Dans cette vidéo, le cancérologue Laurent Schwartz explique pourquoi le cancer peut être considéré comme une maladie métabolique et quels pourraient être ses nouveaux traitements.

Une recherche française a montré le rôle que joue le manque d’oxygène dans la progression de lésions précancéreuses du cancer de la prostate.
En France, le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l’homme. Rare avant 50 ans, il devient plus fréquent lors du vieillissement, l'âge moyen au moment du diagnostic se situant à 70 ans.
Les traitements du cancer de la prostate passent souvent par la chirurgie et la radiothérapie. Mais ils conduisent à des effets secondaires, avec un risque d’incontinence urinaire et de dysfonction érectile. Le dépistage du cancer de la prostate, qui utilise le dosage PSA, est controversé car il pourrait aboutir à des surdiagnostics et des sur-traitements.
En juillet 2022, des chercheurs de l’Institut de génétique et biologie moléculaire et cellulaire - IGBMC (CNRS/Inserm/Université de Strasbourg) ont publié un article qui décrit des expériences réalisées sur des modèles murins de cancer de la prostate.
Les chercheurs du CNRS ont montré que les lésions précancéreuses prostatiques se trouvaient rapidement en manque d’oxygène (en hypoxie), en raison de la prolifération rapide des cellules et de la vascularisation insuffisante.
Cette situation conduit à l’expression de molécules, les facteurs induits par l'hypoxie (HIF), qui permettent la réponse cellulaire à l'hypoxie. Parmi ces molécules se trouve le facteur d’hypoxie HIF1A.
Les HIF sont des hétérodimères comprenant :
- une sous-unité alpha labile à l'oxygène (HIFA) : dans une situation de manque d’oxygène, cette sous-unité module l’expression de gènes impliqués dans l'angiogenèse, l'érythropoïèse, le métabolisme énergétique, la croissance cellulaire et la survie ;
- une sous-unité bêta stable.
Gilles Laverny et Daniel Metzger, auteurs de cette recherche, expliquent : « La prolifération anormale de cellules pré-cancéreuses dans les glandes prostatiques conduit à une diminution du taux d’oxygène qui va induire la stabilisation de la protéine HIF1A. Celle-ci va stimuler une reprogrammation métabolique et augmenter l’utilisation du glucose pour fournir plus d’énergie aux cellules et la sécrétion de médiateurs (cytokines) qui vont promouvoir le recrutement de cellules immunosuppressives. De plus, au cours du temps, l’hypoxie va induire une plasticité cellulaire et certaines cellules vont acquérir des caractéristiques de cellules souches, favorisant ainsi la formation de métastases. »
L’hypoxie va induire une plasticité cellulaire et certaines cellules vont acquérir des caractéristiques de cellules souches, favorisant ainsi la formation de métastases
HIF1A intervient dans le recrutement de cellules immunitaires et dans la transformation des cellules épithéliales de la prostate en cellules cancéreuses. D’après les chercheurs, c’est un facteur clé de la progression maligne des lésions prostatiques. Il pourrait donc repréenter une cible pour de nouveaux traitements du cancer.
Or les chercheurs ont pu inactiver ce facteur d’hypoxie et ainsi ralentir la progression des tumeurs : « Nous avons montré que des molécules qui vont bloquer l’activité de HIF1a ont des effets anti-tumoraux en induisant la mort de certaines cellules cancéreuses et/ou en diminuant leur prolifération. »
L'expression de HIF1A est élevée dans un certain nombre de cancers humains et des régions hypoxiques ont été trouvées dans l'adénocarcinome localisé de la prostate. La protéine pourrait donc constituer un marqueur qui renseigne sur l'évolution de la tumeur. Fait intéressant, il a été démontré qu'une expression élevée des marqueurs d'hypoxie, y compris HIF1A et le facteur TGM2, identifie les patients atteints de cancer de la prostate avec un risque élevé de récidive biochimique. Les chercheurs ont d’ailleurs en projet d’identifier de nouveaux biomarqueurs pour améliorer le diagnostic du cancer de la prostate.
D’après eux, l’hypoxie intervient dans la plupart des tumeurs solides. « Mais classiquement, il était admis qu’elle jouait un rôle important dans la vascularisation des tumeurs à des stades tardifs et ainsi favoriserait l’apparition des métastases. »
Ces travaux paraissent dans la revue Science Advances.
L'oxygène permet de réaliser la respiration cellulaire dans les usines énergétiques des cellules : les mitochondries. Une molécule de glucose, en présence d'oxygène, peut ainsi produire 36 molécules d'ATP. Cette respiration cellulaire semble altérée dans des cellules cancéreuses.
Dès les années 1920, Otto Warburg a observé que les cellules cancéreuses réalisent la fermentation, une réaction ne nécessitant pas d'oxygène. Dans son livre Les clés du cancer, le cancérologue Laurent Schwartz décrit ces travaux historiques et explique « Une cellule se cancérise quand les électrons, les protons et l’oxygène ne peuvent plus s’unir et être éliminés de la cellule sous forme d’eau. »
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Découvrir la boutiqueDans cette vidéo, le cancérologue Laurent Schwartz explique pourquoi le cancer peut être considéré comme une maladie métabolique et quels pourraient être ses nouveaux traitements.
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Pour plusieurs chercheurs dont le Français Laurent Schwartz (Assistance Publique-Hôpitaux de Paris) et les Américains Thomas Seyfried (université de Yale) et Dominic d’Agostino (université de Floride du Sud), le cancer doit être considéré comme une maladie métabolique, à l’instar du diabète, et non comme une maladie du génome. Cette approche part des découvertes faites par l’Allemand Otto Warburg dans les années 1920 sur le métabolisme très particulier des cellules cancéreuses. Pour ces travaux, il se verra décerner le Prix Nobel en 1931.