Les hybrides, des 0GM silencieux dans nos assiettes

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 15/06/2009 Mis à jour le 21/11/2017
Pour les consommateurs de fruits et de légumes, le mot hybride peut faire peur. Pour savoir si l’hybridation est naturelle et pour connaître ce qui se cache derrière l’abréviation F1, suivez le guide.

Qu’est ce que l’hybridation ?

 

L’hybridation est le croisement naturel ou artificiel entre deux organismes de différentes variétés ou espèces. Certains hybrides sont plus résistants et plus vigoureux que les parents dont ils sont issus et peuvent donner naissance à des espèces nouvelles, exemple du colza né d’un croisement entre un chou et un navet.

Depuis une trentaine d’année, la recherche en amélioration des fruits et légumes a porté sur des caractères qui ont beaucoup intéressé les producteurs, ceux qui confèrent aux légumes une résistance aux maladies au détriment d’autres comme le goût. (lire Pourquoi les tomates n’ont plus de goût ?)

De quand datent les premiers hybrides ?

 

Il y a 10 000 ans, l’homme inventait l’agriculture. En choisissant les plants les plus robustes et les mieux adaptés à son milieu de culture, l’homme a inventé la sélection, il a « domestiqué » certaines espèces végétales. Grâce aux mutations spontanées de leur matériel génétique, les espèces cultivées ont donc évoluées au cours des millénaires suivants. Ce n’est qu’au 18ème siècle que l’homme a eu l’idée de créer de nouvelles espèces par hybridation. Des chercheurs vont ébaucher les prémices de la génétique végétale en étudiant le résultat de croisement entre variétés d’une même espèce. Au 20ème siècle, la connaissance des lois de la génétique, entre autre grâce aux travaux de Gregor Mendel, accélère la création de nouvelles variétés améliorées.

Un hybride F1, c’est quoi ?

 

L’hybridation correspond en fait à un croisement entre deux lignées pures (homozygotes) pour donner un hybride de première génération (F1 pour First Filial Generation)

La structure génétique des plantes F1 est hétérozygote car c’est le résultat de l’hybridation de deux variétés qui amènent deux caractères complémentaires. Par exemple : le père amène un gène de résistance à une maladie, la mère amène un autre gène de résistance à une autre maladie. L’enfant hybride aura les deux caractères. L’hybridation permet entre autres de multiplier la résistance des plantes ou encore la durée de conservation (lire Pourquoi les tomates n’ont plus de goût ?)

Le schéma montre le croisement de deux lignées pures (homozygotes) qui donne une génération F1 homogène (les individus sont identiques entre eux) alors que la génération F2 n'est plus homogène.

Pourquoi les hybrides F1 sont-ils stériles ?

 

D’abord, ils ne le sont pas tous, cela dépend de l’espèce et de la variété. Mais ils peuvent l’être pour plusieurs raisons : la pression de sélection exercée sur les plantes est telle que la fonction de reproduction est affaiblie, voire inhibée. La raison souvent invoquée par les détracteurs de l’industrie des semences est que rendre stérile, par un procédé biologique, un F1 oblige l’agriculteur à se réapprovisionner chez son fournisseur l’année suivante, une manière d’être sûr de gagner de l’argent.

Comment produire des semences de variétés hybrides de fruits ou de légumes ?

 

Les hybride F1 ne sont pas autoreproductibles, c'est-à-dire qu’ils sont soit stériles, soit dégénérescents. Au fur et à mesure des générations successives, les caractères intéressants comme le rendement ou la résistance à une maladie sont de moins en moins exprimés. Si on croise deux F1, la génération F2 ne sera plus homogène : on ne peut pas reproduire les semences conformément au type de l’hybride F1 de départ.

La production de semences commerciales hybrides est donc beaucoup plus difficile que dans le cas d’une lignée pure (autofécondation) ou d’un clonage (lire Comment sont créées les variétés de fruits et de légumes ?). En effet, il faut croiser les deux parents manuellement (castrer les fleurs sur le pied femelle et prélever le pollen sur le pied mâle puis l’amener sur la fleur du pied femelle) ou chimiquement. Ensuite, les producteurs doivent surveiller si d'autres fleurs femelles ne poussent pas. Si c'est le cas, il faut les enlever car elles pourraient être fécondées par un mauvais pollen et augmenter le taux d'impuretés de la récolte. C'est pourquoi, plusieurs passages par semaines dans les rangs de plants sont nécessaires pendant les semaines suivant la fécondation.

Ce travail minutieux demande de la main d’œuvre et est souvent délocalisée en Asie où les salaires sont jusqu'à dix fois moins élevés qu’en France.

Combien un kilo de légume produit-il de graines ?

 

Chez la tomate, un kilo donne environ entre 2 à 4 grammes de semences. Ces semences ont besoin d’être rincées, traitées, séchées et calibrées. Un gramme de semences donne en moyenne 300 graines. Donc un kilo de tomate permet de produire entre 600 et 1 200 graines. Dans certains cas, les graines sont rincées à l’eau de Javel pour éviter la prolifération bactérienne, elles peuvent être aussi « enrobées » d’un fongicide avant d’être ensachées. Ces sachets seront commercialisés soit aux producteurs soit à des amateurs jardiniers.

Comment reconnaître un sachet de semences hybrides ?

 

Pour les jardiniers amateurs ou même les professionnels, les sachets de semences potagères de variétés modernes hybrides doivent porter la mention F1.

Comment sont reproduites les semences de variétés anciennes ?

 

Toutes les semences de quelques variétés que ce soient, vendues par des producteurs de semences de variétés anciennes, sont sous forme de graines. En effet, l’absence d’hybridation artificielle rend le processus de reproduction davantage « naturel », c'est-à-dire, qui reproduit la nature. De manière schématique et hors reproduction végétative, une plante donne un fruit rempli de semences, les graines vont tomber au sol pour donner d’autres plantes l’année d’après. En récupérant ces graines, le jardinier peut perdurer sa production d’une saison à l’autre, ce que ne permettent pas les hybrides F1.

 

Pour en savoir plus, lire Histoire et amélioration de cinquante plantes cultivées, de Claire Doré et Fabrice Varoquaux, Editions Inra, 2006.

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