilisation du plastique et des aliments emballés dans du plastique pourrait être bénéfique pour la nature et pour nous », a-t-il déclaré.
Cependant, selon le Dr Schwabl comme d'autres experts, il est trop tôt pour dire si ces particules de plastique pourraient nuire à la santé humaine.

Lire aussi : Déchets plastiques : des idées créatives pour les recycler

Une autre étude , américaine cette fois, publiée en avril 2018 a recherché la présence de particules de plastique dans 159 échantillons d'eau du robinet, 12 marques de bière et 12 marques de sel marin. Les scientifiques ont trouvé des microparticules de plastique dans 81% des échantillons d'eau analysés (entre 0 et 61 particules par litre). De même des microparticules ont été retrouvées dans toutes les marques de bières et de sel marin analysées, à raison de 4 particules par litre de bière en moyenne et de 212 particules par kilo de sel en moyenne. Pour les chercheurs, si on se base sur la consommation alimentaire officielle de la population, chaque personne ingérerait en moyenne 5800 microparticules de plastique par an issues de ces trois sources alimentaires seulement, provenant essentiellement de l'eau du robinet.

Des microplastiques dans le sang

Nous inhalons et ingérons chaque jour des morceaux microscopiques de plastique. Mais jusqu’à présent, les scientifiques ne savaient pas si ces particules se retrouvaient dans le sang. C’est chose faite avec une étude rapportant que des particules de plastique ont été trouvées dans le sang de plus des trois quarts (17 sur 22) de volontaires néerlandais. Les chercheurs ont analysé les échantillons de sang pour rechercher des traces de la présence de polymères. Le plus retrouvé était le polyéthylène téréphtalate (PET), un type de plastique couramment utilisé dans la fabrication de bouteilles de boisson, d’emballages alimentaires et de tissus, et même de rouge à lèvres. Le deuxième plastique le plus retrouvé dans les échantillons était le polystyrène, utilisé pour fabriquer une grande variété de produits ménagers courants et des emballages alimentaires jetables du type de ceux qu’on trouve dans les fast-foods. Le troisième plastique le plus susceptible d’être trouvé dans le sang des sujets était encore une fois le polyéthylène, un matériau régulièrement utilisé dans la production de peintures, de sacs à provisions, d’emballages en plastique et de bouteilles de détergent. La concentration moyenne de particules de plastique retrouvées dans le sang était de 1,6 microgrammes, soit l’équivalent d’une cuillère à café de plastique dans dix grandes baignoires, selon les chercheurs. Les chercheurs se demandent si les microplastiques – ou des particules plus petites appelées nanoplastiques – pourraient affecter le cerveau, le système digestif, les reins et d’autres parties du corps.

En pratique

Réduire la production d'emballages plastiques est une nécessité pour notre environnement mais aussi pour notre santé. Dans la mesure où ce que nous ingérons provient en grande partie de l'environnement, et que ce dernier est pollué, notre alimentation en vient à contenir aussi du plastique. 

Le plastique reste une matière mal recyclée, même dans les pays développés disposant d'infrastructures de recyclage bien établis. Ainsi, l'Europe a recyclé 26 % des plastiques jetables en 2012, contre 8,8 % au cours de la même année pour les Etats-Unis. La seule solution viable pour l'environnement comme pour les êtres vivants reste d'en produire moins. Et tout le monde peut participer à cette réduction.

Chacun, à son niveau, peut agir pour réduire les déchets plastiques. Pour vous aider, deux guides pratiques : Zéro plastique, Zéro toxique et Famille Zéro Déchet - Ze guide

Références
  1. Leslie AH. Discovery and quantification of plastic particle pollution in human blood. Environment International, 24 mars 2022.

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