Lecture : changer de pédagogie pour réduire les inégalités ?

Pourquoi c’est important

Le milieu socio-économique dans lequel évolue le jeune enfant peut avoir une incidence sur sa réussite scolaire. Les inégalités d’apprentissage apparaissent dès le plus jeune âge. Or l’école maternelle joue un rôle important dans la scolarité des jeunes enfants : c’est pendant ces années que se posent les bases du calcul, de la lecture, de l’écriture, mais aussi de la socialisation. À cet âge, le cerveau des enfants fait preuve d’une plasticité importante. C’est pourquoi on peut penser que des interventions pédagogiques innovantes dès la maternelle pourraient aider à réduire les disparités liées au statut socio-économique.

Actuellement, il existe dans les pays occidentaux un engouement pour la pédagogie Montessori. Celle-ci favorise l’autonomie et l’expérimentation de l’enfant. Mais cet enseignement est souvent proposé dans des écoles privées, peu accessibles aux milieux populaires. Pourrait-il aider à réduire les inégalités scolaires d’enfants vivant dans des milieux défavorisés ?

L’étude

Une étude randomisée contrôlée parue dans la revue Child Development a été réalisée dans la région lyonnaise par des chercheurs du CNRS, de l’Inserm et des universités de Lyon, Grenoble et Paris. Dans une école maternelle située en réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+), la moitié des classes a suivi la pédagogie Montessori et l’autre moitié une pédagogie « classique ».

Les enfants ont été répartis au hasard entre les classes et suivis pendant les trois années de maternelle. Les chercheurs ont évalué les capacités des enfants dans les domaines du langage, des mathématiques, pour leur fonction exécutive et leurs aptitudes sociales. Ils ont aussi comparé les résultats de ces enfants à ceux d’une autre école Montessori, privée, située dans un quartier plus privilégié de Lyon.

Résultats : dans l’école publique REP+, les niveaux en mathématiques, la fonction exécutive et les aptitudes sociales étaient comparables avec les deux types d’enseignement, classique ou Montessori. En revanche, les enfants qui avaient suivi la pédagogie Montessori avaient de meilleurs résultats en lecture en fin de grande section de maternelle. Leurs résultats étaient similaires à ceux des enfants de l’école Montessori privée pour la lecture, alors que les enfants de l’école privée réussissaient mieux sur les autres paramètres.

L’enseignement Montessori permettrait donc d’atténuer les inégalités au moment de l’apprentissage de la lecture et pourrait donc être recommandé tout particulièrement pour apprendre à lire. D’après le communiqué du CNRS, « plusieurs caractéristiques de cette méthode d’apprentissage de la lecture sont soutenues par la recherche cognitive et son utilisation ne semble pas avoir d'impact sur les autres domaines d'apprentissage. »

L’étude montre également que, dans un milieu défavorisé, l’enseignement « traditionnel » est aussi efficace que la pédagogie Montessori pour les autres compétences (mathématiques, fonction exécutive et aptitudes sociales).

En pratique

La pédagogie Montessori est inspirée des travaux de Maria Montessori, un médecin italien qui a développé sa méthode au début du 20^e siècle. Au départ, Maria Montessori voulait aider les enfants qui souffraient de déficit intellectuel ou qui venaient de milieux défavorisés de Rome. Le principe de cette pédagogie est que l’enfant apprend en interagissant avec son environnement. Dans les classes Montessori, les enfants de différentes classes d’âge sont mélangés et les outils pédagogiques font appel aux différents sens. L’enfant apprend en corrigeant ses erreurs et peut choisir lui-même ses activités. Le rôle de l’enseignant est plus d’accompagner l’enfant dans ses apprentissages que de lui transmettre un savoir. Dans les classes à la pédagogie traditionnelle, l'utilisation de la cohérence cardiaque ou de la méditation (adaptées à ce public) permet aussi d'obtenir de meilleurs résultats en termes d'apprentissage.

A lire : Cohérence Kid