Performances sportives : « la respiration est un outil fondamental, souvent négligé »

Par Sarah Amiri - Diététicienne et journaliste scientifique Publié le 19/05/2021 Mis à jour le 20/05/2021
Point de vue

Auteur de La respiration pour la maîtrise de soi, Leonardo Pelagotti nous livre ses précieux conseils pour optimiser son corps et son esprit grâce à un outil méditatif : la respiration. 

LaNutrition.fr : peux-tu nous décrire ton parcours et nous dire ce qui t’a mené à la respiration ?

Leonardo : J’étais gymnaste au niveau national en Italie pendant plus de 15 ans avec beaucoup de compétitions. Bien sûr, la thématique de gestion du stress et de la performance était toujours au rendez-vous. Après ça, j’ai commencé à pratiquer du Kung-Fu Shaolin pendant 5 ans et c’est pendant cette période que j’ai commencé à m’intéresser à l’univers de la respiration et de la méditation, chose qui manquait dans mon entraînement de gymnaste. Du coup, très progressivement, je me suis mis au yoga, mais c’est vraiment par la rencontre avec la méthode Wim Hof que j’ai compris le pouvoir du souffle sur le corps et sur le mental. J’ai pratiqué pendant 2-3 bonnes années la méthode Wim Hof et j’ai commencé mes recherches sur la respiration : yoga pranayama, breath work… Enfin, je me suis formé à l’Oxygen Advantage, une méthode plus scientifique pour la pratique sportive. C’est tout un parcours qui m’a montré que la respiration est un outil fondamental, souvent oublié, négligé et mal compris. C’est pour ça que j’ai décidé d’en parler avec ce livre.

Tu décris la respiration comme un outil de biohacking. Qu’est-ce que le biohacking ?

Alors quand je parle de biohacking, je parle d’une technique d’optimisation du corps humain qui permet d’agir de façon consciente pour modifier positivement certains paramètres physiques et mentaux. Les méthodes de biohacking permettent de mieux gérer le stress, d’améliorer la concentration, d’être plus performant, d’avoir un sommeil de qualité... D’ailleurs, la méthode Wim Hof est aujourd’hui considérée comme une méthode de biohacking. Le froid, la méditation, le yoga, l’exercice, le jeûne en sont aussi... Finalement le biohacking c’est décider d’agir de l’intérieur, sans intrant, pour améliorer sa santé au sens large.

Pourquoi, selon toi, notre respiration n’est pas optimale ?

Aujourd’hui, les scientifiques s’accordent pour dire que 9 personnes sur 10 ont une respiration dysfonctionnelle, c’est-à-dire une respiration qui n’est pas optimale. Malheureusement, c’est un trouble récent et assez répandu causé essentiellement, je pense, par l’accumulation de stress chronique typique des sociétés occidentales. Le déséquilibre de la respiration crée un cercle vicieux en empirant le stress chronique. Ce n’est pas par hasard qu’on traverse une épidémie touchant le système respiratoire. Je suis persuadé que rendre la respiration quotidienne équilibrée et fonctionnelle pourrait aider de nombreuses personnes à sortir de certaines situations pathologiques, d’ailleurs certaines études le prouvent.

Comment déceler les signes d’une respiration dysfonctionnelle ?

Trois aspects peuvent être utilisés pour déterminer la qualité de la respiration : biochimique, biomécanique et psychophysiologique. Si ces trois dimensions sont satisfaisantes alors la respiration est fonctionnelle. En revanche, si l’un des trois dysfonctionne toute la respiration est impactée. Au repos, une bonne respiration c’est une respiration nasale, silencieuse, presque invisible, profonde et lente dont le mouvement ventral est très subtil. Une respiration efficace n’a pas besoin d’être exagérée vu que l’on est au repos. Quand on commence à se mettre en mouvement, un sportif qui a une bonne respiration peut le faire avec une respiration nasale. Un sportif qui a un niveau respiratoire compromis va respirer par la bouche. Et plus tôt il respire par la bouche, moins la respiration est efficace. Je décris aussi dans mon livre et mon site un test pratique qui permet d’évaluer l’efficacité respiratoire en 5 minutes qui intéressa sûrement les sportif.ves.

Les sportifs ont souvent tendance à se préoccuper de l’alimentation mais à ignorer complètement la respiration et son carburant, l’oxygène, qui est tout aussi essentiel.

Effectivement, l’entraînement de la respiration devrait faire partie de l’équation au même titre que l’alimentation si on veut agir sur sa performance au-delà de son entraînement physique.

Plus la respiration est efficace, plus notre corps est capable de tolérer et ensuite d’éliminer le dioxyde de carbone et plus les tissus sont oxygénés à parité d’effort. Ainsi, on entre moins vite dans la filière anaérobique quand la respiration est fonctionnelle, ce qui signifie qu’on produit moins de lactate. Résultats : plus de performance aussi bien au niveau physique qu’au niveau mental et une meilleure récupération bien entendu.

Quel est l’intérêt de travailler sur le souffle pour le sportif ?

Si on travaille sur le souffle, on peut rééduquer notre respiration à être efficace, ce qui veut dire aussi être capable de faire plus avec moins au niveau physique. Et ça, c'est vraiment intéressant, notamment pour les sportifs de haut niveau. Avoir de meilleurs résultats en s'entraînant moins, c'est un potentiel inexploité qui permettrait à certains d'éviter les blessures, mais aussi de rallonger leurs carrières sportives.

En travaillant sa respiration avec des exercices quotidiens de manière consciente, est-ce qu'on peut espérer réussir à modifier sa respiration involontaire ou non-consciente ?

Oui tout à fait et c'est l'objectif. C'est un reset respiratoire qu'on va faire en s’entraînant quotidiennement. La respiration involontaire se maintient et elle va rester jusqu'à ce que des mécanismes viennent la déséquilibrer : une mauvaise alimentation, du stress non géré, de la sédentarité ou une façon de faire du sport qui n'est pas correct. Mais en pratiquant régulièrement on réussit à produire ce reset. D'ailleurs, c'est ce qu'il m'est arrivé : aujourd’hui, par rapport à ma respiration lorsque j'étais gymnaste à 20 ans, il n’y a pas photo, je suis beaucoup plus efficace !

On pense souvent à la respiration pour se calmer et donc activer le système parasympathique. Est-ce qu'il existe des techniques pour activer le système sympathique et augmenter l'énergie utile des sportifs ?

Oui, on a une série de techniques qui vont stimuler la partie sympathique du système nerveux autonome. Ce sont des techniques où la respiration est plus rapide, avec de plus grands volumes inspirés et expirés, qui peuvent aussi utiliser la bouche et qui permettent de nous activer et de nous exciter. Il y a la respiration du feu, la respiration toumo, la respiration Wim Hof, les apnées aussi.

En quoi l'activation de ces deux systèmes est importante dans la pratique sportive ? Et dans quels cas pratiquer chacune d'entre elles ?

Je conseille par exemple avant une compétition, quand on a déjà un peu le stress qui monte, de pratiquer des techniques qui vont nous calmer, nous concentrer qui permettent de gérer cette phase. Ensuite, juste avant de rentrer en jeu, je conseille de sortir de cet état de calme pour se réactiver pour être prêt à rentrer dans la compétition, en fonction du type de pratiques sportives et des besoins individuels, bien sûr. Après la compétition, on veut tout de suite redescendre pour rentrer de nouveau dans le système parasympathique, pour commencer le processus de régénération et récupérer le plus vite possible. D'ailleurs, tous les sportifs qui n'arrivent pas à se régénérer entre les séances, c'est parce qu'ils n'alternent pas l'activation des deux systèmes. Ils restent peut-être encore trop longtemps avec l'excitation du système sympathique, la récupération arrive donc plus tardivement. En redescendant plus rapidement, les processus de récupération sont accélérés.

La prescription respiratoire
Pour l'entraînement du souffle
> Respiration Catana 
Avant pour se calmer et se concentrer
> Cohérence cardiaque ou 3/6
Avant pour s'activer
> Sniff & Puff
Après pour récupérer
> Respiration carrée

Pour terminer, peux-tu nous en dire un peu plus sur les techniques de l'Oxygen Advantage dont tu es aussi instructeur ?

Les techniques de l'Oxygen Advantage visent deux objectifs : d'une part faire un reset de la respiration pour la rendre optimale et d'autre part s'entraîner à être plus efficace au niveau physique. Donc l'un des piliers de nos techniques, c'est l'hypercapnie (liée à l'hypoventilation), c'est-à-dire travailler avec plus de dioxyde de carbone pour habituer les récepteurs physiques du corps à en tolérer plus. L'autre pilier consiste à travailler en hypoxie et hypercapnie intermittente, c'est-à-dire travailler avec des apnées et moins de volume d'air pour entraîner notre corps à tolérer le manque d'oxygène. Ce sont des techniques basées sur le principe de l'hormèse, qui vise à entraîner le corps à faire face aux difficultés pour le rendre plus fort. C'est le cas de la respiration Catana ou respiration hormétique que j'ai créée justement pour entraîner et adapter le souffle à l'hypercapnie et à l'hypoxie.

La Respiration pour la maîtrise de soi, Exuvie Éditions, 2021. 18,90 €

Pour plus d'information sur la pratique de Leonardo, RDV sur son site Inspire Potentiel

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