Le régime Fletcher

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 15/06/2006 Mis à jour le 17/02/2017
Vous cherchez un régime qui marche ? Et si le secret, c'était de mâcher ? Grâce à la mastication, Horace Fletcher a perdu 30 kilos ! Plus étonnant : la recherche semble lui donner raison. Ca vous tente ? Suivez le guide.

Profil

Aucune contrainte

Principe

Le régime consiste à mâcher chaque bouchée au moins 100 fois avant d’avaler

Points forts

Probablement efficace par réduction des calories ingérées et re-synchronisation du signal de l’appétit

Points faibles

Fastidieux !



Comment ça mâche (pardon, marche) ?

Le businessman Horace Fletcher (1849-1919) avait fait de très bonnes affaires, suffisamment pour s’offrir, la cinquantaine venue, une retraite à Venise dans un somptueux palais du 13ème siècle qui donnait sur le Grand Canal. Parce qu’il se vit un jour refuser une police d’assurance en raison de son poids respectable (100 kilos pour 1,65 m), Fletcher entreprit de maigrir en se convertissant au végétarisme. Mais il est surtout entré dans l’histoire en préconisant une méthode révolutionnaire, qui consistait à mâcher chaque bouchée de nourriture jusqu’à la réduire à l’état de liquide. Il perdit trente kilos et fut surnommé « Le grand masticateur ».

Dans son best-seller de 1903, « L’AB-Z de notre nutrition », il expliquait comment compter les mouvements des mâchoires : la nourriture solide devait être mâchée pas moins de 100 fois avant d’être avalée. Tout ce qui ne pouvait être liquéfié devait être recraché. Quant aux liquides, il convenait de les faire circuler dans la bouche pendant 15 secondes. Fletcher recommandait de peser ses excréments pour s’assurer que la digestion était parfaite.

Le fletchérisme devint rapidement une manière de vivre. Parmi les célèbres adeptes de cette méthode, figurent John D. Rockefeller, Thomas Edison, et le romancier Upton Sinclair. Dans les dîners mondains, les gens étaient si occupés à mastiquer, qu’il n’y avait quasiment plus de place pour la conversation.


Qu’en dit la recherche ?

Evidemment, pas d’étude randomisée en double aveugle contre placebo à l’époque. Mais presque… Fletcher recruta des militaires canadiens et demanda à la moitié du groupe de manger comme d’habitude, tandis que l’autre moitié appliquait les règles strictes du fletchérisme. Son étude montra que le groupe « Fletcher » avait maigri et que sa santé s’était améliorée.

Un professeur de Yale conduisit une étude sur le fletchérisme et conclut que les personnes qui suivaient ce régime voyaient leur force musculaire croître de 50%. Leur système immunitaire était renforcé, et la dépendance à l’alcool diminuée.

Le fletchérisme est probablement efficace pour perdre du poids. D’abord parce qu’il est tellement fastidieux que les repas sont écourtés. Mais surtout, on sait aujourd’hui qu’il faut 15 à 20 minutes pour que le signal de satiété parti de l’estomac soit enregistré par l’hypothalamus. Exemple : en situation normale, il faut 7 minutes à une personne pour avaler un hamburger, ce qui signifie que vous avez largement le temps d’en manger deux avant que votre cerveau tire la sonnette d’alarme. Avec le fletchérisme, le signal intervient après le premier hamburger. Vous êtes rassasié plus tôt, vous maigrissez !

Certains nutritionnistes américains plaident pour un retour au fletchérisme. C’est le cas de Ruth Kava, directeur de l’American Council on Science and Health (New York). “Même si vous ne mâchez que 15 fois chaque bouchée, cela vous ralentira et rendra la nourritude plus digeste. »

Le fletchérisme a inspiré une société d’Atlanta aux Etats-Unis (Scientific Intake), qui vend un appareil appelé système DDS qui s’adapte à votre palais et vous oblige à manger de plus petits morceaux. Le système DDS vaut quand même 500 dollars. Un groupe de chercheurs de Pennington Biomedical Research Center à l’université de Louisiane (Baton Rouge) a conduit une petite etude de deux jours chez 32 personnes en surpoids avec le système DDS. L’étude n’a pas fait l’objet d’une publication en règle dans une revue scientifique, mais les chercheurs ont rapporté que le groupe DDS avait consommé 23% de nourriture en moins, soit 533 calories.

En résumé

Le fletchérisme, considéré longtemps comme un régime de dingue, est maintenant regardé avec curiosité et même un certain intérêt.


Notre avis

Pourquoi pas ? A condition d’être patient et d’accepter de terminer seul ses dîners, pendant que le reste de la maison est déjà couchée ! Plus sérieusement, il n’y a que des avantages à se souvenir de ce que nos parents nous disaient : « Mais mâche donc ! »



Pour la petite histoire

Horace Fletcher fut longtemps une publicité vivante pour son régime. Non seulement il avait maigri, mais en 1899, à l’âge de 50 ans, il parcourait à vélo des distances respectueuses, plusieurs dizaines de kilomètres, et les routes n’étaient pas ce qu’elles sont, et les vélos non plus (la sienne n’avait qu’une vitesse).
Mais en 1919, à l’âge de 70 ans il meurt d’une crise cardiaque, probablement la conséquence de ses errements passés, et son régime tombe en désuétude.

 

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