Gary Taubes : « Le problème du surpoids et du diabète, ce n’est pas les calories, c’est l'insuline »

Par Priscille Tremblais - Journaliste scientifique Publié le 20/01/2021 Mis à jour le 20/01/2021
Point de vue

Avec « Révolution Kéto », son dernier livre, le célèbre journaliste scientifique américain Gary Taubes présente un argumentaire étayé en faveur du régime cétogène comme moyen potentiel de prévenir ou traiter le surpoids, l’obésité, le diabète et même Alzheimer ou certains cancers. Dans cet entretien, il explique pourquoi, selon lui, les recommandations classiques sont en échec.

LaNutrition.fr : À qui s’adresse « Révolution Kéto », votre nouveau livre ?

Gary Taubes : Je n’ai pas écrit ce livre pour les personnes minces, même si je suis convaincu que sa lecture leur ferait du bien. Je l’ai écrit pour celles qui prennent bien trop facilement du poids, qui voient par exemple que leur conjoint qui suit pourtant la même alimentation ne prend pas un gramme. Je l’ai écrit aussi pour celles qui voient inexorablement se rapprocher le surpoids, l’obésité, le diabète et l’hypertension, voire une combinaison de ces affections, ou qui en souffrent déjà et courent un risque élevé de succomber à une maladie cardiaque, un accident vasculaire cérébral ou toute autre maladie chronique. Enfin, c’est également pour leurs médecins que ce livre existe.

Dans votre livre, vous affirmez que ce n’est pas parce qu’on mange trop qu’on est en surpoids ou obèse. Qu’est-ce qui est en cause, dans ce cas ?

Les personnes qui souffrent d’obésité ne sont pas des personnes minces qui mangent trop. Ce que je veux dire avec ce livre, c'est que l'obésité n'est pas un problème de déséquilibre calorique ou de suralimentation. Quand vous êtes trop gros, votre corps s’efforce en réalité d’accumuler un excès de graisse, même avec peu de calories, car il est comme « programmé » pour cela. Donc, l'idée que pour retrouver un poids normal il faut absorber moins de calories qu’on en dépense, est particulièrement naïve d’un point de vue biologique. Le problème des personnes en surpoids réside vraiment dans une tendance hormonale à accumuler la graisse ; c’est ce qui les différencie des personnes minces. 

Quel est ce trouble hormonal ? 

L'accumulation de graisse est principalement régulée par l'hormone insuline, donc si on est en surpoids, obèse, diabétique ou si on a un risque élevé de l’être il faut minimiser son taux d'insuline. C’est ainsi qu’on résoudra le problème. Le meilleur moyen d’y parvenir c’est de manger peu de glucides. Ainsi, au lieu d'accumuler des graisses, le corps s’en débarrassera. C’est le principe de l’alimentation cétogène, ou kéto, que je défends dans mon livre.

Vous dites que le cétogène n’est pas un régime, de quoi s’agit-il alors ?

Les experts sont unanimes : pour obtenir des résultats durables, en particulier chez des personnes ayant un problème de régulation de l'insuline, les préconisations d'un régime doivent être suivies à vie. Il est par conséquent inapproprié d’utiliser le terme « régime » pour désigner un changement de notre alimentation et de notre façon de nous nourrir. Je préfère parler de mode de vie ou d’habitudes alimentaires. C’est pourquoi j’utilise le terme alimentation LCHF/cétogène (LCHF = low carb high fat, NdlR) plutôt que régime LCHF/cétogène. 

Quelles sont les preuves scientifiques prouvant que le kéto fait maigrir et peut inverser le diabète ?

L'étude la plus impressionnante a été conduite par la start-up californienne Virta Health. Les participants ont été invités à suivre des conseils nutritionnels classiques et prendre des médicaments, ou un régime cétogène bien formulé. Dans ce dernier groupe, on a observé des résultats remarquables au cours des deux ans qu’a duré l'étude, avec de nombreuses rémissions de diabète. Certes, ce n'était pas une étude randomisée, mais elle a produit un vrai changement de mentalité dans la communauté scientifique. De plus en plus de professionnels de santé admettent que les glucides favorisent le stockage de graisses et le surpoids. Idéalement, il faudrait conduire un essai clinique rassemblant des dizaines de milliers de personnes, en surpoids, obèses, prédiabétiques ou diabétiques et suivant soit une alimentation cétogène, soit une  autre alimentation saine comme le régime méditerranéen, DASH ou le régime végétarien. Ces participants seraient suivis pendant plusieurs années. Un tel essai coûterait très cher mais il permettrait d'établir vraiment les bénéfices de ces différentes alimentations.

Si l’alimentation kéto donne des bénéfices, ce n’est pas la seule. Les régimes qui suppriment les aliments ultra-transformés comme le paléo, certains régimes pauvres en calories comme le jeûne intermittent conduisent aussi à des améliorations de la glycémie et du poids. Comment l’expliquez-vous ? 

Je pense, avec d'autres, que les régimes ne fonctionnent que lorsqu'ils réduisent l'insuline, car c'est le mécanisme qui fait que vos cellules adipeuses mobilisent la graisse qu'elles ont stockée et que vos tissus maigres brûlent cette graisse comme carburant. Voilà ce qui compte. Et c'est pourquoi une forme de restriction des glucides est nécessaire.

Tout le monde doit-il monter dans le train kéto, c’est-à-dire manger cétogène ?

Les personnes qui ont une bonne santé métabolique peuvent manger des fruits, des légumes, des produits céréaliers entiers, des légumes secs. Je leur suggère de ne pas boire de boissons sucrées, de manger peu de sucre, parce qu’ils seront en meilleure santé encore, mais c'est à peu près tout ce que j’ai à leur dire. 

Le problème, c’est tous les autres, le fait que que certains d'entre nous ne tolérons pas les les glucides. Nous devons manger kéto pour être en bonne santé alors que les personnes en bonne santé métabolique, qui mangent des glucides, pensent que nous pouvons nous alimenter comme elles. Elles pensent savoir ce qu'est une alimentation saine, que leur définition d'une alimentation saine est la bonne, et qu’il suffit de manger un peu moins pour ne pas grossir, éviter, le diabète ou l’hypertension. Ce n'est pas vrai.

Hormis le kéto, avez-vous, à titre personnel, adopté d’autres approches alimentaires? 

Je pratique le jeûne intermittent ou fasting. Je saute le petit déjeuner. J’ai testé le concept et j'ai bien aimé les résultats, je me sentais mieux et j’ai fini par perdre quelques kilos que je ne pensais pas pouvoir perdre. J'ai donc continué parce que j'avais plus d'énergie. Je tenterais bien l’expérience d’un régime carnivore mais ma femme est végétarienne et elle n'aime pas particulièrement ma façon de manger de toute façon. Mon mariage ne survivrait peut-être pas à un régime carnivore d’un mois !

Pour en savoir plus, lire : Révolution kéto

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