Faut-il prendre des suppléments de vitamine D contre la COVID-19 ?

Par Elvire Nérin - Journaliste scientifique et auteure Publié le 26/09/2022 Mis à jour le 16/11/2023
Actualité

Une méta-analyse montre que les compléments de vitamine D réduisent la sévérité de la maladie. Mais les effets préventifs de la supplémentation sur l'infection par le SARS-CoV-2 sont controversés.

L'importance de la vitamine D pour l'immunité

La vitamine D, ou cholécalciférol, est d'abord connue pour son rôle dans la santé osseuse car elle intervient dans la régulation du métabolisme du calcium, et aide les os à rester solides et rigides. Mais la vitamine D exerce aussi des effets importants sur le système immunitaire inné, notre première ligne de défense contre les infections, en induisant des peptides antimicrobiens au niveau des muqueuses. Elle a aussi des effets sur l’immunité adaptative en modulant la fonction des lymphocytes T.

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Deux grandes méta-analyses ont trouvé que la supplémentation en vitamine D réduit le risque d’infections des voies respiratoires, en particulier chez les personnes carencées en vitamine D. Dans le contexte de la COVID, on cherche donc à savoir si la vitamine D pourrait aider à protéger contre l'infectios par le SARS-CoV-2 et les formes graves de COVID.

Lire aussi : COVID-19 : des suppléments de vitamine C réduisent la mortalité

Carence en vitamine D et COVID

Les études d’observation ont montré que les personnes qui manquent de vitamine D ont un risque accru de COVID-19 sévère. Cependant, cette association pourrait être due à une causalité inverse, dans la mesure les personnes âgées et obèses ont plus de risques de contracter une forme sévère de la maladie, et qu’elles ont aussi plus fréquemment des déficits.

Supplémentation en vitamine D et sévérité de la COVID-19

Dans une étude de l’université de Changsha (Chine), des chercheurs ont réalisé une méta-analyse d'essais contrôlés randomisés. Ils ont sélectionné 25 essais cliniques incluant 8128 participants. Quatre essais ont comparé les effets préventifs de la supplémentation en vitamine D sur l'infection par le SARS-CoV-2, et les résultats n'étaient pas concluants. En ce qui concerne le traitement de l'infection par le SARS-CoV-2 au moyen d'une supplémentation en vitamine D, il a été constaté que cette supplémentation pouvait réduire de manière significative les taux d'admission en unité de soins intensifs (-37 %) et de ventilation mécanique (-42 %) des patients, mais qu'elle n'avait pas d'effet statistiquement significatif sur la mortalité. Toutefois, la supplémentation en vitamine D a réduit de manière significative la mortalité chez les patients présentant une carence en vitamine D (-24 %).

Les auteurs en concluent que la supplémentation en vitamine D peut avoir un effet protecteur sur la gravité de la maladie, en particulier chez les patients présentant une carence.

D'autres études sont plus mitigées

Deux autres études randomisées affinent nos connaissances sur ce sujet.

La première étude a été menée au Royaume-Uni entre mai et octobre 2021. Elle a porté sur 3 100 participants qui ont reçu soit 3 200 UI, soit 800 UI de vitamine D3 par jour pendant six mois si leurs concentrations sanguines étaient inférieures à 75 nmol/L (30 ng/mL). 3100 autres participants n'ont reçu aucune supplémentation.

Résultat : aucune des deux doses de vitamine D n’a eu d'effet sur l'incidence de la COVID-19. Cet essai bien conduit est donc négatif. Cependant, il faut être prudents dans les conclusions. Premièrement, la vaccination a été mise en place pendant l'étude. Au départ, seulement 1,2 % des participants avaient été vaccinés, mais à la fin de l'étude, 89,1 % avaient reçu au moins une dose. Il est possible que la vaccination ait masqué tout effet de la vitamine D. Cependant, dans le groupe non vacciné, la maladie était moins fréquente chez les participants prenant 3200 UI/jour par rapport au groupe témoin mais la différence n'était pas statistiquement significative. Deuxièmement, l’étude n’a pas été menée en double aveugle, la vaccination a été mise en place au cours de l’étude. Enfin, près de 50 % des participants du groupe de contrôle ont pris des suppléments de vitamine D pendant la période d'étude, ce qui a pu diluer les effets de la vitamine D.

L'autre essai a été mené en Norvège entre novembre 2020 et juin 2021, en utilisant de l'huile de foie de morue comme substitut d'une supplémentation en vitamine D à faible dose (400 UI/jour). Les chercheurs ont randomisé 34 741 participants qui ont reçu soit 5 ml d'huile de foie de morue, soit 5 ml d'huile placebo par jour pendant six mois. Les auteurs n'ont trouvé aucun effet bénéfique de l'huile de foie de morue.

Cependant, les participants étaient relativement jeunes et en bonne santé, et 86,3 % avaient des niveaux jugés adéquats de vitamine D (> 50 nmol/L, soit 20 ng/mL) au départ. Surtout, l'huile de foie de morue contient une quantité importante de vitamine A, qui peut également interférer avec les effets de la vitamine D sur le système immunitaire.

Le dossier complet vitamine D et COVID est à lire ici (abonnés)

Quels enseignements tirer de ces résultats ?

Globalement, des études montrent des associations inverses entre les taux sériques de vitamine D et le risque de développer une COVID-19 aiguë sévère, avec un risque accru de mortalité, d'hospitalisation en unité de soins intensifs et de nécessité d'une ventilation mécanique.

Une supplémentation de 1 000 à 2 000 UI/jour peut être un moyen sûr, simple et abordable de rétablir les niveaux de vitamine D

Les résultats mitigés des études doivent être interprétés avec précaution et n’excluent pas que la vitamine D puisse se révéler bénéfique chez les personnes à risque de carence, qui sont nombreuses en hiver : celles à la peau pigmentée, celles qui s’exposent rarement au soleil, femmes enceintes, personnes âgées. Dans un commentaire publié par le BMJ, le Pr Peter Bergman, de l’Institut Karolinska en Suède estime que « pour ceux dont les niveaux de vitamine D sont insuffisants (<50 nmol/L), une supplémentation de 1 000 à 2 000 UI/jour peut être un moyen sûr, simple et abordable de rétablir les niveaux de vitamine D, d'améliorer la santé des os et de profiter d’une possible protection. »

Vitamine D avant, pendant et post-COVID : posologie, mode d'emploi

La vitamine D est une vitamine présente dans l'alimentation, mais c'est aussi une prohormone que l'organisme peut fabriquer grâce à l'exposition au soleil. Une fois synthétisée dans le derme, elle est transportée dans le foie et le rein où elle est transformée en hormone active. En France, la majorité de la population adulte (80 %) présente une insuffisance en vitamine D, avec un taux inférieur à 30 ng/mL, et 42,5 % un déficit modéré à sévère (moins de 20 ng/mL). L'intérêt de la supplémentation en vitamine D est que c'est une mesure simple - la vitamine peut être prise par voie orale - et peu coûteuse.

Le Guide pratique des compléments alimentaires conseille 1 000 à 2 000 UI de vitamine D par jour selon le dosage sanguin. Idéalement il faut faire une analyse biologique pour vérifier votre statut vis-à-vis de la vitamine D et prendre un avis médical pour adapter la posologie. La limite supérieure de sécurité est fixée à 4000 UI. La supplémentation en vitamine ne peut remplacer une alimentation variée.

Faut-il prendre de la vitamine D pendant la COVID : l'avis de l'académie de médecine

Dans un communiqué du 22 mai 2020, l'académie de médecine a recommandé de "de doser rapidement le taux de vitamine D sérique chez les personnes âgées de plus de 60 ans atteintes de COVID-19, et d’administrer, en cas de carence, une dose de charge de 50.000 à 100.000 UI qui pourrait contribuer à limiter les complications respiratoires." Chez les personnes de moins de 60 ans qui ont eu un diagnostic de COVID-19, elle recommande d’apporter une supplémentation en vitamine D de 800 à 1 000 UI/jour.

Et au-delà de 100 000 UI de vitamine D ?

Les fortes doses de vitamine D (200 000 UI) ne sont pas forcément conseillées. Une étude a examiné les symptômes des patients ayant eu un diagnostic de COVID-19 modéré à sévère, un an après avoir eu 200 000 UI de vitamine D3 ou un placebo. Il n'y eu aucune différence significative entre les groupes pour la fièvre, la toux, la fatigue, les douleurs articulaires, l'écoulement et la congestion nasale, les maux de gorge, l'hypertension, le diabète, les maladies cardiovasculaires, les maladies rhumatismales, l'asthme, les maladies pulmonaires obstructives chroniques, les maladies rénales chroniques, la qualité de vie et les symptômes nouveaux ou persistants jusqu'à 1 an de suivi.

COVID long : faut-il prendre de la vitamine D après le COVID ? 

Même après avoir survécu à l'infection initiale, des patients continuent à présenter des symptômes invalidants touchant plusieurs organes : ce « COVID long » toucherait une personne sur dix. Le COVID ne serait donc pas qu’une affection respiratoire de courte durée, mais une maladie susceptible d'entraîner des complications à long terme.

Une étude italienne parue en septembre 2023 a montré que les personnes touchées par le COVID long ont des taux sanguins de vitamine D plus bas que les autres personnes ayant survécu à l'infection : en moyenne 20,1 ng/mL pour les patients affectés par le COVID long, contre 23,2 ng/mL pour les autres. 

Le déficit modéré à sévère (carence en vitamine D) peut être défini pour un taux inférieur à 20 ng/mL. Au vu des données présentées dans l'étude ci-dessus, le dépistage de la carence en vitamine D pourrait donc être justifié chez les personnes souffrant de COVID long. En-dessous de 10 ng/mL, c'est un déficit sévère.

Pour en savoir plus, lire : Vitamine D, mode d'emploi

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