Étienne-Émile Baulieu : « Une nouvelle arme contre Alzheimer »

Par Collectif LaNutrition.fr - Journalistes scientifiques et diététiciennes Publié le 01/02/2010 Mis à jour le 17/02/2017
Mondialement connu pour ses travaux sur la DHEA, le Professeur Émile-Étienne Baulieu est le directeur de l’unité Inserm « Stéroïdes, neuroprotection et neurorégénération », université Paris XI. Il vient de découvrir une protéine qui pourrait traiter et prévenir la maladie d'Alzheimer et plusieurs maladies neurodégénératives.

Vous venez de découvrir une protéine offrant un espoir de traitement contre la maladie d’Alzheimer. Comment cela fonctionne-t-il ?

On sait depuis des années que la protéine pathologique Tau a un rôle majeur dans de nombreuses démences que l'on appelle tauopathies, dont Alzheimer. Sous sa forme anormale, hyperphosphorylée, la protéine Tau perturbe le fonctionnement des cellules neuronales, favorisant le développement de la maladie d'Alzheimer mais aussi de plusieurs autres formes de maladies neurodégénératives. Nous avons observé une interaction directe entre la protéine Tau et une protéine naturellement présente dans le cerveau, la FKBP52. Nous nous sommes rendu compte que la protéine FKBP52 était en mesure de bloquer Tau.

Comment avez-vous fait cette découverte ?

In vitro, nous avons mélangé les protéines Tau et FKBP52. Nous avons constaté qu’elles interagissaient de manière très spécifique. Et lorsque Tau est sous sa forme pathologique, la liaison est encore plus forte. En fait, dans les cellules cérébrales qui contiennent une grande quantité de FKBP52, cette protéine diminue la concentration et l’action de Tau. La FKBP52 est une protéine anti-Tau. S’il n’y a pas assez de FKBP52, Tau s’accumule, forme des agrégats et entraîne une démence.

Quels sont les espoirs liés à cette découverte ?

Empêcher l'accumulation de la protéine Tau pourrait s'avérer utile pour prévenir, soigner ou, au minimum, bloquer le développement ultérieur de la maladie. Idéalement, il ne s’agit pas de démolir les agrégats de Tau, mais plutôt d’empêcher la protéine pathologique de s’accumuler. On a la cible, Tau, on a l'arme, la FKBP52, localisée à l’intérieur des cellules. Cette arme, on veut la booster. Reste à trouver les munitions, c'est-à-dire la molécule capable de stimuler la production de la protéine anti-Tau FKBP52. Les laboratoires ont déjà dans leurs tiroirs des molécules ayant ce mode d’action. Il faut détecter la plus efficace parmi toutes celles qui existent déjà. Je pense que d'ici deux à trois ans, si nous continuons nos recherches, nous pourrons mettre au point un traitement contre la maladie d'Alzheimer.

Cette découverte pourrait-elle également améliorer le dépistage de la maladie ?

C'est le deuxième axe de nos recherches. La FKBP52 est naturellement présente dans le corps. L’apparition de la maladie d’Alzheimer pourrait être due à un manque de protéines anti-Tau, comme les FKBP52. Si c'est avéré, alors on pourrait dépister les malades très tôt, par une simple prise de sang. Il faut savoir qu'Alzheimer reste « silencieuse » pendant cinq à quinze ans avant l'apparition des premiers symptômes.

Comment financez-vous vos recherches ?

Ces recherches sont entièrement financées par l'Institut Baulieu, que j'ai créé, et la Fondation Vivre longtemps. J’ai lancé un appel aux dons car nous ne recevons plus de fonds publics pour nos recherches. Nous avons besoin de 5 millions d'euros pour financer nos travaux. Cet argent servira à mener les études cliniques sur l’animal, puis sur l’homme pour confirmer cette découverte et trouver le ou les traitements pour doper cette protéine anti-Alzheimer.

Lire également notre article Alzheimer : nouvelle piste contre la maladie.

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