Une cuillère à café de sel en moins pour sauver 4 millions de vies

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 02/12/2009 Mis à jour le 17/02/2017
Conseils

Une nouvelle étude suggère qu’en réduisant notre consommation de sel de 5 grammes par jour on pourrait éviter des millions de morts par maladie cardiovasculaire.

Comment éviter plus d’un millions de morts par infarctus et près de trois millions de morts pas maladies cardiovasculaire chaque année dans le monde ? Simplement en consommant moins de sel. C’est la conclusion d’une étude italienne publiée le 25 novembre dans le British Medical Journal (1).

 

40 ans d’études sur le sel passés en revue

L’équipe du professeur Pasquale Strazullo, professeur de médecine à l’université de Naples, a passé en revue les études portant sur le lien entre consommation de sel et mortalité cardiovasculaire entre 1966 et 2008. Au total les chercheurs ont analysé 13 études comprenant plus de 177.000 participants aux Etats-Unis, en Finlande, au Japon, aux Pays-Bas, en Ecosse et à Taiwan. Selon les études la consommation de sel des volontaires était évaluée par une surveillance de leur alimentation, par des questionnaires ou encore par un dosage urinaire.

 

Et vous, combien de sel consommez-vous ?

Parce que l’essentiel du sel que vous consommez provient directement des aliments industriels, il est souvent difficile d’évaluer sa consommation de sel. Selon les auteurs de l’étude, la consommation de sel moyenne dans la plupart des pays industriels est proche de 10 à 12 grammes, plus du double de la consommation limite fixée par l’OMS à 5 grammes par jour.

 

Selon les études, les volontaires ont été suivis pendant 3,5 à 19 ans au cours desquels plus de 5000 infarctus et environ autant de maladies cardiovasculaires ont été recensées. En mettant en parallèle ces évènements avec la consommation de sel de chacun, les chercheurs ont pu calculer l’augmentation du risque cardiovasculaire causée par le sel. Résultat : si l’on consomme 5 grammes de sel en trop par jour, le risque d’infarctus augmente de 23 % et le risque de maladie cardiovasculaire augmente de 17%.

 

Pourquoi le sel augmente-t-il la mortalité cardiovasculaire ? Parce qu’il favorise l’hypertension, elle-même facteur de risque d’infarctus et de maladies cardiovasculaires. Selon les auteurs de cette nouvelle étude, réduire sa consommation de sel de 6 grammes par jour permettrait de réduire la pression systolique de 7 mm HG et la pression systolique de 4 mm Hg.

 

Moins de sel, pas moins de goût

Si vous êtes un accro de la salière et que vous redoutez de trouver vos repas insipides en réduisant la quantité de sel dans votre assiette, rassurez-vous. Des chercheurs américains ont montré que la diminution des quantités de sel dans nos assiettes pouvait se faire sans frustration (2). Les chercheurs ont recruté 412 adultes à risque d’hypertension assignés à un faible apport en sel : un groupe a consommé chaque jour 3,5 g de sel, un autre 2,3 g et le dernier 1,2 g. Les chercheurs ont ensuite demandé aux volontaires s’ils avaient eu du mal à suivre ce régime pauvre en sel. Verdict : moins de sel, c’est facile. « Les gens arrivent avec l’a priori qu’un régime pauvre en sel sera insipide, expliquent les auteurs, pourtant les patients des groupes à faible apport en sel ont jugé leur diète tout à fait acceptable. Le goût pour les repas salés découle d’une habitude. On peut très bien se déshabituer et « désapprendre » à aimer le sel ».

 

Sauver 4 millions de vies

 

Les auteurs de cette étude estiment qu’en diminuant de 5 grammes par jour, l’équivalent d’une cuillère à café, notre consommation de sel, on pourrait éviter 1,25 millions de décès par infarctus et presque 3 millions de morts par maladies cardiovasculaires ! Facile non ? Malheureusement non. Parce que pour l’essentiel le sel que vous consommez ne provient pas de la pincée que vous rajouter dans votre assiette, mais des aliments industriels. Des plats préparés, du pain, des céréales du petit-déjeuner, des soupes, des viennoiseries… Pourquoi les industriels rajoutent-ils du sel dans tant de produits ? « Parce qu’au-delà de son goût, le sel possède des propriétés technologiques intéressantes pour les industriels. Le sel permet de rehausser les saveurs sucrées tout en inhibant les goûts amers, explique Pierre Meneton, chercheur à l’Inserm. C’est pour ça qu’on le retrouve dans les pâtisseries, les viennoiseries, les glaces, le chocolat et la plupart des produits sucrés. Le sel est un « cache-misère », il permet de donner du goût à peu de frais à des produits de qualité médiocres. »

Le chercheur se bat depuis des années contre l’industrie agro-alimentaire (lire l’article "Excès de sel : comment tout a commencé") et ses positions en faveur d’une diminution conséquente de notre consommation de sel lui ont même valu un procès de la part du Comité des Salines de France (Lire l’article "Pierre Meneton : un chercheur attaqué par l'industrie du sel"). Les pouvoirs publics reconnaissent aujourd’hui qu’un excès de sel est néfaste pour la santé, pourtant aucune mesure n’a été prise pour obliger les industriels à diminuer la quantité de sel utilisés dans leur recette ou même pour mettre en place un étiquetage clair afin de mieux informer le consommateur (Lire l’article Comment les pouvoirs publics n’ont pas diminué la consommation de sel des Français).

Pour en savoir plus, regardez les vidéos de Pierre Meneton qui témoigne de la problématique liées à la surconsommation de sel sur LaNutrition.fr : Surconsommation de sel, danger, Le sel, un tueur caché et Pourquoi le sel est partout.

  1. Njeri Karanja, Acceptability of Sodium-Reduced Research Diets, Including the Dietary Approaches to Stop Hypertension Diet, among Adults with Prehypertension and Stage 1 Hypertension. Journal of the American Dietetic Association Volume 107, Issue 9 September 2007 pages 1530-1538

  2. Pasquale Strazzullo, Lanfranco D’Elia, Ngianga-Bakwin Kandala, Francesco P Cappuccio Salt intake, stroke, and cardiovascular disease: meta-analysis of prospective studies British Medical JournalPublished 24 November 2009, doi:10.1136/bmj.b4567

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