Composés perfluorés et diabète : un lien préoccupant

Par Didier Souccar - Pharmacien Publié le 07/01/2014 Mis à jour le 14/04/2022
Actualité

L'exposition aux PFAS, des perturbateurs endocriniens rémanents pourraient augmenter le risque de diabète selon plusieurs études.

Les composés perfluorés

Des contaminants de l’environnement sont liés au diabète. Après les PCB, les pesticides, les phtalates et certains bisphénols, les composés perfluorés sont eux aussi liés à la maladie.

Les composés perfluorés, ou PFAS (pour perfluokaryl polyfluokaryl substances), sont des molécules dont la chaîne carbonée est liée à des atomes de fluor. Les PFAS comprennent par exemple l’acide perfluorooctanoïque (PFOA) ou l’acide perfluoronanoïque (PFNA). Parce qu’ils sont à la fois solubles dans l’eau et les graisses, ils permettent de nombreuses applications : on les trouve dans des ustensiles de cuisine comme anti-adhésifs, des matériaux imperméables comme le GoreTex, les mousses anti-incendie dans le mobilier, dans les cires, vernis, peintures, produits nettoyants… Dans l’organisme, une fois absorbés, ces composés s’accumulent dans la circulation sanguine, le foie, le rein. Ces produits chimiques sont dits permanents en raison de leur persistance dans l'environnement et le corps humain.

Les PFAS se comporteraient comme des diabétogènes potentiels en raison de leur similitude structurelle avec les acides gras.

Ces composés ont déjà été associés à une baisse de l'immunité. Ils font partie des produits chimiques soupçonnés de favoriser autisme et maladies neurologiques.

Lire : 10 produits chimiques en lien avec l'autisme et les troubles neurologiques.

Un risque équivalent à celui de l'obésité

Ces composés pourraient augmenter le risque de diabète chez les femmes d'âge mûr, selon les données de l'étude américaine SWAN lancée pour évaluer les rôles de plusieurs polluants environnementaux dans les maladies chroniques pendant et après la ménopauseDans l'analyse actuelle, un total de 1237 femmes suivies de 1999-2000 à 2017 ont été évaluées.

Selon le type de PFAS individuels, l'exposition est associée à un risque de diabète augmenté de 36 à 85%. L'exposition à 7 PFAS sous forme de mélanges était associée à un risque de diabète multiplié par 2,62 pour les personnes les plus exposées, par rapport aux moins exposées. Cette découverte suggère un effet additif potentiel de plusieurs PFAS sur le risque de diabète, ont noté les auteurs. Ce risque est similaire à celui du surpoids et supérieur à celui du tabagisme.

Les résultats ont été publiés dans Diabetologia. Selon les auteurs de l'étude, "une exposition réduite à ces produits chimiques peut être une approche préventive importante pour réduire le risque de diabète à l'échelle de la population".

"Malgré la réduction à l'échelle de la population des concentrations sériques de certains PFAS, écrivent les auteurs, presque toutes les personnes sont encore exposées à ces produits chimiques ainsi qu'à d'innombrables alternatives et substituts comme les PFAS à chaîne courte, que ce soit par l'eau potable, les aliments, l'air et produits de consommation, y compris les cosmétiques."

Les personnes qui vivent à proximité de sites industriels, de bases militaires ou d'usines de traitement des eaux usées peuvent être particulièrement exposées à un risque accru d'exposition aux PFAS et d'incidence du diabète, ont expliqué les chercheurs, notant que la réduction de l'exposition pourrait aider à réduire ces risques.

Un lien déjà décrit dans d'autres études

Déjà en 2013, des chercheurs de l’université d’Uppsala en Suède avaient voulu savoir si les PFAS étaient liés au diabète. En effet, cette équipe avait déjà montré des associations entre certaines toxines de l’environnement et le diabète.

Lire : Les phtalates des plastiques augmenteraient le risque de diabète

Pour cela, les chercheurs avaient étudié 1 016 hommes et femmes âgés de 70 ans entre 2001 et 2004. Résultats : 7 substances PFAS avaient été détectées chez quasiment tous les participants. Il y avait une relation significative entre le PFNA et le diabète : un risque de diabète était observé pour les plus fortes valeurs de PFNA.

D’après Monica Lind, qui a mené ces travaux, « Nous avons vu que de hauts niveaux, en particulier pour un des composés perfluorés, l’acide perfluoronanoïque (PFNA), étaient liés au diabète. L’acide perfluorooctanoïque (PFOA) était aussi associé au diabète dans ce groupe. Nous avons aussi observé que le PFOA était lié à une interruption de la sécrétion d’insuline du pancréas ».

Lire : Même en mangeant sain et bio, on s'empoisonne aux phtalates et au bisphénol

Pour en savoir plus sur les risques liés à l'environnement, lire le livre du Pr Jean-François Narbonne, Sang pour sang toxique

Source

Lind L, Zethelius B, Salihovic S, van Bavel B, Lind PM. Circulating levels of perfluoroalkyl substances and prevalent diabetes in the elderly. Diabetologia. 2013 Dec 14.

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