Comme l’alimentation, l’exercice et la gestion du stress, le sommeil joue un rôle important dans la prévention des démences.

Éviter Alzheimer, conserver sa mémoire, rester optimiste et créatif toute sa vie, c'est possible, explique le journaliste scientifique américain Max Lugavere dans le guide La Nutrition du cerveau, best-seller aux Etats-Unis, et fruit d'une enquête de 10 ans sur les liens entre cerveau, environnement et alimentation.
Max Lugavere : Tout à fait. S’il n’existe toujours pas de remède à la maladie d’Alzheimer, nous disposons aujourd’hui de suffisamment d’informations pour affirmer que cette maladie pourrait être évitée pour une proportion importante de gens. En 2014, 109 scientifiques et cliniciens de premier plan du monde entier avaient déjà déclaré que nous avions suffisamment de preuves pour affirmer que la démence et la maladie d'Alzheimer sont évitables.
Maintenant, en ce qui concerne l’alimentation, le mode de vie et leur impact sur notre santé, on dit que nos gènes chargent l'arme tandis que nos choix de mode de vie appuient sur la gâchette. J’ai donc cherché pendant près de dix ans à savoir ce qui, dans notre mode de vie déclenche des maladies comme la maladie d'Alzheimer et d'une manière générale affecte la santé de notre cerveau, notre humeur, notre mémoire, notre vigilance...
J'ai plongé profondément dans la littérature. Et j'ai regardé notamment ce qui se passait dans certaines parties du monde, comme à Ibadan, au Nigeria, où vivent les Yorubas. A cet endroit, le gène ApoE4 qui, aux États-Unis, augmente de 2 à 14 fois le risque de développer la maladie d’Alzheimer, n'a que peu ou pas d'association avec cette maladie.
J'ai donc commencé à réfléchir à l'évolution et aux types de régimes alimentaires que nos ancêtres auraient pu consommer à l'époque où notre cerveau – le magnifique superordinateur dont chacun de nous est l'héritier – a évolué et j'ai réalisé que pendant deux millions d'années, nos ancêtres ont mangé de manière à faire évoluer notre cerveau. Mais il y a 10 000 ans, tout a changé. Nous sommes passés du statut de chasseurs-cueilleurs à celui d'« esclavagistes », d’une alimentation basée sur les nutriments des 50 000 espèces de plantes comestibles qu'il y avait dans le monde à celle provenant des rares cultures que nous avons pu domestiquer.
Autrement dit, nous avons mangé d'une certaine façon pendant deux millions d'années, ce qui a conduit à l'évolution de notre cerveau, puis nous avons tourné le dos à ce régime. Cela a finalement ouvert la voie au fait qu'aujourd'hui, 60 % des calories que nous consommons proviennent de trois plantes seulement : le riz, le maïs et le blé.
Aujourd’hui, la base de l’alimentation dans les pays développés, surtout aux Etats-Unis, ce sont les aliments ultra-transformés, mais aussi les aliments transformés à partir des trois céréales que j'ai citées, qui sont assez pauvres en nutriments. Ces aliments raffinés sont caloriques, mais n’ont pas une bonne densité nutritionnelle, ce qui est un facteur clé de différenciation. Ces aliments font aussi grimper en flèche le taux de sucre sanguin. Et lorsque la glycémie est élevée, le taux d’insuline, la principale hormone de stockage des graisses, grimpe, lui aussi, au plafond. Le fait que nous dépendions autant de ce type d'aliments explique pourquoi, pour la première fois dans l'histoire, il y a plus de personnes en surpoids sur Terre que de personnes maigres.
Et l'autre chose que l'insuline fait vraiment bien, c'est qu'elle stocke les calories dans les cellules adipeuses tout en les empêchant d’en ressortir. C'est problématique parce qu'il y a certains organes du corps qui ont évolué pour utiliser la graisse, et l'utilisent ainsi remarquablement bien – en premier lieu, le cerveau. Le cerveau adore utiliser les graisses comme carburant.
Pas seulement, il y a d'autres facteurs que je présente dans Supernutrition du cerveau. Mais le fait que nous empêchions constamment notre cerveau d’utiliser les graisses comme carburant en raison de notre alimentation chroniquement riche en glucides, pourrait être l'un des aspects les plus néfastes de l'alimentation moderne. Et cela pourrait expliquer en partie pourquoi on pense que 40 % des cas d'Alzheimer sont attribuables à une élévation chronique de l'insuline seule.
Le moyen le plus efficace et facile d’induire un taux d’insuline bas pour le corps comme le cerveau est de jeûner. Et nous sommes chanceux car on jeûne toutes les nuits quand on dort. Ce que je fais, c’est que j’ajoute 4-5 heures de jeûne à mon temps de sommeil pour réaliser ce qu’on appelle le jeûne intermittent. Un des buts du jeûne intermittent est de permettre au corps et au cerveau de passer plus de temps avec un taux d’insuline bas.
Pendant la période quotidienne de 8 h où je mange, je privilégie les aliments à forte densité nutritionnelle comme les légumes verts à feuilles (épinards, chou kale…). Je mange aussi beaucoup d’œufs et de poissons gras (saumon, sardines, maqueraux…). L’essentiel de mon assiette est composé de légumes colorés avec un morceau de protéines qui n’est pas composé que de protéines mais aussi de nutriments protecteurs comme les oméga-3 ou la choline (par exemple poisson gras ou oeuf). J’évite les fruits modernes, à l’exception de l’avocat et des baies rouges et noires. Je consomme cependant un jus de fruit à volonté, mais pas n’importe quel jus de fruit : l’huile d’olive, un ingrédient crucial du régime méditerranéen qui a été associé à un risque moindre de démence et de maladie d’Alzheimer.
Dans Supernutrition du cerveau, je mets en lumière 10 aliments qui possèdent un ensemble de preuves solides montrant qu'ils améliorent le fonctionnement du cerveau. Ce sont les aliments qui ont la densité nutritionnelle la plus élevée. Mais effectivement ce qui est bien dans Supernutrition du cerveau, c'est que ce n'est pas seulement un livre de nutrition. C'est plus une philosophie de la santé à suivre par l'homme moderne. Mon message est plus profond que « manger plus de myrtilles ». Dans ce livre, à travers le prisme de l'évolution, nous examinons les conditions dans lequelles ont vécu nos ancêtres, et l'alimentation qui a été la leur au cours de l'évolution de notre cerveau. Évidemment, il y a certains aliments qui ont fondamentalement changé depuis le début de notre évolution, mais il s'agit d'imiter ce régime et ce mode de vie dans le monde moderne, en mettant l'accent sur la santé du cerveau.
Pour aller plus loin, lire La nutrition du cerveau de Max Lugavere
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Deux études suggèrent qu'il est possible, par des changements de mode de vie, d'inverser le déclin cognitif léger et la maladie d'Alzheimer à un stade précoce.
Ces constats issus de l'IRM font craindre des conséquences cliniques à long terme.