Cancer : un régime qui imite le jeûne potentialiserait les effets de la vitamine C et des traitements

Par Sarah Amiri - Diététicienne et journaliste scientifique Publié le 15/05/2020 Mis à jour le 15/05/2020
Actualité

Une étude chez la souris suggère qu'une alimentation imitant les effets métaboliques du jeûne pourrait potentialiser l'action de la vitamine C et des traitements du cancer.

Pourquoi c’est important

Le jeûne – qui selon certains travaux pourrait permettre de mieux supporter les traitements du cancer et d'aider à combattre la maladie – est une option difficile pour les patients car il induit une perte de poids à un moment où ils perdent aussi du poids à cause des traitements. De plus, le jeûne peut diminuer de manière transitoire l'immunité. C’est pourquoi les régimes qui imitent les effets métaboliques du jeûne sont étudiés dans ce cas de figure. Ce type d'alimentation comporte très peu de calories, des aliments essentiellement végétaux, peu de protéines, de sucres et de bonnes matières grasses. Cette alimentation fait que les cellules se comportent comme si le corps était à jeun, tout en apportant des nutriments importants.

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La vitamine C, quant à elle, connaît un regain d’intérêt dans le traitement du cancer car elle aurait des propriétés antitumorales et qu'elle pourrait protéger contre la toxicité des traitements, lorsqu’elle est administrée à haute dose et par voie intra-veineuse. Cependant, on ne dispose de données que sur un petit nombre de patients.

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Dans une étude publiée dans Nature Communications menée notamment par Valter D. Longo (université de Californie du Sud), spécialiste du jeûne, des chercheurs de l'Institut d'oncologie moléculaire de la FIRC (IFOM) de Milan ont évalué le potentiel de l'association régime imitant le jeûne + vitamine C avec ou sans traitement sur des souris cancéreuses.

Ce que dit l’étude

« Notre première expérience a montré des effets remarquables », a déclaré Valter Longo. « Utilisées seules, une alimentation imitant le jeûne ou la vitamine C réduisent la croissance des cellules cancéreuses et provoquent une légère augmentation de la mort des cellules cancéreuses. Mais ensemble, elles ont eu un effet spectaculaire, tuant presque toutes les cellules cancéreuses. »

Ces effets « spectaculaires » que décrit le scientifique ont surtout été observés dans le cas des cancers dont le gène KRAS a muté.

Zoom sur le gène KRAS
La recherche des mutations génétiques dans les cellules cancéreuses permet aujourd’hui d’orienter le traitement des cancers. Les mutations des gènes RAS sont impliquées dans environ un tiers des tumeurs et jusqu’à 95 % dans les cancers du pancréas. Les mutations du gène KRAS, le plus actif de cette famille, impliquent que l'organisme résiste à la plupart des traitements contre le cancer, réduisant ainsi le taux de survie des patients. On estime que les mutations du gène KRAS se produisent dans la moitié de tous les cancers colorectaux.

Selon ces travaux, une alimentation imitant les effets du jeûne semble efficace à deux niveaux : en sensibilisant les cellules à la chimiothérapie et en protégeant les cellules normales des effets secondaires chimiotoxiques.

De plus, une alimentation imitant le jeûne est capable d'augmenter l'effet de la vitamine C contre les cancers à mutation KRAS notamment en régulant les niveaux de fer.

En effet, les scientifiques ont également découvert que les patients atteints de cancer colorectal ayant des niveaux élevés de la protéine de liaison du fer, la ferritine, ont moins de chances de survie.

Ces résultats doivent être pris avec précaution

Pour commencer, leur traduction pour la santé humaine n'est pas évidente car de nombreux traitements qui "marchent" expérimentalement ne montrent pas d'efficacité en situation réelle.

Ensuite, trois des auteurs de l'étude, dont Valter Longo ont des liens avec la société L-Nutra, fondée par Longo, qui commercialise précisément des aliments mimant le jeûne.

En pratique

« Manger ce que vous voulez » est bien le pire conseil que l’on peut donner à un patient malade, surtout en cas de cancer, comme le souligne Magali Walkowicz dans son livre Combattre le cancer avec le régime cétogène. Pourtant, cette attitude est encore la norme en milieu hospitalier et elle s'explique peut-être par le fait que malgré des déennies d'études sur la nutrition et le cancer, on en sait toujours assez peu sur ce qu'il convient de faire. S’il est important de maintenir un bon apport calorique et de lutter contre la perte d’appétit due aux traitements pour maintenir le poids des patients à risque de dénutrition, cela ne devrait pas être le seul objectif de la nutrition en cas de cancer. En complément des traitements, en effet, les changements alimentaires positifs permettent aux patients qui en ont besoin de se sentir actifs face à la maladie.

Des patients optent pour un régime cétogène, encadré par un professionnel de santé, car des rapports encore peu nombreux suggèrent que cela peut s'avérer une aide utile en complément des traitements, notamment dans la gestion du poids et le maintien de l'humeur. Certaines tumeurs (glioblastome) pourraient être sensibles à cette alimentation, d'autres pas, et d'autres encore pourraient en tirer avantage. Des études sur un plus rand nombre de patients sont attendues pour se prononcer sur ce type d'alimentation.

Les alimentations contrôlées de manière à imiter le jeûne, comme celles de cette étude, sont encore étudiées à titre expérimental et on ignore si elles peuvent améliorer les patients. Il est donc trop tôt pour les préconiser.
 

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