Les meilleurs indicateurs de longévité

Par Priscille Tremblais - Journaliste scientifique Publié le 04/05/2016 Mis à jour le 16/06/2022
Actualité

Monter les escaliers, boire du thé, être optimiste… les caractéristiques de ceux qui vivent longtemps.

Nos experts pour ce thème

  • Dr Jason Fung, néphorologue et chef de clinique à Toronto
  • Dr James Nicolantonio, chercheur et pharmacologue à l'Institut de santé cardiovasculaire de Kansas City (Missouri)
  • Ils sont les auteurs de La Solution Longévité

Les télomères

Les télomères sont des structures situées à l’extrémité de nos chromosomes qui pourraient jouer un rôle dans le vieillissement et les maladies liées à l’âge. A chaque division cellulaire, les télomères raccourcissent. Une altération des télomères ou leur longueur trop courte a été associée au développement de maladies liées à l’âge comme le cancer, les maladies cardiovasculaires, la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson. En vieillissant, on voit ses télomères raccourcir. On ne peut pas modifier son âge mais on peut agir sur les facteurs qui contribuent à préserver la longueur des télomères. "Mais à côté des télomères dont l'intérêt est parfois remis en cause, il existe de bons indicateurs du temps qu’il reste à vivre", dit le Dr Jason Fung.

Le record de longévité de Jeanne Calment pas près d’être battu, mais…
Dans un article de Nature, des gérontologues s’accordent pour dire que les 122 ans et 5 mois de Jeanne Calment ne sont pas près d’être battus. La deuxième plus grande longévité est attribuée à l’Américaine Sarah Knauss, décédée à l'âge de 119 ans en 1999. Cependant, Shripad Tuljapurkar, biodémographe à l'Université de Stanford en Californie, a mis en 2018 en évidence une amélioration constante de l'espérance de vie des sexagénaires aux États-Unis, au Japon et en Suède. « Nous sommes, dit-il, capables de faire vivre les gens plus longtemps. Et je ne vois pas de ralentissement. » Le démographe français Jean-Marie Robine (Inserm, Paris) pense aussi que l'espérance de vie globale augmente. Dans un article de 2021, il a analysé les données démographiques françaises pour surveiller l'âge le plus élevé atteint par au moins 30 personnes décédées au cours d'une année donnée. Cet âge a régulièrement augmenté, passant de 99 ans en 1946 à 109 ans en 2016. Mais il souligne qu’on assiste probablement à un phénomène connu sous le nom de compression de la mortalité, selon lequel les populations survivent généralement jusqu'à des âges plus avancés sans que les limites absolues de la longévité soient repoussées de manière significative. Autrement dit, la survie jusqu’à 100 ans est meilleure, mais l'espérance de vie restante à l’âge de 100 ans est la même, sans aucun progrès documenté au cours des 80 dernières années. Les supercentenaires pourraient avoir certaines caractéristiques génétiques qui leur permettent d'atténuer certains processus métaboliques critiques pour la longévité extrême.

Les marqueurs plus efficaces que la longueur des télomères

Plutôt que la longueur des télomères, des mesures simples comme l’âge et l’aptitude à monter des escaliers ou à marcher sur une courte distance donneraient une meilleure idée de la longévité d'un individu. C’est le résultat de travaux qui se sont intéressés aux taux de décès de 2672 Américains de plus de 60 ans, 923 personnes de plus de 61 ans du Costa Rica et 976 personnes de 53 ans et plus habitant Taïwan. L’objectif de cette recherche était de trouver comment des mesures comme l’âge, la mobilité, le tabagisme, pouvaient prédire le décès sur une période de cinq ans, par rapport à la longueur des télomères.

L’âge était naturellement le meilleur prédicteur de longévité, et la longueur des télomères n’avait pas vraiment plus de valeur prédictive que le hasard. Différentes variables apparaissaient comme plus efficaces pour prédire la durée de vie de l’individu : la mobilité, l’auto-évaluation de sa santé, le tabagisme, la cognition, ou des marqueurs biologiques comme la protéine C-réactive (CRP). Pour Dana Glei, du Georgetown University’s Center for Population and Health (Washington), principal auteur de ces travaux, les données scientifiques sur la longueur des télomères ont pu être exagérées par les médias et elle est formelle : il n’y a pas à l'heure actuelle de preuve qui suggèrent d'utiliser la longueur des télomères pour savoir combien de temps un patient va vivre. Le Dr James Nicolantonio met aussi en garde les consommateurs : « Sur Internet, il se vend des kits pour tester la longueur de vos télomères et des suppléments qui sont vantés pour aider au maintien des télomères. Il faut s'en méfier. »

Un corps sportif et musclé

D’après une étude de l’université de Los Angeles, la masse musculaire serait également un bon indicateur de longévité chez les personnes âgées. Elle a analysé les données de 3659 personnes qui appartenaient à l’étude NHANES III (National Health and Nutrition Examination Survey) entre 1988 et 1994. Il s'agissait d'hommes de plus de 55 ans et de femmes de plus de 65 ans dont la composition du corps a été mesurée grâce à l’impédance bioélectrique afin de déterminer un index de masse musculaire.

Résultats : la mortalité toutes causes confondues était significativement plus basse  au sein des 25 % de personnes présentant l'indice musculaire le plus élevé par rapport aux 25% qui avaient l’indice le plus bas. Cette diminution du risque est de l'ordre de 19 à 20 % selon les modèles statistiques. Pour Arun Karlamangla, auteur de l’étude et spécialiste en gériatrie, «plus la masse musculaire est élevée, plus le risque de décès est bas». Les médecins devraient donc chercher des moyens de conserver une bonne masse musculaire chez les patients âgés. Si cette étude ne prouve pas de relation de cause à effet, elle permet cependant d'affirmer que la masse musculaire est associée au risque de décès.

Lire : Faire un peu de jogging permet de vivre beaucoup plus longtemps 


Une alimentation riche en polyphénols

"On sait qu'un régime méditerannéen ou de type Okinawa, deux régimes riches en polyphénols, produit des centenaires, il existe donc probablement un autre indicateur alimentaire de longévité : la teneur en polyphénols de l'alimentation", précise le Dr Jason Fung. Une étude espagnole a utilisé les mesures en polyphénols urinaires chez 807 hommes et femmes de plus de 65 ans vivant en Toscane (Italie). Les polyphénols sont des molécules antioxydantes présentes dans les fruits et légumes, mais aussi le chocolat, le café, le thé.

Résultats : une association entre des apports élevés en polyphénols et une réduction du risque de mortalité a été observée. Les personnes dont les taux de polyphénols urinaires étaient les plus élevés (> 650 mg/jour) avaient une réduction de 30 % de leur risque de mortalité, par rapport à ceux dont les apports étaient les plus faibles (< 500 mg/jour). Pour vous faire une idée de ce que représentent ces quantités : des fruits comme les pommes, raisins, poires, cerises, baies contiennent 200 à 300 mg de polyphénols pour 100 g de fruit frais.

Les polyphénols pourraient jouer un rôle dans la prévention de différentes maladies chroniques. Mais ils pourraient aussi n'être qu'un marqueur de la consommation élevée de végétaux, thé, tisanes... En effet les personnes ayant un régime riche en fruits et légumes présentent généralement un risque réduit de maladies chroniques et de mortalité.

Lire : Pourquoi le régime méditerranéen permet de vivre plus longtemps en bonne santé 


Avoir le moral au beau fixe

Des chercheurs des universités de Caroline du Nord et de Colorado Boulder ont étudié le lien entre bonheur et longévité chez 30 000 adultes aux Etats-Unis. Parmi les questions posées aux participants, ils devaient dire s'ils étaient très heureux, assez heureux ou pas heureux. Ensuite, les chercheurs ont utilisé les bases de données des décès (General Social Survey-National Death Index) pour voir s'il y avait un lien entre les réponses données et le risque de mourir dans les trois décennies.

Résultats : par rapport aux personnes très heureuses, le risque de décès augmentait de 6 % chez ceux qui se disaient assez heureux et de 14 % chez ceux qui ne se disaient pas heureux. Ces résultats s'observaient indépendamment du revenu, de la santé ou du statut marital des participants. "Une des explications, commente le Dr Nicolantonio, serait que les personnes heureuses géreraient mieux le stress et auraient plus d'amis."

Le Dr Nicolantonio souligne que les économistes portent surtout leur attention sur l'économie, les criminologues sur la sécurité et la prévention de la violence et les défenseurs de la santé publique sur les comportements malsains, mais que «nous manquons une variable importante si nous négligeons le bonheur.»

Pour en savoir plus, lire : La solution longévité - Lire un extrait ici

Références
  1. Eisenstein M. et al. Does the human lifespan have a limit? Nature. 2022 Jan;601(7893):S2-S4.
  2. Glei DA, Goldman N, Risques RA, Rehkopf DH, Dow WH, Rosero-Bixby L, Weinstein M. Predicting Survival from Telomere Length versus Conventional Predictors: A Multinational Population-Based Cohort Study. PLoS One. 2016 Apr 6;11(4):e0152486. doi: 10.1371/journal.pone.0152486.
  3. Preethi Srikanthan, Arun S. Karlamangla. Muscle Mass Index as a Predictor of Longevity in Older-Adults. The American journal of medicine. 20 February 2014. Article in Press DOI: 10.1016/j.amjmed.2014.02.007.
  4. Zamora-Ros R, Rabassa M, Cherubini A, Urpí-Sardà M, Bandinelli S, Ferrucci L, Andres-Lacueva C. High concentrations of a urinary biomarker of polyphenol intake are associated with decreased mortality in older adults. J Nutr. 2013 Sep;143(9):1445-50.
  5. Elizabeth M. Lawrence, Richard G. Rogers, Tim Wadsworth, Happiness and longevity in the United States, Social Science & Medicine, Available online 18 September 2015, ISSN 0277-9536.

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