La consommation d’aliments ultra-transformés liée au risque de cancer

Par Thierry Souccar - Journaliste et auteur scientifique, directeur de laNutrition.fr Publié le 15/02/2018 Mis à jour le 09/01/2024
Actualité

Les personnes qui consomment plus d’aliments ultra-transformés ont un risque accru de cancer.

Un grand nombre de facteurs interviennent dans la survenue d'un cancer. L'alimentation, avec la présence croissante de produits ultra-transformés, pourrait jouer un rôle.

Quels sont les produits ultra-transformés ?

La notion d'aliment ultra-transformé ou AUT est récente. Elle a été popularisée par les chercheurs de l’université de Sao Paulo, au Brésil, et en France par le chercheur de l'INRA Anthony Fardet. La définition d'un aliment ultra-transformé s'appuie sur la classification NOVA, qui exprime le degré de transformation d'un aliment.

Le degré de transformation des aliments

La classification NOVA répartit les aliments en quatre groupoes, des moins transformés dans le groupe 1 (comprenant par exemple les fruits et légumes nature), aux plus transformés, classés dans le groupe 4, celui des aliments ultra-transformés. Ces derniers sont des produits alimentaires et des boissons dont la fabrication comporte plusieurs étapes et techniques de transformations et qui font appel à une variété d’ingrédients dont beaucoup sont utilisés exclusivement par l'industrie. La présence d'ingrédients généralement absents de nos cuisines domestiques est une caractéristique des aliments ultra-transformés. Parmi ces additifs se trouvent des agents texturants comme les émulsifiants, des édulcorants, des colorants, des conservateurs...

Exemples d'aliments ultra-transformés

Voici une liste non-exhaustive d'aliments ultra-transformés : confiseries, biscuits, gâteaux d'apéritif, barres chocolatées, brioches industrielles, crèmes glacées, sodas, jus sucrés et produits laitiers sucrés, saucisses, nuggets de volaille, cordons bleus, poisson pané et autres plats congelés prêts à consommer, chips, préparations culinaires pour gâteaux, soupes en sachets, nouilles instantanées, sauces industrielles, céréales du petit déjeuner, barres de céréales... 

Quel est le lien entre l'alimentation ultra-transformée et le cancer ?

Les aliments ultra-transformés constituent une part croissante de la consommation alimentaire, puisque ces aliments représentent plus de 30 % de nos apports énergétiques journaliers en France et près de 60 % dans certains pays occidentaux (Royaume-Uni, États-Unis). Or les chercheurs pensent que le mode de vie (activité physique, pollution de l'environnement...) et l’alimentation interviennent dans 30 à 40 % des cas de cancers.

Lire aussi : 100 % des céréales du petit déjeuner pour enfants sont ultra-transformées

Les aliments ultra-transformés ont déjà été associés à un risque plus élevé d’obésité et de maladies chroniques, comme les maladies cardiovasculaires.

Risque de cancer dans la cohorte NutriNet-Santé

Une étude française de l'équipe EREN (université Sorbonne Paris Nord), publiée dans le British Medical Journal, s’est appuyée sur les résultats de la cohorte NutriNet-Santé (104 890 participants) âgés de 18 ans et plus. Elle rapporte un lien entre la consommation d’aliments ultra-transformés et le risque de cancer (1).

Le mode d’alimentation des volontaires a été établi à partir de trois questionnaires alimentaires non consécutifs par participant, administrés par Internet, et leur état de santé au moyen d’un questionnaire de santé annuel.

Résultats : les aliments ultra-transformés, dans cette cohorte française, contribueraient à un peu moins de 20 % de la quantité d’aliments consommés. Une augmentation de la part des aliments ultra-transformés dans le régime alimentaire était associée à une augmentation de 12 % du risque de cancer, et de 11 % du risque de cancer du sein chez la femme.

Aliments ultra-transformés et cancer colorectal

En août 2022, des scientifiques internationaux (États-Unis, Brésil, Canada) ont publié dans la revue BMJ une étude sur le lien entre aliments ultra-transformés et risque de cancer colorectal chez les adultes américains (2). Les participants étaient 46 341 hommes et 159 907 femmes issus de trois grandes études de professionnels de la santé (Health Professionals Follow-up Study, Nurses’ Health Study et Nurses’ Health Study II). Ils ont répondu à des questionnaires alimentaires tous les quatre ans et les taux de cancer colorectal ont été mesurés sur une période de 24 à 28 ans.

Les résultats différaient entre les hommes et les femmes :

  • chez les hommes : par rapport aux 20 % qui consomment le moins d'aliments ultra-transformés, les 20 % d’hommes qui en consomment le plus augmentaient de 29 % leur risque de développer un cancer colorectal. Ce résultat restait significatif en ajustant en fonction de l'indice de masse corporelle (IMC) ;
  • chez les femmes, aucune association n'a été observée entre la consommation globale d'aliments ultra-transformés et le risque de cancer colorectal. Cependant, une consommation plus élevée de plats prêts à manger ou à réchauffer chez les femmes était associée à un risque accru de cancer colorectal.

Aliments ultra-transformés et cancer des voies aérodigestives supérieures

Manger davantage d’aliments ultra-transformés (AUT) pourrait aussi être associé à un risque plus élevé de développer des cancers des voies aérodigestives supérieures selon une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université de Bristol et du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). L’étude a analysé les données sur l’alimentation et le mode de vie de 450 111 adultes européens suivis pendant environ 14 ans (3).

Manger 10 % d’AUT en plus est associé à un risque de 23 % plus élevé des cancers de la cavité buccale, du pharynx et du larynx et un risque plus élevé de 24 % de l’adénocarcinome de l’oesophage. L’augmentation de la graisse corporelle n’explique qu’une petite proportion de l’association statistique entre la consommation d’AUT et le risque de ces cancers des voies aérodigestives supérieures.

Le risque accru de cancers pourrait être lié à la présence d’additifs, notamment émulsifiants et édulcorants artificiels, ainsi que la présence de contaminants provenant des emballages alimentaires et du processus de fabrication.

S’agissant d'études d’observation, la relation de cause à effet n’est pas établie dans ces résultats. Mais si elle se confirme, elle pourrait être due au fait que ces aliments sont souvent riches en calories, pauvres en composés protecteurs comme les fibres, et très glycémiants. Ils renferment aussi des additifs et autres ACE, un terme créé par LaNutrition.fr pour englober des ingrédients qui ne servent qu'à des fonctions cosmétiques, technologiques et économiques, et dont les effets sur la santé sont douteux, ainsi que des composés néoformés comme l’acrylamide et les AGE dans les chips, biscuits, les produits de panification.

Lire aussi : Aliments ultra-transformés : repérez-les grâce aux ACE

Les conseils d'Anthony Fardet, chercheur et spécialiste des AUT

Le chercheur français Anthony Fardet conseille dans « Halte aux aliments ultra-transformés » de ne pas consommer plus de 15 % de ses calories sous la forme d’aliments ultra-transformés. Cela conduit à privilégier les aliments bruts. Mais tous les aliments industriels ne sont pas ultra-transformés.

Retrouvez ci-dessous Anthony Fardet dans le podcast Horizon, créé par Lena Champy, qui explique pourquoi les aliments ultra-transformés sont nocifs à la santé.

 

 

LaNutrition, qui est le premier média à avoir exposé le problème de l'ultra-transformation, publie et met à jour depuis plus de dix ans un guide de référence, Le bon choix au supermarché, qui tient compte du degré de transformation des aliments industriels pour leur attribuer une note.

3 livres pour mieux comprendre et mieux acheter :

Références

(1) Fiolet et al. Consumption of ultra processed foods and cancer risk: results from nutrinet-santé prospective cohort. BMJ. 2018.

(2) Wang et al. Association of ultra-processed food consumption with colorectal cancer risk among men and women: results from three prospective US cohort studies. BMJ. 2022.

(3) Morales-Berstein F. et coll. Ultra-processed foods, adiposity and risk of head and neck cancer and oesophageal adenocarcinoma in the European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition study : a mediation analysis. Eur J Nutr. 22 novembre 2023.

La sélection

Publicité

Les meilleurs livres et compléments alimentaires sélectionnés pour vous par NUTRISTORE, la boutique de la nutrition.

Découvrir la boutique logo Nutrivi

A découvrir également

Back to top